L'auteur : marathon-Yann
La course : Trail du Saint Quentin - 50 km
Date : 12/6/2016
Lieu : Plappeville (Moselle)
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Distance : 50km
Objectif : Pas d'objectif
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Rarement je n’aurais attendu une course avec autant d’impatience que ce trail du Mont Saint-Quentin. Il faut dire que cette course passe à côté du village où j’ai grandi et où habitent toujours mes parents, sur des chemins parcourus à pied, en VTT, à cheval et même en luge ; en promenant mon chien ; en me baladant avec mes parents et mes enfants, mes amis ou mon épouse. Outre l’aspect affectif, les 50 km annoncés, en semi-autonomie, avec un profil cassant (1650 m de D+) constituent un défi de taille pour le routier que je suis.
Le moral est donc au beau fixe avant le départ. Pour cette 12ème édition du trail, les organisateurs nous offrent différentes courses : 1 ou 2 km pour les (mes) enfants, 6km, 15km, 25km (sur lequel s’aligne mon triathlète de frère) et, pour la première fois, le 50 km. Un beau weekend de sport en perspective, d’autant que la pluie annoncée nous épargne finalement.
Honte aux hooligans qui enlèvent les flèches jaunes !
Le peloton après 50m de course.
Pour notre part, nous sommes 105 à nous présenter sur la ligne de départ, dimanche à 8h le matin. Les organisateurs ont bien fait les choses. Une première boucle d’1 km dans le village avec une petite butte pour étirer le peloton, un passage sur une terrasse surplombant Metz, avant d’attaquer les singles. Il n’y aura plus que des chemins jusqu’à l’arrivée. Nous attaquons ceux-ci par la côte de Bismark (oui, nous sommes en Moselle). Bon, c’est un peu exagéré de parler de chemin pour ce tronçon, le terme exact serait plutôt « bourbier » ou « patinoire ». J’éprouve un grand moment de solitude, que suis-je venu faire dans cette galère ? Je n’imagine pas courir 50 km comme ça !
Heureusement, la qualité des chemins va rapidement s’améliorer. Et sur un parcours très varié, nous pouvons courir le long des vignes ou dans les sous-bois, dans les villages ou dans des prés. Vu le nombre de coureurs, nous sommes par tout petits groupes, en file indienne. Un coureur manque une bifurcation, un concurrent le rattrape pour lui indiquer la bonne direction, bel état d’esprit. Nous sommes à ce moment tout près de mon village, et j’éprouve un véritable bonheur à gambader de nouveau sur ces sentiers bien connus. Je cours sans arrière-pensée, sans me soucier de gérer mon allure, juste pour le plaisir d’être là. J'ai 8 ans. Les kilomètres défilent.
Tout est sous contrôle (ou presque)
Après la côte de Notre-Dame du gros Chêne, nous traversons une route. Le bénévole qui gère la circulation nous annonce « 17,5 km », ce qui correspond au kilométrage indiqué par ma montre GPS. S’ensuit une longue descente, sur un chemin d’abord caillouteux, puis plus glissant, à cause de la boue et des limaces orange. Arrivé en bas, nous bifurquons à gauche. Alors que je profite d’une montée pour boire à ma gourde, une voix amicale me prévient :
« -Gère bien ton ravitaillement, vous avez loupé le ravito du 25ème kilomètre.
- Hein ?
- Je suis le premier de la course. Il y a eu un problème de balisage, ce n’est pas de votre faute mais j’en suis au km 29 et vous au 24. C’est chiant pour vous et pour moi : je dois redoubler tout le monde. »
Et il disparait, me laissant incrédule.
Peut-être parce que je n’ai pas compris où je m’étais trompé (je n’ai eu aucune hésitation sur le parcours), peut-être par fatigue ou tout simplement pour suivre les autres, je n’imagine pas une seconde faire demi-tour pour retourner sur le bon tracé. Je me dis que je le signalerai à l’organisation et que je serai déclassé, ce qui ne m’aide pas à aborder les 22 km restant.
Ceux-ci sont pourtant plaisants. Nous pénétrons dans un ancien domaine militaire, sous-bois riche en fortifications, tranchées, murets, formidable terrain de jeu pour un trail. Au premier carrefour, je rattrape deux coureurs perplexes : une flèche indique à droite, l’autre à gauche. Après concertation, nous tournons à gauche, la flèche semblant mieux accrochée. Je vais même jusqu’à tourner la flèche indiquant la droite pour les coureurs qui suivent. J’avoue que je ne suis pas serein les 200 m suivant, jusqu’à ce qu’une nouvelle flèche m’indique que je n’ai pas perdu le reste du peloton.
