Récit de la course : Le Tchimbe Raid 2003, par langouste

L'auteur : langouste

La course : Le Tchimbe Raid

Date : 4/5/2003

Lieu : Fort de France (Martinique)

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Distance : 65km

Objectif : Pas d'objectif

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Le récit

Compte-Rendu du Tchimbe Raid 2003

Bonjour à tous !

Lecteur occasionnel de fr.rec.sport.courir, je suis tombé par hasard sur l'invitation au Tchimbé Raid postée par le Bourrin. Un coup d'oeil sur l'agenda: ... une semaine libre ! Fébrilement, je tapote sur le clavier pour chercher des infos sur cette course que je ne connais que de nom. 65 Km, 4000m de D+ et surtout... à la Martinique !!! Zboïng (c'est le bruit du câble neuronal surmoitesque qui lâche), il était déjà trop tard. Cinq minutes plus tard j'envoie ma candidature au Bourrin, le lendemain je me précipite chez Air France pour réserver le vol. Par respect pour les travailleurs de la grisaille qui me lisent peut-être, je n'évoquerai ni le cadre paradisiaque, ni lesactivités touristiques, plongeatoires et mangeatoires du séjour...
Passons tout de suite au vif du sujet: le parcours vu par la Langouste dossard n°118.

Départ

Je n'avais jamais essayé de gloutir du gatosport (en fait un clone, excellemment préparé par Le Bourrin, dont les talents culinaires m'ont bluffé): après 3 bouchées, sensation de satiété absolue. Je me force encore... effort de déglutition énorme... glourps, c'est passé. Il a eu très envie de ressortir par où il était entré pendant les 25 Km de virages entre le gîte et Fort-de-France ! Peut-être que la ventrée de pastas sauce bourrignaise de la veille y était aussi pour quelque chose.

Rassemblement dans le hall du Conseil Régional, un peu tendu. Tout le monde se place derrière la ligne de départ, le Bourrin et moi restons derrière pour éviter de partir sur un rythme trop rapide. 5...4...3...la moitié du peleton passe la ligne de départ !...2...1... PAN ! C'est parti.

Premier ravitaillement: Fort de France - Absalon (10 Km, 426 m de D+)

Départ tranquille dans les premières lueurs de l'aube, soulagement d'être enfin au pied du mur. Je fais pratiquement toute l'étape en compagnie du Bourrin, malgré quelques arrêts urinatoires ou photographiques. Nous faisons la distance en courant à petite allure et en marchant dans les côtes en prévision de la montée monstrueuse des Pitons du Carbet.. Je suis content, tout va bien et je me sens bien motivé. Ravitaillement, eau et quelques tronçons de bananes séchés.

Deuxième ravitaillement: Absalon - Morne Modeste (7.5 Km, 1163 m de D+)

Joli chemin en sous-bois, avec quelques bosses qui commencent à sélectionner. Je rattrape le Bourrin qui avait pris de l'avance au ravitaillement. "On est bien partis pour finir main dans la main!" se dit-on en dépassant quelques concurrents.... Une petite bosse plus longue que les précédentes. Le paysage devient très beau, puis vraiment magnifique, ça monte toujours dur mais je vais bien et suis toujours euphorique. Arrêts photos, on s'extasie sur la végétation. Brutalement, je sens que ça tire dans les mollets et que ça fait déjà un moment que la petite côte dure. Imbécile ! Je suis rentré comme un fou dans la plus grosse côte de la course, 600 m de D+ en 1 Km sur la carte ! On arrive déjà dans les nuages, je laisse le Bourrin passer devant et ralentis le rythme. Après une fin de montée difficile (je profite des queues de 4 ou 5 coureurs aux passages difficiles pour souffler un peu), j'atteins enfin le sommet du Piton Dumauzé. Enchaînement immédiat dans une petite descente boueuse glissante dans laquelle je me vautre deux fois, puis remontée assez raide sur le Piton Lacroix, je me sens mieux. La descente après le piton est aussi boueuse, je me gaufre encore quelques fois, pour finir la teinture marron du cuissard et du T-shirt. Crête sympathique dans les nuages puis descente très raide du morne Piquet au morne Modeste. Je préfère éviter les cordes sensées faciliter la descente, et descends "en insecte": 2 pieds, 2 mains et 2 fesses en appui ! La fin de la descente est pénible, l'accumulation des impacts fatigue les jambes. De plus, des gravillons se glissent dans les chaussures et commencent à attaquer les orteils... L'arrivée en bas est un soulagement, un coup d'eau + coca au ravito, et c'est reparti en marchant...

