Récit de la course : Saintélyon 2013, par Farfaline

L'auteur : Farfaline

La course : Saintélyon

Date : 8/12/2013

Lieu : St étienne (Loire)

Affichage : 4040 vues

Distance : 76km

Objectif : Pas d'objectif

4 commentaires

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Saintélyon 2013, le commencement d’une traileuse

  Une grande 1ere pour moi qui n'avait jamais couru si long, ni de nuit, ni en hiver.

Au final c'est super bien passé, un peu dur la quantité de bitume à la fin (je préfère le trail technique)... mais c'est surtout à cause des pieds qui ont chauffé! L'entrainement a bien payé puisque les jambes ont tenu tout le long. On s'était inscrits à 2 avec mon chéri. Je l'ai perdu de vue par moment mais j'ai tenu à l'attendre. On a fini à 2 main dans la main, les larmes aux yeux mais les yeux qui pétillent, très contents de nous : 467 et 468 au scratch, 455e H  (234 SeH), 13e femme (8e SeF)... Bref top de finir une telle course comme ça!

J'y reviendrais quand même… pour viser pourquoi pas le top 5!

 

Encore une 1ère bien réussie… Un weekend mémorable, très riche en émotions, puissant ! Je retiens un mot : la Saintélyon c’est l’exigeante déjà utilisé par Maud G ! C’est juste ça : il faut être bon en trail, adaptable selon le terrain mais capable d'enquiller aussi le bitume, le froid, la longueur en kms et la nuit sans sommeil ... tout ça c’est beaucoup à la fois.

Mon 1er marathon réalisé au printemps (Annecy 3h29), un été très mouvementé, quelques courses histoire de profiter des Alpes dès que l’occasion se présentait et de beaux résultats à chaque fois cette saison, plutôt incertains sur la longueur on a enchainé avec une préparation 5 séances/semaines sur 8 semaines à l’automne, nous voilà fin prêts pour la fameuse Saintélyon.

On est un petit groupe de 8 à partir pour le solo, très expérimenté ou pas du tout, avec des objectifs bien différents qui vont de la perf, à « faire une bonne course », découvrir cet évènement, se tester pour la saison 2014 ou simplement rallier Lyon sans bobos. On arrive à Gerlan vendredi soir, venant de Toulouse/Grenoble/montpellier, la belle petite troupe de surexcités pile poil à l’h pour récupérer les dossards il est 19h30… On est dans les temps, le sera-t-on demain ? Le stress monte en entrant dans la salle, l’organisation super calée et surtout l’arche d’arrivée imposante… En bons guerriers, on espère tous passer dessous mais surtout on aspire à passer l’arche en bon état et ce dans un peu moins de 36h. Ce we c’est la fête des lumières de Lyon, alors on part s’acclimater à la température locale pour un tour du centre ville. C’est joli toutes ces couleurs, cela sent bon le vin chaud, les churros, les crêpes, … bref on admire et on salive bien mais on profitera plus tard car ce n’est plus l’heure de se laisser aller à trop de gourmandise incertaine pour l’intestin avant course ! Le top c’est le passage au shop Odlo pour se réchauffer un coup car ouvert en nocturne. Là on n’a qu’une seule idée en tête : enfiler la tenue de combat et s’aligner enfin … mais patience et d’ailleurs cela sera pour moi la seule prise de tête du we : la tenue ! On se rentre au camp de base, chez moi, la stéphanoise de naissance, sur les hauteurs de Sorbiers Grand Quartier. Une bonne soirée de passée sans trop cogiter, il est assez tôt et on est contents. Samedi matin, après un gros petit dèj (pain grillé, panetone, pain d’épices…), on part ballader à pied, car le tracé de la course passe tout près au dessus de la maison, objectif : l’étude du terrain ! C’est plutôt bon, il faudra viser ou poser les appuis parfois mais ça va être top la neige à fondu, nul besoin de yacktrak ou quoi ! Du coup après une courte pause allongée digérant les antépénultièmes pâtes, j’arrive au pire moment du week end … j’ai eu l’impression de perdre tous mes moyens, devant mon sac, à devoir choisir comment me couvrir. C’est la clef de cette course : être bien sur la durée, mais pas trop chaud, pas trop froid, et pas trop humide ! Sauf que je n’ai jamais couru plus de 5h, de jour et jamais l’hiver Oo… Les entrainements de nuit à Toulouse c’est court et jamais très froid : c’est le Sud ! Alors au bout d’une heure à tourner, le sac facilement fait avec le ravito perso, la couv’, le gobelet, une polaire et une paire de chaussette au cas où, je choisi le mode d’hydratation au final ce sera la solution double gourde dans les poches de cotés (plus rapide à remplir et je peux améliorer l’eau dans le 2e bidon). J’étale mes choix de fringues possibles… Là … black-out : j’ai bien du rester scotchée pendant 1/2h avant de sortir de la chambre tellement je n’arrivais pas à réfléchir, cerveau éteint, bloquée, coma les yeux ouverts ! La peur d’avoir froid ou trop chaud, de zapper le détail qui tue, de faire le mauvais choix… Comme tous les coureurs, les dernières sorties on servi de tests matos mais aucune solution me semble judicieuse, je cogite, me remémorre, compare, mais rien à faire … Je suis dépitée, autour de moi tout le monde s’affaire mais c’est compliqué, c’est un choix perso, alors après quelques questions aux copains on se dit que franchement on est bien cons : on à l’air malins avec nos 3 différents tee-shirt, 2 vestes et 3 pantalons, si on n’avait pas autant de fringues on n’hésiterait pas ! Bref échec total. Le junggle speed avec les amis me réveilla de ma torpeur en transférant le stress... Enfin, après le dernier repas de pâtes avalé j’ai pu décider : cuissard skin + booster recouverts du collant moyen épais, merinos manche longues + coupe vent léger de l’université de Toulouse, gants épais, bonnet fin, double buff + 1 dans le sac! Je pars sans chrono, sauf l’heure du portable chargé à bloc mais pas de GPS. 1ère victoire : je suis prête !

