L'auteur : c2
La course : L'Origole
Date : 3/12/2005
Lieu : Le Perray En Yvelines (Yvelines)
Affichage : 5487 vues
Distance : 63km
Objectif : Balade
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L’ORIGOLE Des Chemins aux Etangs
trail de 63km, départ à 0h00 le 03/12/05
Après l’UTMB de fin août (voir texte), malgré l’immense satisfaction d’être arrivé au bout, il y avait eu un grand vide. Dix jours de repos total et le premier bilan de surface avait été encourageant. Les footings de reprise furent agréables et une semaine plus tard je reprenais contact en douceur et avec plaisir avec du fractionné sur piste.
Fin septembre, Gérard revenu du trail des Lucioles me parle d’un nouveau truc de 60 bornes de nuit pour le début décembre. Il est déjà inscrit.
Où sont mes frontales ! ! ! !
Mi-octobre, j’ai récupéré la doc et la forwarde à Bruno avec ces simples mots
« qu’en penses-tu ? »
Il était un des rares à avoir abandonné en haut du grand col Ferret au 93ième kilomètre, lors de l’UTMB, simplement pour aider son cousin qui était en piteux état à redescendre dans la nuit sur le versant italien. Il pouvait sans problème transférer sa frustration et son capital forme sur cette Origole.
Le parcours est un peu modifié dans les dernières semaines et l’on passe à 63km en semi-autonomie dont 95% sur sentiers, 1200m de dénivelé, 11h30 max, départ à 0h00 le 3 décembre, un parcours en pétales avec une mini boucle suivie de 3 boucles nature variées et un nœud central basé au cœur du Perray en Yvelines pour les ravitos. Un menu correct, le tout au grand air. Une version relais à 3, plus une version rando complétaient la version solo. Les tracés des boucles étaient en ligne sur le site. C’était assez tortueux sur le papier, vigilance, vigilance ! ! ! On verrait bien sur le terrain. Tout cela rentrant dans le cadre du téléthon avec de nombreuses autres animations.
C’est au cœur de la forêt des Yvelines, au bord du chemin qui allait de Paris à Chartres, qu’est né le village du Perray en Yvelines. 22 chemins traversent la commune et la relient aux 4 communes voisines. Le Perray en Yvelines se trouve au milieu d’une chaîne d’étangs et de rigoles (rigoles voulues par Louis XIV, pour alimenter en eau les bassins du Château de Versailles et construites par le maréchal Vauban).
23 heures : à peine garé, je tombe sur Gérard. On s’engouffre sous la grande tente blanche dressée devant la mairie pour avant tout, fuir ce fort vent qui n’a pas faibli depuis toute la journée. Bruno nous rejoint dans le quart d’heure suivant après avoir un peu flotté (moi aussi d’ailleurs et pourtant je n’habite pas loin) pour atteindre le cœur de cette ville endormie juste à côté de l’église. Il se demande ce qu’il fait là. Finalement, après hésitation je mets le dossard sur la cuisse droite.
Assis sur une chaise, 3 pensées orientées courses me viennent simultanément à l’esprit, l’une du passé, l’autre du présent et la dernière d’un proche avenir.
Dans quelques minutes nous serons le 3 décembre. Ce sera mon anniversaire de mariage. Très rares avaient été par le passé les opportunités de trouver une compét en un début décembre toujours un peu creux qui avait ces caractéristiques. C’était un peu le hasard du calendrier. La dernière fois c’était il y a 10 ans déjà, à plus de 10000 kms d’ici dans la banlieue de Johannesbourg en Afrique du Sud pour le marathon de Soweto (voir texte)
Je pense également à tous ceux qui piaffent du côté de Saint-Etienne et qui dans 24 heures seront dans le même état que nous pour la Saintélyon. Je me revois lors de cette course tomber par hasard sur Gérard au ravitaillement de Saint-Catherine dans une petite salle surchauffée après 30 bornes dans la boue et le brouillard. Nous avions fait ensuite ensemble les 35 derniers kilomètres dans la nuit avec grand plaisir jusqu’à la capitale des Gaules.
Plus terre à terre, je réfléchis à la durée de l’éventuelle brève sieste que je vais pouvoir m’octroyer en ce samedi juste après la course avant de rejoindre les potos des « joggeurs en Hurepoix » qui vont tourner toute la journée pour le téléthon histoire de faire un ou deux tours avec eux ou au pire de faire simplement quelques photos pour le final.