A l’intersection suivante, nous sommes encore plus perplexes : il n’y a plus aucune indication. Arrive un VTTiste qui nous explique :
« Je fais partie de l’organisation. Il y a du débalisage. Je suis passé ici il y a 5 min pour remettre une flèche, elle a déjà disparue. Il faut continuer tout droit jusqu’au champ. »
Les bois nous semblent soudainement hostiles. Un coureur s’énerve : « j’ai un problème avec ma poche à eau, je n’ai rien bu depuis le dernier ravito, je n’en peux plus ». Grand seigneur, je lui donne ma dernière bouteille, sans réaliser que je vais rester 2h sans boire ni manger. « J’en ai marre, je crois que je vais abandonner », reprend-t-il en me rendant ma bouteille vide.
Pour moi comme pour les 4 coureurs qui m’accompagnent, il n’est pas question d’abandon. Nous continuons jusqu’au champ : toujours pas de fléchage. Un coureur sort une boussole, je me souviens alors que j’avais imprimé une capture d’écran du parcours. Expérience inattendue, notre trail se transforme en course d’orientation par équipe, car nous formons maintenant une équipe, nous entre-aidant, nous attendant et cherchant ensemble les indices : là un nœud qui soutenait une flèche, là un chemin, là un champ. Et bien qu’ayant, à notre corps défendant, loupé quelques kilomètres, nous réussissons dans ce tronçon sans balisage à respecter scrupuleusement le parcours prévu.
En croisant les quelques bénévoles qui nous attendent à l’intersection de la départementale, nous avons l’impression d’un véritable retour de la civilisation : « Vous êtes sur la bonne route ! Pas forcément avec le bon kilométrage, mais sur la bonne route. Courage, l’important c’est de prendre du plaisir. »
Retour à la civilisation
Et de plaisir, il peut de nouveau en être question. Plus de problème de balisage maintenant, nous pouvons nous concentrer sur le parcours. Toujours aussi varié, technique, difficile dans les montrées comme dans les descentes. Nous empruntons un escalier de 360 marches (plus difficiles que celles de l’Ecotrail, surtout qu’il reste 10 km derrière), redescendons au flan de la vallée de Monvaux, juste pour le plaisir de remonter par un passage pentu et glissant que j’escalade à quatre pattes, en m’accrochant désespérément aux racines. Puis nous arrivons aux ruines mérovingiennes de Saint Germain, où nous commençons à rattraper des concurrents du 15 km. Et d’atteindre enfin, enfin, le ravitaillement.
La suite est plus facile, même si je suis bien entamé. En parcourant ces chemins bien connus, je réfléchi à ce que je dirais aux débaliseurs si je les croisais. A ce moment de la course, je leur dirais « je voulais courir 50 km dans mes bois, je n’en aurais fait que 45, quelle importance ? je me suis bien amusé quand même. » Je me dis aussi qu’il n’est pas si fréquent de se faire doubler par le premier. Une dernière côte, une longue descente, et nous débouchons sur l’arrivée. J’y retrouve mon frère qui m’attendait. Fidèle à ma promesse, je signale aux officiels que je n’ai pas pu parcourir les 50km. Dans un premier temps, je serai déclassé, mais les organisateurs auront l’intelligence et la gentillesse de réintégrer dans le classement les coureurs dans mon cas. Si dans mon cas ce classement ne veut pas dire grand-chose, je suis vraiment heureux que mon effort de 5h20 ai été reconnu.
Encore une fois, ce coquin de Saint Quentin m’a conquis.
Avec Christian, avec qui je jouais au foot il y a 15 ans, et qui organise cette course
Avec mon frangin
3 commentaires
Commentaire de Freddy55 posté le 21-06-2016 à 12:26:23
Merci pour ton récit, en effet, vous avez eu des problèmes de balisage vous aussi.
Il va falloir qu'ils fassent quelques chose pour ne plus que ça arrive. Faire comme d'autre trail, mettre des personnes aux différentes bifurcations par exemple?
A puis, quelles différences au départ comme a l'arrivé, pour moi c'était noir de monde.
Pour un routard, tu t'en ai bien tiré dis donc ! Bravo.
Commentaire de marathon-Yann posté le 21-06-2016 à 13:40:23
Mettre des personnes à chaque bifurcation, il leur faudrait des centaines de volontaires. Pour une course à 100 participants, ca ne me semble pas possible.
Pour moi, le problème est lié aux *** qui se croient malins de débaliser. L'organisation ne peut pas faire grand chose, à part peut-être mettre plus de VTTistes ?
Ce se passe comment sur les autres trails ?
Commentaire de Freddy55 posté le 21-06-2016 à 13:43:07
Je n'ai jamais fait plus de 22km mais a chaque fois, il y avait des personnes a chaque endroit stratégique.
(Trail des brosses, trail des tranchées entre autres)
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