Le départ :

On décolle en mini-bus à 21h, après vérification des sacs. Arrivés sur place, une fois qu’on s’est bien fait b**** par les sens interdits,… c’est la folie, j’hallucine par le monde qu’il y a déjà, comment les autres qui vont arriver peuvent rentrer ? Non parce que dans ma tête on fait parti du 1er ¼ des malades à débarquer à 21h30… sauf qu’en fait non... On se pose avec Patrice un vrai coureur d’ultra, qui nous a bien conseillé ! J’ai pas du tout l’impression que je vais courir bientôt, je fais que bailler, j’ai soif, les yeux qui se ferment… C’est que je me sens presque  vieille! Je suis naze, j’accumule une énorme dette de sommeil en ce moment avec la thèse! Je me pose comme un sac par terre au mileu du bordel avec le buff sur les yeux pour rentrer dans ma bulle, pas d’écouteurs. Je prends le temps d’envoyer le lien du suivi live, et découvre quelques messages d’encouragements. C’est cool de savoir que certains pensent à nous, du fond d’un bar, du canapé ou de dessous la couette … Qu’on sera tellement contents de retrouver après … les pensées se tournent vers des lieux plus accueillants et chaleureux tandis que l’heure tourne. On veut être devant, alors on se bouge, on met les combis de cosmonaute et on sors à 11h. La ligne de départ est déserte : 3 acharnés se tiennent chaud avec une couverture de survie, 4 clampins trottinent… Mais qu’est-ce qu’on fout là ! On attend au milieu d’une route, on se caille, c’est long, j’envisage bien de faire à la rigeur une petite sortie course à pied de nuit à cet instant exact mais pas en ville, encore moins sur du bitume et je n’imagine pas du tout pouvoir être encore dehors à crapahuter au lever du soleil dans 9h ! On est vraiment crétins de se lancer ces défis… ça c’est mon humeur/stress pré-course : toujours à me demander ce que je fais là, à me dire que c’est pas la forme, que j’ai envie de dormir, que ce sera bien une fois fait mais avec l’impression de pas être entièrement là et pourtant au départ… et en général toujours bien contente à l’arrivée ! Enfin, ils envoient la musique, des montgolfières en papier sont lancées pendant qu’on saute sur place, en rythme comme à un concert de punk/rock et que la foule sort du hall 8, se tasse… Arrive l’heure fatidique d’enlever la belle combinaison de peintre qui nous gardait quelques degrés de plus au chaud, on se serre la pince en guise d’encouragement et en se souhaitant bonne course… Avec Rom et Genest on se redit qu’on ne se lâche pas et qu’on part doucement. Là il n’y a plus le choix ! Le cœur est tout excité, devant nous les élites arrivent, fins prêts à en découdre sur ce nouveau parcours annoncé costaud avec plus de dénivelé et de kms que les éditions précédentes!

