Récit de la course : Trail de la Pérouse - 26 km 2015, par matmat39

L'auteur : matmat39

La course : Trail de la Pérouse - 26 km

Date : 1/3/2015

Lieu : Plombieres Les Dijon (Côte-d'Or)

Affichage : 1355 vues

Distance : 26km

Matos : mes speedcross et mes grosses cuisses

Objectif : Pas d'objectif

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La Perouse 2015: la gazelle et le sanglier. Retour sur un beau moment de partage...

En début d’année, avec une douzaine de membres du DOLE ATHLETIQUE CLUB, nous avons décidé de nous  donner pour objectif de participer à l’Eco Trail de Paris le 21 mars prochain.

Dans notre plan de préparation, notre coach Laurent a coché le TRAIL DE LA PEROUSE qui doit nous servir de répétition générale à 3 semaines de l’échéance.

Réveil à 6h30 un dimanche (ça fait mal aux gencives)… Et là sans ouvrir les volets j’entends la pluie qui tombe… Je me posais des questions sur le choix de mes chaussures… J’ai ma réponse ça sera SPEEDCROSS…

Petit déjeuner et départ pour plombière où nous sommes très bien accueilli par les bénévoles. Un de  mes collègues qui se reconnaitra repère une gentille dame avec une table présentant un écriteau « litige »…

Voyant la météo dégeulasse à l’extérieur nous décidons de  déposer réclamation… Malheureusement la pluie ne s’arrêtera pas et nous accompagnera assidument toute la matinée…

Départ à l’échauffement, nous décidons de repérer les premiers km de la course car d’après le profil ça grimpe sévère dès le début. Devant la ligne de départ nous voyons juste en face une première grimpette copieuse. Eh ben même à l’échauffement ça fait mal à l’aorte… Le cœur monte direct. Puis petite descente et une nouvelle côte plus longues avec des pourcentages encore plus importants sur une petite route bitumée. Après 1km500 on trouve un joli single bien boueux qui laisse augurer une course où nous ne devrions pas être gêné ni par la chaleur ni par la poussière.

Nous rebroussons chemin car l’heure du départ approche et rejoignons la ligne.

Oups ! Je m’aperçois que je ne me suis même pas présenté… J’ai commencé la course à pied il y a 2 ans au sein du club de Dole. Au départ uniquement sur route, je ne cours que pour le plaisir et pas pour le chrono. Question gabarit, je fais partis de la tribu des « gros cuissots » autrement dit j’ai plus le physique d’un rugbyman que d’une gazelle… Je regrette d’ailleurs que les catégories ne récompensent les participants qu’en fonction de leur âge… Pourquoi ne pas imaginer des catégories par poids comme au judo ??? J’aurais peut-être une chance de faire un podium en course dans la categorie + de 75kg ^^.

Depuis la fin d’année 2014, motivée par ma comparse d’entrainement Alice. Ah oui il faut que je vous présente Alice…. Il s’agit d’une jeune fille de 22 ans, qui a commencé la course à pied et rejoint le club en début de saison. A mon plus grand bonheur, nous avions le même temps référence sur 10km et sur semi-marathon, le même rythme à l’entrainement... Ca fait une énorme différence de ne plus se retrouver intercalé entre deux groupes, seul derrière les costauds au bout des 2 premiers 1000m de fractionné

Naturellement nous partageons nos entrainements au club depuis 6 mois et nous progressons ensemble en se motivant lors des séances de fractionné et autres réjouissances proposées par notre entraineur. « A cause » d’elle en fin d’année,  j’ai participé à 1 trail et 2 cross… Et là j’ai attrapé le virus de la course nature… Ma coéquipière a déjà de solides références avec plusieurs podiums sur trail. Moi je débute et découvre avec pour seul objectif m’amuser, apprendre et de combler le retard que j’ai sur elle hors du bitume…

Ce trail devait être une course de préparation… Enfin ça c’est ce que je croyais et ce dont j’essayais de me convaincre. Je n’en même pas large… Premier vrai trail, de la boue, première fois que je fais autant de dénivelé et surtout première fois que je participe à une course de plus de 21km… D’habitude loquace et blagueur, là c’est silence radio… Le trouillomètre à 0…

 