Brusquement je vois débouler Eric. Encore un finisher de l’UTMB. Il se teste en équipe, comme sa femme dans une autre équipe, sur la deuxième boucle.
23h45 : Briefing de Jacques Poleni, le chef organisateur. « Partez cool et évitez d’être seul » car la première boucle est raide. De toute façon, vous allez être servis : « il y aura du terrain gras, de la boue, des feuilles, des ronces, des racines, des pierres, des souches, du sable, des branches au sol et à mi-hauteur, du dénivelé, du vent ». N’en jetez plus la cour est pleine. Après cette liste, je peux faire ce petit effet de manche facile : « A l’Origole, est ce que l’on y rigole ». Je sais c’est mauvais, mais il est bien tard. Il y en a tout de même un en short !!!. Juste le temps de signer la feuille de présence, on traverse la rue pour le départ en face sous un vieux porche en pierre qui donne sur une allée arborée. Cette première édition est presque confidentielle, 52 coureurs, une quinzaine d’équipes à trois et des randonneurs. Plus une marche découverte en matinée. L’équipe organisatrice n’a pas voulu trop communiquer pour roder l’épreuve et ne pas être débordée. Je les comprends. L’info était tout de même sur des sites comme Ufo et Kikourou et il suffisait de taper Origole sur Google pour tomber sur le site de l’organisation pour avoir tous les détails. Donc ceux qui voulaient vraiment, pouvaient.
0h05 : départ, petit tour de chauffe en ville sur 1500m, on grimpe un talus le long de la ligne de chemin de fer, passage devant la tente du départ, direction la gare, passage souterrain d’accès aux quais, on longe la ligne de train de l’autre côté sur 500m pour contourner par le nord le lac du Perray. On est à l’arrière avec Gérard dans un paquet de plusieurs dizaines d’unités. Début de l’aventure. On suit bêtement, en révisant une règle élémentaire de ce genre d’épreuve « ne pas se fier à ce qui se passe devant » Ca coince en tête. Dans un croisement de chemins, il n’y a plus rien. Flottement, le gros de la troupe insiste tout droit dont Bruno. Pour moi ce n’est ni normal, ni logique. On fait demi-tour avec Gérard, et l’on remonte tranquillement jusqu’à trouver la dernière balise. Au passage on croise des randonneurs en leur indiquant qu’il faut plutôt faire demi-tour.
Très vite on voit l’erreur. Il fallait prendre à gauche en plein bois. Rien à dire c’est bien balisé mais çà surprend car çà attaque franchement hors piste. Personne devant ni derrière. Ca zigzague fort puis descend profondément. On entend quelque chose qui ressemble à un brame d’un cerf. Impressionnant en force et en sonorité. J’espère qu’il ne va pas nous confondre avec 2 biches de passage. A droite toute, raide montée de nouveau sur le plateau après avoir frôlé le sud d’Auffargis. On fait toute la partie Sud de cette boucle, complètement isolés. Je vois très vite que le parcours est sursignalé. Impressionnant de qualité. On est largement au-delà d’une balise promise tous les 30 m. Il y avait, nous le saurons plus tard des risques de brouillard. On en voit souvent 4, 5 en enfilade, les extrémités réfléchissantes au bout de ces rubalises sont autant de lucioles ballottées par le fort vent. On pourrait presque les confondre avec des gens en mouvements. Surprenant.
Petite ligne droite en descente. Contrôle au croisement de la route des Vaux de Cernay. Nous allons être fixés. Nous sommes dans les profondeurs du classement, voire dans les derniers, tout en expliquant le petit quiproquo avec les 2 bénévoles de service. Nous avons en gros fait les 3 côtés d’un rectangle avec du dénivelé alors que ceux qui s’étaient trompés en insistant sont retombés sur leur pied en ne faisant que le 4ième côté tout plat. Petite déception mais satisfaction d’avoir fait au moins le vrai parcours. 2ième partie nord de la boucle. Ce n’est qu’une succession de montées et de descentes. Ce premier semi est musclé avec +/- 650m. On commence sans changer de rythme à ramasser des coureurs, souvent en petite grappe. On relonge cette fois-ci Auffargis par le Nord pour pousser à l’Ouest jusqu’au château de L’Artoire qui n’est malheureusement pas éclairé. La bâtisse semble imposante et l’on sauve un traileur qui s’engouffrait dans une mauvaise direction.