Speech, …, hommage, silence, et top départ !

Franchement au démarrage, je suis toute gelée, ca va pas du tout, le goudron je hais ça, et je me demande ce que je fais là pendant les sept premiers kms… un bon nombre de coureurs nous doublent, j’ai l’impression qu’on on se traine, Roman me rappelle souvent à l’ordre pour ralentir sur les 3 premiers kms puis ça déroule. On perd Genest qui freine pour assurer la suite. Le départ avec les relais cela grise le moral, on part sûrement un peu vite, même avec le frein à main.

Ambiance, le pèlerinage des lucioles :

On arrive à Sorbiers, je me suis bien réchauffée et la montée passe toute seule à petite foulées, on remonte la foule, Roman proteste encore qu’on va trop vite, mais c’est plus fort que moi car j’ai enfin chaud et j’ai oublié l’envie de couette, remplacée par l’envie de courir, de bien faire… On passe le panneau « reste 65kms » repéré le matin même, on est juste au dessus de chez moi … dur d’imaginer qu’il en reste autant pour rallier Lyon, mais c’est cool d’être vite arrivés là, la course à commencé en quittant le bitume, la file de luciole s’étire... Arrivés sur les crêtes au dessus de l’Onzon, on se fait surprendre par le verglas. Tout le monde passe à gauche ou a droite et cela ralentit beaucoup, nous sans réfléchir on fonce au milieu et blam… et d’une ! Ce ne sera pas la dernière, pas de bobo, on repart comme des calus dans cette portion descendante, j’ai arrêté de compter à la 4e gamelle … J’ai adoré la neige sauf les trous piégeant le pied, nous déséquilibrant, et forçant à garder de la lucidité à chaque instant. C’était un peu fatiguant mais à la fois très stimulant toutes cette portion bien trail et rendue un peu technique par la neige et la glace. Cela râle parmi les coureurs, on essaie de se prévenir mais c’est pas évident, on est dans une allure relativement soutenue et prudents à la fois, assez collés les uns aux autres, c’est une ambiance à part. C’est très silencieux, limite pèlerinage des lucioles, on ne veut pas souiller la nuit avec du bla bla, on admire les collines silencieuses et la vague de lumière qui les traversent. Seulement parfois, lors de zipettes et gamelles en tout genre, le soutient des camarades d’aventure est bien là : c’est la main qui t’agrippe pour te relever ou la petite parole demandant si ça va … Ambiance monacale de sportifs venus pour l’effort, pour l’histoire, pour la performance ou simplement se dépasser, on a tous une bonne raison d’être là... C’est notre pèlerinage…

L’exigeante :

Les kms défilent… St Christo arrive vite 1h30, c’est déjà blindé de monde on zappe d’entrée le ravito car on n’a besoin de rien, une barre sortie de la poche, un blocks et zou. Ensuite sur le haut de Moreau c’est le froid qui prend toute la place dans nos tête, ça fouette le visage, on focalise dessus, on imagine qu’après le virage, derrière ce sera peut être moins exposé au vent, on va bien passer dans un chemin bordé d’arbres salvateurs… Rom ne va pas super bien alors qu’on avait un bon rythme, il me signale que le froid l’a mordu....pas cool ! Pause technique et on repart mais c’est douloureux dans le mollet droit. Pas déjà ! Je suis blasée car c’est à gauche que cela tirait dernièrement… bon ça va passer, on trotte, Rom galère toujours … 2e pause technique… super tendu de se remettre à courir ! Il va falloir trouver une solution : ne pas stopper complètement et au moins marcher, se détendre, changer la posture, parce que sinon ça va cramper/contracturer/crisper ce foutu mollet, j’en sais rien mais c’est pas top. Les crêtes ne sont pas facile, on est tendus, le petit vent glace le peu de peau qui dépasse, mais on apprécie le calme des collines, les conditions de terrain sont correcte pour les traileurs avertis, on attend de voir le prochain panneau avec impatience, j’ai hâte de voir comment on sera dans 20kms de plus. Il va falloir détendre la bête, c’est l’ambiance solennelle qui s’en chargera associée aux kms qui défilent et l’allure qui se stabilise autant que la file de luciole s’allonge avec les collines et s’affine en une seule ligne.