Lorsque Alice et moi nous mettons dans le Sas de départ nous nous retrouvons en deuxième ligne (chercher l’erreur…^^)… J’ose un « tu ne veux pas qu’on recule un peu pour pas se faire aspirer ? ». La réponse d’Alice,  « j’aime mieux partir devant je n’aime pas me faire enfermer »…  Visiblement j’ai l’impression que notre définition de « sortie de préparation » n’est pas la même. Je me cale donc contre la barrière  pour ne pas gêner les avions qui ne manqueront pas s’envoler dès le coup de pétard… 10 secondes avant le départ le cardio s’affole mais comme le disais mon grand père « c’est pas une fois qu’on a fait dans sa culotte qu’il faut baisser son pantalon… » maintenant on y est…

Dernière tape dans la main de ma coéquipière de choc, dernier regard et je retente un « ne te laisse pas aspirer au départ, on y va tranquille hein ???... »… et PAN….

Ça part vite, très vite et directement dans la première cote de 300m, ça remonte de toute part, ça croise, très vite je vois 1, 2 puis 3 filles nous doubler et prendre une dizaine de mètres d’avance… La route s’élève fortement et sur la petite route bitumée, j’entends la foulée de ma coéquipière accélérer… je ne l’ai encore pas vu passer mais je sais que c’est le début de la fin…Ca ne fait même pas 800m que nous courrons je la vois passer comme un avion en allant à droite à gauche…  On aurait dit une vachette d’interville qui a vu du rouge… (la comparaison n’est pas flatteuse mais elle ne m’en tiendra pas rigueur…) Elle a 10m d’avance sur moi et là deux options… Je continue à mon rythme et je sais que je ne la reverrai qu’après la douche ou j’accroche…

Je n’ai jamais osé jusqu’à aujourd’hui car je n’ai pas confiance en mes capacités. Je décide de ne pas écouter la petite voix de ma conscience et de suivre. J’accélère moi aussi, mais avec mes 25kgs de plus qu’elle je double plus difficilement (à cause du manque d’espace hein …^^). A la faveur d’une portion à fort pourcentage « mes gros cuissots » me permettent de remonter et nous doublons tour à tour 1 – 2 puis 3 féminines juste avant d’entrer dans le fameux single.

Stratégiquement le coup est parfait pour Alice et j’imagine qu’elle va maintenant ralentir un peu et gérer sa course histoire de jauger la concurrence… Loupé… Nous continuons sur un rythme soutenu, les sensations sont meilleures qu’au départ et je me rassure un peu.

Dans le single, je vois Alice partir 10m devant moi, doubler, sautiller et se faufiler… moi et mes cuisses restons coincés, je ne veux pas prendre le risque de zigzager de me blesser ou de faire tomber un autre participant. Je reste derrière en attendant une ouverture pour dépasser, Ma complice vole jusqu’à ce qu’un traileur ayant oublié son esprit sportif dans sa voiture refuse de se laisser passer, lui ferme 3 fois la porte alors qu’il y avait deux traces possibles et pire la pousse en hurlant. L’ancien ¾ aile de rugby que je suis fulmine mais je suis trop loin pour intervenir.

Petite parenthèse sur cette personne au comportement juste détestable. Pour moi ce genre de coureur n’a rien à faire sur une course. Comment peut-on refuser de se faire passer par une jeune fille qui occupe la tête de course en la poussant au risque de la faire tomber et de la blesser ? Ok c’est un single mais la différence de rythme était telle que lorsqu’on est respectueux on se sert sur le côté et on laisse passer quel que soit le niveau ou le classement que nous occupons lorsqu’on a plus rien à gagner…

Déjà que je m’efforçais de ne pas me faire lâcher par mon lièvre, là je sais que coincée derrière ce malotru, la pression monte… monte monte… Ça ne manque pas au sommet de cette première cote de 2.5km nous arrivons sur un chemin blanc. La « vachette d’Interville » déboite et accélère. J’aurais bien fait une petite pause mais j’en fais de même pour combler la vingtaine de mètres qui nous sépare à la sortie du single.