Troisième ravitaillement: Morne Modeste - Fonds Saint-Denis (4.8 Km, 166 m de D+)

...jusqu'à Fonds Saint-Denis, à part quelques tentatives de trottinement dans les descentes. Les petits cailloux me chatouillent les orteils mais je ne veux pas m'arrêter. Le dernier kilomètre avant le ravito se fait sur une route où le soleil cogne. Je me félicite d'avoir bricolé une saharienne sur la casquette officielle de la course (une taie d'oreiller, les ciseaux à ongles du Bourrin et quelques épingles à nourrice... Le Bourrin a fait mieux en poussant le perfectionnisme jusqu'à coudre soigneusement la sienne avec du fil assorti !). Je passe 10 minutes au ravito, bois plein de gobelets d'eau et de coca, fais le plein de mes deux bouteilles de 1.25 L avec un fond de coca + de l'eau et repars confiant.

Quatrième ravitaillement: Fonds Saint-Denis - Sainte-Cécile (4.9 Km, 224m de D+)

Etape courte mais chaude, je recours et me sens mieux. A Sainte-Cécile, je prends le temps d'enlever mes chaussure pour extraire les petits cailloux et je complète le plein d'eau.

Cinquième ravitaillement: Sainte-Cécile - Ajoupa-Bouillon (13.8km, 854 m de D+)

Pourtant, ça commençait bien: montée régulière sous les arbres. Mais après un certain temps, impossible de monter à une vitesse convenable: plus de jus, la fréquence cardiaque s'emballe... Dès que le terrain devient plat ou en descente, je reprends un rythme normal, marche rapide ou course sans aucun problème. Je me traîne comme un escargot dans toute la montée du morne Jacob qui n'en finit pas, avec des redescentes et des remontées. Dans une montée particulièrement rude, je désespère et dois m'arrêter cinq minutes, boire beaucoup et manger un bon morceau de pâte d'amandes pour pouvoir repartir. 30 mètres plus loin je vois le coin de la tente du poste de contrôle du sommet !!! J'y reste un petit moment et fais encore un petit calul de moyenne horaire: Impossible de rejoindre Ajoupa-Bouillon avant la limite horaire (18h) à cette vitesse !
Screugneugneu, ça ne se passera pas comme ça: c'est reparti et je décide de me donner à fond dans les descentes puisque je suis incapable de monter. La crête du Cournant se passe relativement bien, enfin la descente du Bois Jourdan dans laquelle je me régale, des arbres bien disposés permettent de slalomer en courant dans un descente rapide. Arrivé en bas, les bénévoles du ravitailement liquide m'indiquent qu'il ne reste que 6 Km avant Ajoupa. C'est bon, je suis dans les temps. Pour fêter ça, je marche comme un dératé dans la bananeraie qui me sépare de Saut Babin une jolie cascade traversée par un petit pont. Les 200 marches qui remontent de l'autre côté sont difficiles à avaler, mais je me motive bien en pensant que c'est la dernière difficulté avant Ajoupa. J'arrive bien remonté à 16h au ravitaillement, et qui vois-je ???? Alors, qui vois-je ??? Et oui, Le Bourrin en personne, arrivé 10 minutes plus tôt !!! Alors ça, ça a fini de me remonter le moral au top, on passe 10 minutes irréelles ensemble, photos, serrage de mains et il repart déjà. Je finis les 30 minutes que je me suis octroyé pour attaquer en bonne condition l'ascension de la Montagne Pelée, et c'est reparti à mon tour, avec dans le ventre une excellente soupe de légume et l'impatience d'arriver au bout.