Enfin on arrive à Ste Catherine à 3h06, on est bon dans les temps pour 9h. Là vite direction la soupe. Je conseille au passage le mix soupe vermicelle tomate/cookie terrible! Rom à regardé l’écran au passage : on est dans les 600 premiers ! C’est pas mal du tout pour selon qu’on a ramé au départ et qu’on a ralenti sur la deuxième section ! Roman se refait après son coup de froid, Petzl est là pour les piles, on change avec les nôtres emportées dans le sac, tant qu’a les porter, et on décampe au plus vite car la tente se rempli à vue d’œil et il reste un bon bout encore.

On repart bien, mais pas trop vite, se méfiant de la suite. De la montée parfaite puis de la bonne descente dans le bois des Marches, miam la bouillasse, trop cool, on ne s’ennuie pas, on double beaucoup de coureurs très prudents ou de routards qui n’apprécient pas ce terrain (mon favori), je me revois en Chartreuse à tabaser dans la boue, on s’amuse bien cette nuit aussi. Ensuite la remontée par le bois d’Arfeuille est abrupte mais avec les bons cuissots qu’on s’est fait cela passe tout seul, je temporise un peu pour que Rom suive, c’est pas la grande forme mais ça va. En haut on retrouve le bitume, on ralenti pour rester tous les 2 sur le faux plat on prend plus ou moins cher, l’un a ralentir, l’autre à rester dedans, mais on reste ensemble. Enfin le 3e ravito, 40kms faits, St Genou 4h39, accueillant mais pas très grand! Je laisse trainer mon regard sur l’écran et là 1ère surprise : je suis 9e SeF, la moitié est passée, il reste soi-disant le plus facile… C’est plutôt sympa comme bonne nouvelle du jour. 2ème surprise plutôt mauvaise c’est que je demande de la soupe et qu’il n’y en a pas! Du coup je bougonne un coup, prend un bout de banane et c’est reparti, Rom juste derrière qui me dit que c’est énorme si je fais top 10.

Le combat :