Notre cher ami pousseur, geuleur et aussi civilisé qu’un parisien sur le périphérique le vendredi à 17h, vexé essaie d’accrocher et explose… Y a une justice… ^^

Première descente que nous abordons à bloc, j’adore le décor de cette zone Natura 2000, le sentier est très technique avec pierre qui roule et boue. Alice continue son numéro d’équilibriste avec une foulée légère et aérienne en rebondissant sur chaque obstacle, ça va très très vite. Moi j’essaie de suivre dans un style plus personnel…  le sanglier sauvage… dans un style plus… agricole… ^^

Fin de la descente où nous avons encore fait de jolis dépassements grâce à l’accroche des speedcross. Nous arrivons dans une combe magnifique vers un ancien monastère, la route s’élève et surprise dans la ligne droite je vois 400m devant nous les costauds du DAC, le coach et 3 autres coureurs bien meilleurs que nous… On n’est pas loin et là ma conscience me dit « t’es vraiment pas à ta place, t’es parti trop vite »… Là encore je déconnecte la petite voix dans mon cerveau et me concentre pour suivre le rythme de mon métronome à queue de cheval^^.

Retour dans la boue avec une cote terrible où il est simplement impossible de courir. Les speedcross font des merveilles sur ce genre de terrain. Aucune glissade malgré la boue et un gros pourcentage d’avaler en quelques centaines de mètres. Je surveille les autres concurrentes féminines mais plus aucune trace.

Arrivée sur le plateau, ENFIN un peu de plat on relance, le GPS ne descend jamais au-dessous de 12km/h. Après une longue descente parfaitement maitrisée se présente devant nous une cote peu pentue mais longue… longue… longue…^^.

Le chemin est splendide. On dirait une ancienne voie romaine. Le binôme du DAC est maintenant accompagné de 2 autres amis traileurs avec qui nous montons sur un train très régulier environ 11.5km/h.

Les sensations sont bonnes, les jambes sont là, juste un grand plaisir dans cette magnifique foret. S’en suit un passage beaucoup plus technique sur un surplomb rocheux avec de jolis trous de 30-40m sur notre gauche… attention ça glisse. J’essaie de dire à Alice de faire attention car elle ne lève pas le pied (elle m’avouera à l’arrivée ne pas avoir vu les falaises et les trous au bord desquelles nous avons couru en dévers).

Une petite poussette pour lui permettre de monter une bonne marche trop haute pour ses petites jambes ^^(pas simple parfois le trail quand on fait 1m60) et hop on continue… On relance !
Nous passons le ravito sans s’arrêter car nous avons tout ce qu’il faut dans le sac. Et voici la plus grande descente qui se profile devant nous. Alice est toujours aussi facile moi… un peu moins mais je m’accroche.

Dans la descente un seul mot… à bloc… le gps indique entre 4.10min/km et 4.30min/km. Je tente à nouveau ma chance « Alice, tu as fait le trou, la 2eme fille est loin tu devrais gérer car il reste une cote avant l’arrivée… » Autrement dit « tu ne veux pas ralentir un peu tu veux que je finisse tout bleu??? lol ».

La réponse est non. On à tous les deux des supers jambes on s’éclate dans ce chemin qui descend, on a la banane, les signaleurs nous encourage plus que 8 km. C’est grisant mais la dernière cote se profile bientôt. Pas très pentue mais longue et après 20 bornes eh ben ça calme. Mes cuisses brulent, je sens l’énergie me quitter d’un coup… Plus de lumière… et là je sais que la fin va être dure.

Nous rattrapons les coureurs du 13km. Je ne veux pas ralentir ma coéquipière et lui dit « si j’explose ne m’attends pas… » Et je la vois s’éloigner petit à petit 2m, 3m, 5m, 10m. Je ne suis pas en mesure d’accélérer. Alors je réduis sagement la vitesse. A ma grande surprise l’écart se stabilise autour de 30m (elle m’avouera à l’arrivée qu’elle aussi en avait plein les cannes dans la montée…), alors je m’accroche mais le cœur, les jambes et le reste ont bien du mal à suivre. Ouf on arrive sur le plateau et je relance pour tenter de remonter et reconstituer notre équipe de choc. J’y parviens avec difficulté au bout d’800m de chasse.

Dernière tentative « Je suis plus que limite Alice… ». Elle toujours aussi aérienne galope et à la faveur d’un nouveau faux plat relance et là pour moi c’est le deuxième effet Kiss Cool… Pan dans tes dents… Elle repart alors que moi j’ai le cœur encore au fond de la gorge qui n’est pas redescendu et mes cuissots ressemble à des poteaux EDF.