Quelques bouts de sentier, 300m d’une petite route. Une voiture revient à notre hauteur en nous demandant de quoi il retourne exactement, si c’a un lien avec le téléthon. Une fois la curiosité satisfaite, ils nous souhaitent bon courage, quelque peu impressionnés du volume effort prévu. Retour à la base. On a bien dû remonter une douzaine de concurrents. On retombe en autre sur Bruno qui se restaure depuis 10mn sous la tente en ayant tiré tout droit surpris de nous voir là en nous croyant devant. 3h 07 tout de même pour cette boucle et une 30ième place. 10mn de pose. Je cherche des ciseaux pour couper un bout de ma semelle droite qui se décolle et frotte sous le talon. Ca me donne une idée d’achat pour Noël.
2ème boucle plutôt Nord dans la forêt domaniale des Plainyaux. Nous partons à trois, noyau dur de plusieurs Raid28, il y a quelques années. On passe dans un boyau sous la N10, virage à droite pour une partie à découvert roulante et un peu monotone. On reprend une triplette que l’on dépose progressivement en douceur. On traverse sans s’en rendre compte, du fait de la végétation et de la nuit, à la hauteur de l’étang de Corbet cette longue succession d’étangs qui s’étale sur 4 kilomètres de long des étangs de Hollande à l’ouest pour finir à l’est à l’étang de Saint Hubert. On attaque les bois. Plus on monte au Nord plus c’est cassant (+/-350m sur cette boucle). Ca tourne, çà vire, on fait du sur place. On devine même parfois la boucle suivante en accrochant une balise avec la frontale. Bruno monte tout en puissance et on le reprend avec Gérard gentiment dés que c’est un peu plus roulant. Direction sud sur le flanc est de cette forêt pour débouler sur un deuxième contrôle devant le château de Saint Hubert. « çà roule les gars ??. Bon c’est pas compliqué. Tout droit sur 300m puis à gauche, le pont sur le lac, encore à gauche juste après, la zone industrielle, puis vous arrivez, 4 bornes, disons 15mn » « Ok merci, disons un peu plus de 15mn », « Houai, c’est vrai, vous avez raison, un peu plus » On fait comme il a dit. Cette fois-ci on voit les lacs, on les surplombe nettement. A gauche toute, on enjambe la N10 par-dessus cette fois-ci, virage à droite, la zone industrielle déserte, vent sud de face, super, nouveau retour à la base.
J’ai à peine pris un verre de boisson que mon téléphone sonne. Impressionnant. J’avais promis à Marie de l’appeler à la fin de la 2ième boucle. Je suis devancé. Ah ! ! ce sixième, septième ou huitième sens féminin. On ne sait plus. Il est bien connu que l’on se réveille spontanément un samedi matin un peu avant 6 h sans problème. Comprenne qui pourra !!! Je discute un peu avec Jacques Poleni, lui dis que l’on n’a pas pu ne pas se voir sur l’UTMB étant arrivés tous les deux à 15 mn d’écart à Chamonix. Le monde est petit. Mais on parle surtout de son terrain de jeu, qu’il veut nous faire partager autour des différents plans qui sont affichés. « Vous repartez ?? » nous demande une dame. « Oui, oui. » Alors signez là. Bruno s’attarde un peu au rayon chaud. Je change de frontale et regarde un peu autour de moi. Certains signes ne trompent pas. Certains traileurs avachis sur une chaise transpirent l’abandon et ne repartiront certainement pas. Le danger classique du passage sur le lieu de l’arrivée. Il est 6h05, on rallume le moteur avec 44 bornes dans la musette au moment où certains randonneurs arrivent à la fin de leur première boucle. Le premier relais vient tout juste d’arriver. Chapeau !!!