C’est super d’avoir vu ce résultat intermédiaire, cela regonfle à bloc pour la suite, d’autant plus que je n’ai plus de nouvelle du mollet et zéro signes de fatigue des guibolles, tout va pour le mieux… sauf que j’attends Rom quelques minutes plus tard, un point de côté le paralyse… On se remet à trotter ensemble et il reste derrière moi … Un doute me tarraude soudain, je me retourne et ce n’est pas lui…oups j’ai perdu Roman… je marche encore pour temporiser, espérant le voir arriver, on quitte la route pour un chemin qui descend, je me retourne, je l’appelle, mais rien, j’ai l’impression que le temps qui passe est une éternité, il est où ? Un gars me parle en passant à mon niveau mais je ne comprends rien à ce qu’il dit… au ton employé ça n’avait pas l’air gentil. Mes pensées s’affolent, Rom n’arrive pas, qu’est ce que je fais,… une fois l’information montée au cerveau, les neurones rebranchées et le tout remis dans le contexte je tilt au bout de deux minutes de cogitation ce qu’il me voulait celui là : en me retournant pour voir Rom arriver, j’ébloui les autres coureurs (pourtant je n’ai pas une grosse lampe : la Myo XP et pas à fond)… Dans la nuit et tous affublés de la même tenue, difficile de distinguer qui arrive, je m’inquiète, je continue la descente et me dis qu’il va me rejoindre à la prochaine montée, je ne dois pas m’arrêter pour éviter de ressentir le froid donc je descends en trottinant. Ca y est on remonte, je laisse passer du monde, j’avance au ralenti sur la bande d’arrêt d’urgence, je sors une barre à manger pour passer le temps en marchant. Je suis accablée, j’aurais du faire attention, on n’est pas restés ensemble tout le long pour se perdre là ! Et puis merde, c’est moche mais je sors le portable et l’appelle ! Miracle il décroche : le point de coté est revenu, c’est atroce pour courir, il est en bas de la montée. Ok je continue à monter on s’attend en haut ! Je raccroche rassurée un instant par cette conversation de 15 secondes…#  Mais c’est où le haut ? J’ai pas du tout enregistré le profil … Je poursuis aussi lentement que le froid le permet et j’espère qu’il me rejoindra vite.. Enfin réunis, je comprends que cela va être long la fin car j’ai bien mal aux pieds et Rom me dit que je suis une bourrique d’avoir attendu et de pas avoir filé devant. Ça, c’est de famille, je m’en fous on finira ensemble même si je ne peux pas bien l’aider physiquement au moins moralement je vais faire de mon mieux et je ne le laisse pas tout seul (enfin au milieu de la marée de lucioles…c’est dur d’être seul). Bientôt on verra le panneau 20km restants, j’espère que cela passera vite, ça descend principalement, mais au final ce sera les kms les plus difficiles. Au ravito de Soucieu 6h09, le gymnase est immense, on fait une recharge très rapide encore de peur d’avoir du mal à repartir. Je demande au gars combien est le dossard n°42 Maria : dans les 150 et 6e femme ! C’est que ça tabaze devant ! Je ne sais pas pour nous mais si on ne perd pas trop le rythme on fera un bon temps sans se faire mal, c’est ce qui compte, je n’ai pas regardé combien on est placé, je ne scrute pas non plus les dossards des filles que je vois pour checker leur couleur, l’objectif n’est pas là !

En amoureux :

La fin est interminable entre Soucieu et Beaunant, on rame ! Le lever de soleil avec les Alpes et le Mont Blanc au fond c’est classe mais la fatigue morale nous atteint sans prévenir. C’est très dur pour Rom, qui n’arrive pas à courir à cause d’un mauvais point de côté, des mauvais souvenirs de fins de courses après 45kms très difficiles le rattrape, pourtant on court encore bien mais on rame, on se fait doubler, mes pieds sont mortifiés j’ai super mal dessous avant les orteils, il y a eu un craquement, j’ai jamais ressenti ça, j’ai peur du diagnostic au retrait des chaussures : crevasses ? ampoules ? Les jambes ça peut tourner encore bien, zéro bobo, j’ai de la marge... J’essaie d’encourager bien maladroitement Rom à tenir pour que l’on reste ensemble, sans trop se faire remonter, mais je m’y prends comme un manche… Il râle et je le comprend parce qu’il sent que j’en ai encore sous la semelle, c’est sûr ça roule pas mal, je trépigne d’impatience, c’est pas l’envie qui manque de finir au plus vite. La fraîcheur du lever du jour s’abat sur nous, c’est silencieux, insidieux, cela use nos corps, engourdis nos pensées, le temps semble s’arrêter tandis que nos pas s’enchainent, inlassablement, le rythme est calé mais c’est long, on avance inexorablement vers la fin du pèlerinage... Enfin le panneau 15kms, le lever de soleil c’est beau mais cela n’allège pas les pieds douloureux. On sait qu’à Beaunant ce sera gagné, le ravito se fait attendre, les spectateurs matinaux sont peu enthousiastes parfois, sûrement à la vue de nos têtes de déterrés, ou le froid qui les transis comme figés à voir les lucioles s’éteindre au fur et a mesure que le jour se lève... C’est long les zigzags dans les lotissements, c’est où ce p***** de ravito ?! … Les gens nous encouragent : « Bravo c’est la fin ! » mais elle est super longue la fin et après le ravito il en restera encore combien ?… Je suis bien énervée d’avoir tant mal aux pieds alors que le reste ça va, on serre les dents tous les 2 et on tient, Rom scrute l’h, on va réussir à passer sous les 9h. Enfin au détour d’un virage un mirage ? Non la tente. Une bonne soupette/tuc rapidos bon pour le moral et on renquille : il y a des filles autour pas loin devant et derrière … Mon objectif est toujours le même : ne rien lâcher mais bon si on peut y rajouter une bonne place… on ne va pas s’en priver ! Je ne veux surtout pas lâcher mon chéri et bien sûr si on peut remonter un peu le finish sera d’autant plus savoureux… C’est toujours dur de doser pour finir de se vider, tout en éclipsant les bobos et sans déclencher la bombe à retardement qui nous ferait finir trop mal. Alors avec tout ça, on accélère mais je ne le lâche pas ! On sent la fin et c’est à double sens : je le gave, ça l’énerve mais il répond presque gentiment, la motivation revient en sentant la fin se rapprocher, on l’entend dans sa voix, je décèle parfois un sourire. On est complémentaires sur beaucoup de choses, mais sur la fin de course on est siamois : quand on sent que la fin est proche on aime rentrer vite à la bergerie. La bonne montée de la fin avec son joli aqueduc antique est passée vraiment crème pour les jambes, à peine une grimace de mollet, mais ça pique les pieds sévèrement. On palpe la fatigue de tous les coureurs qui avancent à un petit rythme, luttant pour finir en courant, peut être partis trop vite, on se dit qu’on est bien à comparé, qu’on n’a pas à se plaindre, juste penser à sa foulée, placer les pieds, limiter les frottements… Ne pas se faire contaminer! On double des dossards colorés, c’est étonnant, mais d’autres relais nous doublent aussi, c’est bizarre cet effet relayeurs, aucune idée de la place qu’on peut avoir maintenant car on a zappé les écrans aux ravitos, la recharge des batteries primait sur tout le reste !