Il reste 2 km. Dans ma tête c’est la déception, comme lors de nos dernières sorties, je craque et je me vois mourir à l’arrivée à une petite minute de ma complice.

Nous arrivons sur un faux plat descendant boueux à souhait. On enfonce à chaque pas et les cuisses brulent de plus en plus. L’écart entre nous se creuse de plus en plus. J’ai maintenant plus de 150m de retard mais je la vois toujours. Nous rattrapons des concurrents en perdition qui sont eux aussi dans le dur…

Mes cuisses semble revenir un peu et j’arrive enfin à relancer, ma puissance semble être un avantage et je vois l’écart se stabiliser, j’arrive à doubler. Plus que 1km. Nous arrivons au-dessus de la dernière descente. Alice est hors de ma vue à la faveur du parcours qui tourne beaucoup.

Les jambes ne sont plus là mais je décide d’attaquer la descente à fond pour ne pas avoir de regrets. Là encore je n’ai que très peu d’expérience en trail, le style ne doit pas être beau à voir, ça tape, ça glisse, ça roule mais ça descend fort en 3.40/km (d’après ma montre à l’arrivée… pas eu le temps de regarder en course…^^).

Plusieurs concurrents s’écartent sur le côté pour laisser le sanglier que je suis débouler dans le sentier. Voilà des gens avec un bon état d’esprit ! Je les remercie de la main et j’arrive sur une portion bitumée. A ma grande surprise je constate qu’Alice est juste devant à 50m. J’accélère sur ce morceau de route alors qu’on annonce 400m, je suis quasi en apnée à 18km/h et 200m avant l’arrivée je parviens à rejoindre mon équipière.

Une petite tape dans le dos, un regard échangé et un grand sourire qui veulent tout dire. Je pense que mon retour l’a surprise autnat que moi ^^ On l’a fait ! Alice va gagner et cerise sur le Mc Do on finit pour la première fois un trail ensemble.

Pour moi ça vaut bien plus qu’une  victoire. On dévale les 100 derniers mètres à bloc comme à l’entrainement. Et ouf… c’est terminé !  Elle passe la ligne en première position, 11 minute devant la deuxième féminine et moi dans sa foulée, je laisse échapper une petite larme car franchement j’en aurai bavé mais quel pied... Je suis juste heureux. Comme quoi il en faut peu…

Un parcours d’enfer, des bénévoles supers sympas, des encouragements en veux-tu en voilà et pour finir une superbe émotion pour deux copains d’entrainements qui en bavent ensemble 3 fois par semaine.

Vous l’aurez remarqué je ne parle ni de temps ni de place au classement car l’essentiel n’est pas là pour moi. Ce ne sont que des nombres qui ne signifient pas grand-chose comparé au plaisir que j’ai ressenti sur cette course.

Début janvier, je rendais 4 min sur l’Oxyrace à Alice sur 17km et plus de 8 min aux meilleurs de notre groupe de copain. A la Pérouse sur 26km j’ai réussi à tenir le rythme de la « la gazelle du DAC » et finir seulement 4 min derrière les costauds du club… Je n’aurais jamais imaginé cela il y a 2 mois lorsque je crachais mes poumons le long du canal de DOLE dans le brouillard.

De cette course je retiens 3 choses : Premier enseignement «on a un super entraineur qui arrive même à faire courir les sangliers… ^^ », deuxième enseignement je sais qu’il y aura des jours sans mais je me suis prouvé que j’étais capable de m’en sortir honorablement sur un trail et troisième enseignement que la course à pied m’a permis de connaitre des gens géniaux qui sont devenus des amis et d’en croiser d’autres sur les courses avec qui je partage juste le plaisir de courir tout simplement…

Vous vous en doutez je serai là l’année prochaine. Comme d’habitude sans objectif de temps mais en espérant vivre d’aussi beaux moments que cette année 2015. La suite dans quelques jours à Paris...

1 commentaire

Commentaire de Benman posté le 13-03-2015 à 23:33:00

Bravo. La Perouse fut aussi mon 1er vrai trail il y a quelques temps. C'est devenu mon terrain de chasse favori. Fais gaffe, dans le coin, le sanglier est traqué plus pour sa viande que sa foulée souple certains samedi matins.
Merci pour ce récit très vivant et bravo pour la place de 1ère féminine, ce qui est une sacré perf, même pour un mâle pas laie.

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