Sixième ravitaillement: Ajoupa-Bouillon - 1er refuge de la Montagne Pelée (8.2 Km, 1072m de D+)

La reprise se fait bien, mais je commence à avoir mal aux pieds. Après le passage de la rivière Falaise, on emprunte une petite route bétonnée qui monte interminablement. Au bout de cette route commence un chemin de terre. Je décide de m'arrêter un peu pour boire et grignoter un peu de pâte d'amande. Parti regonflé, j'attaque avec hargne le premier virage... un ravitaillement m'y attend !!! Tant pis, je mange encore pendant que les organisateurs vérifient ma lampe frontale et fixent un cyalume jaune à mon sac. La montée reprend, longue mais relativement facile car les appuis sont bons, il est toujours possible de poser le pied à plat. Je maintiens un rythme inespéré grâce à un coureur meilleur que moi mais qui attend régulièrement sa femme, plus lente. Il me sert de locomotive et nous discutons un peu. A la tombée de la nuit, le cheminement semble irréel, les cyalumes balisent une montée céleste sans fin, jusqu'au dernier que j'atteins avec la nuit. Petite pause pour sortir la frontale, que je prends à la main pour mieux voir le relief du chemin sur le Plateau des Palmistes. Le brouillard et la végétation spécifique rendent l'ambiance étrange, mais je ne m'attarde pas, et, passé le point de contrôle du deuxième refuge, je marche à vitesse maximum avec pour objectif Saint-Pierre avant 21h30. La descente sur le refuge n°1 n'en finit pas, je ne l'avais pas bien estimée sur la carte. Des éclats de voix, une lumière, quelques applaudissements (c'est bête mais ça fait toujours plaisir!), j'y suis. Un verre de coca, un verre d'eau, une banane et c'est reparti vers...

Arrivée: 1er refuge - Stade de Saint-Pierre (8.7 Km, 80m de D+)

Saint-Pierre ! Un petit passage pentu surprenant juste après le refuge, puis une large piste qui descend doucement jusqu'à l'arrivée. Les bruits de la nuit tropicale s'amplifient, la température remonte au cours de la descente. Je marche aussi vite que possible, en cherchant le déhanché de la marche sportive. Les pieds commencent à chauffer mais je ne veux pas perdre du temps pour vider les scrupules qui me rongent les orteils. Ca y est, les lumières du stade m'éblouissent et je m'élance comme un papillon attiré par une ampoule ! Mais il est encore loin, après 5 minutes de course trop rapide je remarche, d'autant qu'il ne reste plus que quelques minutes avant 21h, je calcule dans tous les sens, il me sera impossible de terminer en moins de 16h. Tant pis, je me concentre alors sur les concurrents que j'aperçois devant moi et me raccroche à cet objectif pour finir: les passer avant l'arrivée. Je rattrape un groupe à moins d'un kilomètre du stade, marche un peu avec eux puis m'élance pour les derniers 500 m en courant. Je me sens léger, heureux, presque prêt à sprinter. Mes pieds se font oublier, j'accélère encore, l'arrivée sur le stade est magique, j'entends le speaker qui annonce mon dossard puis mon nom, des applaudissements, et me prends quelques secondes pour une star. Envie de lever les bras pour passer la ligne (mais je me retiens, il y a du monde !). Et après 16h16 de course, je tombe devant.... Le Bourrin qui m'attendait derrière la ligne, arrivé 3 minutes 38 secondes avant moi ! Une membre du staff me remet un t-shirt de finisseur et une médaille.
Du mal à réaliser, grosse émotion, ... un tas de sentiments difficilement descriptibles, une sorte de bonheur.
Merci aux organisateurs et aux bénévoles: c'était quasi parfait.
Grande reconnaissance au Bourrin et à la Biopuce...

Langouste

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