Apothéose finale :

Long faux plat, plat, on arrive sur les fameuses marches, gloups ! Comment les prendre ?! Doucement … aie mal…, bon une par une c’est trop lent ça fait mal quand même… Rom chaud comme la braise y va franco… allons-y gaiement, tel un joyeux luron tout frais il file devant, je me lance à sa poursuite deux par deux … Ca passe, c’est rapide, ça fait mal mais de toute façon il faut descendre, ça va bien mais prudence je me tiens vaguement à la rambarde, enfin c’est plus pour la forme que pour l’efficace sécurité en descendant comme ça … enfin on voit la berge! Mais on va où là c’est de l’autre coté le pont juste là le stade, le prochain pont est super loin dans cette direction, je suis verte, dépitée, j’ai hâte que cela se finisse, mal et ras le bol du plat ! Je regarde une seconde fois la file de coureur s’éloigner et là encore le cerveau mettant trente secondes à reconnecter, je comprends que je suis à l’ouest : on ne remonte pas au prochain pont, on a juste le droit à un zig-zag de plus pour passer sous la route, sous ce pont là, et quelques marches à remonter… C’est pas le dénivelé qu’on va plaindre, on trace et évidement …Bam ! … le tibia sur la dernière marche : cela m’apprendra à vouloir aller vite, on a doublé 7-8 personnes dans ces quelques marches, genre on est frais comme des gardons !

Rom est au taquet, il prend de l’avance, c’est lui qui me sème maintenant, plus rien ne l’arrête ?! Je le rattrape quand même en forçant et constate qu’avec l’accélération ça va vite arriver, on sait que le stade est tout proche, l’euphorie de la fin de course monte…

Je me reprends, respire calmement, surtout ne pas s’emballer sinon je perds mon souffle… Raaah contrôler les émotions, vider la tête… On ne pense plus à rien, juste allonger la foulée, relâcher la pression…

Le panneau 2kms… Rom regarde l’heure et me dit : « il nous reste 7min, allez on passe sous les 8h45 », je rétorque « à l’aise, ça va le faire !» … « 500m » Rom le crie tout heureux ! On s’attrape par la main, la mission du jour : c’est pas facile de courir en se tenant la main en fait, sprint final, à droite du poteau, on entre, la belle arche biiiiiiiip c’est fini … cela serre la gorge, bisou sous l’arche, heureux !

 

On sort de l’ère d’arrivée, je me retourne 8h43 : pas mal quand même pour une 1ère ! Quelle banane on tire tous les deux, on a les yeux qui pétillent, tout humides et le souffle court, on ne sait pas où aller, on se pose ?! Se relever sera tendu après… bah tant pis, on savoure l’arrivée, la chimie s’en donne à cœur joie dans nos petits cerveaux, c’est pour ces moments là qu’on court, quand on n’arrive même plus à identifier les émotions qui nous inondent : ivresse, fierté, joie, euphorie, bonheur, extase…YES ! Assis par terre quelques minutes, on appelle vite la maman présente pour nous récupérer, « Quoi vous êtes arrivés ?! -Bah vous ne nous avez pas vus ?! » Eh non raté, on n’a oublié de faire signe par téléphone en arrivant … les boulets : à savourer les derniers kms, cette fin tant attendue, on oublie de la partager! Un peu raide pour se lever et on rejoint la famille et les toulousains. Le thé attrapé au passage nous ramène un peu à la réalité, ça y est on a fini, et bel et surtout bien réussi : derrière nous on entend le commentaire : «  … et il y en a une elle s’arrêtait tout le temps, elle appelait et puis elle attendait son copain et repartait … impressionnante, … ». Je me retourne et réponds : « Ben je crois que c’était moi! Il me supporte bien comme chérie alors je devais bien l’attendre ! »…Rom avec un grand sourire « J’en ai de la chance, hein ! ». # Il en fait des jaloux qui voudraient une chérie qui court comme ça … ou pas d’ailleurs mais les mentalités changent et les mecs comprennent qu’on n’en veut pas à leur virilité en les doublant! Mais c’est sûr qu’avec ma discrétion légendaire associée à mon inquiétude et les difficultés à se voir dans la nuit, j’appelais fort!  La troupe est presque complète : il manque le petit frère, et Alice qui prévoyaient de courir tranquille. Les autres sont déjà douchés, les perfs sont au RV comme prévu.

Conclusion :

Au final résultat super satisfaisant sachant que j’en ai gardé sous le pied ( …de l’energie en plus des grosses ampoules !). Pour un prochain trail long c’est sûr je filerai et je doserai pour terminer un peu plus cuite, enfin j’espère surtout que mon homme aura retrouvé la patate et que ce sera à lui de me tirer devant. A l’étude des temps de passages, on est remonté au classement général à chaque CP alors qu’on a clairement ralenti, sauf que 4 filles me passent devant entre Sainte Catherine et Beaunant… Sans doute que tout le monde part un peu vite avec la vague des relais qui grise et fausse le départ. Une vitesse moyenne vachement lente entre St Genoux et Beaunant : il va falloir aller plus vite sur le plat l’an prochain !

Mes points clefs et notes:

- la tenue pile-poil, juste à peine froid ! Une solution pour se reconnaitre de loin ?

- l’alimentation : nickel je me suis bien gérée, pas assez bu mais avec ce froid le bidou aimait pas, il manquait de la soupe à tous les ravitos (on en a eu qu’a St Catherine et au dernier !), vive le soupe/cookie, les tucs, les bananes et les pim’s

-le rythme : pas facile de démarrer au frein à main en mode éco pour la suite, mais je saurais faire !

-Seul point négatif à résoudre : mettre de la crème anti frottements, changer de chaussettes, de semelles (ou de chaussures, mais j’étais ravie de l’adhérence = Salomon XT Hornet), parce que mes pieds n’ont pas aimé du tout et que c’est trop frustrant de courir en ayant mal aux pieds et non aux jambes ! Cela me rappelle l’avoir vécu plusieurs fois en escalade : avoir trop mal à la peau des mains mais pas mal aux bras… Méga frustrant !

 

L'orga était presque au top, mise à part l’aberration d'aller chercher à Lyon le dossard, les ravitos blindés et pas homogènes (la soupe pas partout m’est resté dans le ventre) mais je ne veux pas juger vu qu’on ne s’y est pas attardés ! Et pour la 60e... on pouvait s’attendre à un peu plus de festivité ! Enfin j’ai détesté devoir retraverser le froid pour aller chercher le sac consigne pour se doucher !

Bravo aux 5800 finishers de cette mémorable 60e édition et chapeau aux 600 bénévoles.

Merci et félicitation aux toulousains et assimilés (Dadou, Aurélien, Brunilde, Alice, Genest).

Un grand merci à Patrice pour tous ces calculs, ces infos fraiches, les combis, … top classe !

Merci à nos 2 mamans qui ont trop bien géré l’avant et l’après!

Une ovation et encore merci Maria : une mine de fraîcheur, de réflexions, de bons plans entrainement, nutrition, matos, … et un honneur de l’avoir comme coach et amie.

 

Et le meilleur en dernier : merci mon amour de m’avoir fait découvrir la montagne, de m’avoir fait progressé et me dépasser en me supportant dans tous les sens du terme, et d’être toujours là avec moi après toutes les épreuves qu’on a pu traverser.

 

# Petite anecdote bien rigolote : mon nouveau kiné, chez qui je prends un abonnement pour la saison 2014, me dit que mon chéri a trop de la chance d’avoir une nana qui cours… du coup, je lui raconte les petites phrases qu’on entend parfois autour de nous comme : « Roooh elle t’a mis 20min ! », « tu es arrivé en haut 7 min après naaan ahahah !», course suivante «  je l’ai attendue 4 min à l’arrivée, la 1ère fille était juste derrière moi, c’était pas loin pour la 1ère marche, 3 petites minutes », « j’ai cru que j’allais avoir froid alors je suis remontée à ta rencontre, je m’inquiétait et c’est toi qui as les clefs ! » etc… alors qu’on s’en balance pas mal et que ce n’est pas un concours entre nous mais on rigole bien à se tirer la bourre! J’en fais part à mon homme, ma moitié, mon héros, mon ange, mon chéri, etc…, qui peut être content de faire des jaloux parce que de toute façon ses fesses sont taillées pour mes mains et son épaule pour ma tête… et lui réponds du tac o tac : « C’est parce que sa nana ne l’a jamais appelé au milieu d’une STL pour lui dire bon tu fous quoi je t’attends en haut ! »… Oo ...Mais sinon je crois qu’il m’aime quand même !

 

Marianne Chopard-Lallier©

« Si on savait après quoi on court on arrêterai sûrement ! » Christophe Moulin

4 commentaires

Commentaire de Arclusaz posté le 26-12-2013 à 12:41:19

Bienvenue sur kikourou !!!!
bravo pour ta perf et ce super CR.

Pourtant, c'était pas bien parti : c'est vrai ça, écouter les conseils de Patrice pour la STL, c'était une très très mauvaise idée, il n'y connait rien du tout !!!!!!!

J'ai eu un peu de mal à comprendre si tu étais grenobloise, toulousaine ou stéphanoise : mais le "pour selon" que tu écris dans ton CR, m'a fait comprendre ! ce type d'expression on les garde pour la vie.

Commentaire de Farfaline posté le 26-12-2013 à 14:14:06

Merci ;-)
Alors oui effectivement les tics de language... par définition je suis stéphanoise, mais grenoblooise d'adoption depuis quelques années et actuellement toulousaine de façon temporaire ;-) c'est simple ?!...
Tu sais du quel de Pat je parles?! ...

Commentaire de Arclusaz posté le 26-12-2013 à 14:48:12

ben, oui, je connais Patrice ! presque tout le monde le connait ici, c'est notre coach (et comme il nous parle souvent de Maria, le rapprochement n'était pas dur à faire).

Bon, pour vérification....
http://www.kikourou.net/recits/recit-12335-marathon_de_lyon-2011-par-arclusaz.html

Commentaire de marat 3h00 ? posté le 06-01-2014 à 09:50:12

Salut Marianne, 2ème lecture de ton sympathique CR. Bravo pour ta perf !
et bonne année à vous 2!

Patrice

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