Direction Sud, pour ce 3ième semi avec encore le même trio. Quelques chicanes en ville. Par-dessus la N10 de nouveau sur un autre pont. On récupère une fille qui ne trouve pas la suite en nous disant qu’elle est partie à gauche sans rien trouver. Prudent, je sors alors mon joker. Une copie du plan des boucles et vois tout de suite que c’est à droite sur 150m pour s’enfoncer à gauche en plein à travers bois. Elle nous remercie et nous dépose gentiment. J’espère que c’est une relayeuse ce serait meilleur pour l’amour propre. En plus des rubalises fluo, de nombreuses et énormes flèches au sol à la craie blanche ou rouge lèvent beaucoup d’incertitudes surtout en ville ou le long des rares portions route. C’est vraiment bien fait. Merci à l’organisation. Une rare ligne droite sur sentier, succession de montées et de descentes. 3 organisateurs nous disent où il faut aller sur la gauche. C’est un peu compliqué, car on part pour un 8 écrasé assez long et l’on repassera ensuite par-là. On devine quelques frontales déjà sur le retour de cette boucle qui passent un peu sur la gauche. Beaucoup de pétales très tortueux avec du relief, complètement hors chemin, çà n’avance pas. On dirait une structure fractale. De nouveau 2 contrôleurs. « alors les gars, çà vous plait ». Je ne compte plus le nombre de fois on l’on bute sur quelque chose. Idéal pour un relookage des ongles de pied. Où encore les gentils lassos au sol à base de ronces qui ne demandent qu’à se refermer sur les chevilles et les branchettes qui ne souhaitent que vous caresser une joue ! Aucune chute, mais pas mal de récupérations très très limites.
7h30, la nuit s’accroche. Après un départ sans étoile, suivi d’un passage dégagé mais sans lune c’est de nouveau bouché. On va se prendre en bonus deux petites douches, gentilles, mais heureusement çà ne dure pas. Question thermique, 3 degrés min au cœur de la nuit selon le bulletin hyper détaillé affiché par l’organisation, certainement plus froid avec le vent. Pour moi idéal. Je n’ai gardé les gants que pendant les 10 premiers kilos et le bonnet est resté dans le sac. Le grand froid de la semaine passée est parti. On débute un régime océanique. On a la chance d’être entre 2 perturbations. Il a plu toute cette journée du vendredi. 12 heures plus tôt cela aurait été franchement moyen. La boucle est plus soft en dénivelé (+/- 250m) mais ça n’avance pas dans ce hors piste. On longue des rigoles que l’on traverse plusieurs fois. Passage près de l’étang de Gruyer. Un coup à raz de l’eau, puis retour en hauteur. On enchaîne avec l’étang de Coupe-gorge. Premières lueurs de l’aube. Deux pécheurs installent déjà leur matos. Parties sablonneuses, nombreuses fougères. On est juste au nord de Rambouillet dans le bois domanial de la Pommerdie. Il faut rester toujours vigilant sur le parcours car certains changements de directions sont surprenants et inattendus. On longue un terrain de manœuvres. Puis une belle ligne droite finalement assez rare.
On s’enfonce dans une discussion et çà ne loupe pas.
« Dis donc je ne vois plus de balise » « c’est vrai ça »
On insiste un peu (beaucoup trop) jusqu’à un carrefour. Rien. Demi-tour toute. 3 yeux à droite et autant à gauche. Bilan 2 kilos en rab. On repère la balise en retrait dans la forêt sans vraiment en voir une sur le bord. Elle est peut être enroulée par le vent sur un arbre. Autant pour nous. De nouveaux des rigoles, à traverser plusieurs fois. Que du sous bois ! Finalement on voyait mieux les balises de nuit avec les parties réfléchissantes. On attaque le final. On sort de la forêt par un grand centre équestre avec son immense manège couvert. Du chemin à découvert plus roulant qui fait bien souffrir Bruno qui préfère les parties plus tortueuses. Mais on la joue groupir. On est là pour se faire plaisir. Quelques promeneurs, un peu surpris. D’autres au courant applaudissent et encouragent. On longue en contrebas la N10 direction Paris par la gauche à contre sens des voitures. On repasse le boyau du début de la 2ième boucle pour le final.
Arrivée à 3 de front par l’allée du départ. C’est plus animé en ville. Les marcheurs sont sur le point de partir pour une boucle découverte. Nos chaussures ont disparu sous une gangue de boue. Une soupe chaude. Discussion à droite à gauche. Un beau tee-shirt noir. Plein de scolaires passent sous cette tente qui sert aussi d’animation pour le téléthon. Il est temps de se rentrer après 9h37 d’effort. Finalement cette troisième boucle était loin d’être roulante et nous a pris pas mal de temps même s’il y avait moyen de gagner du temps sur le final.
Au bilan perso nous terminons 14ième ex æquo. Il y a eu pas mal de casse avec déjà quelques abandons à la fin de la première boucle et d’autres à la fin de la seconde. Seulement une moitié d’arrivants individuels. Bruno termine 7ième V1 et avec Gérard nous sommes second V2.
Cette épreuve en devenir est très belle mais exigeante, beaucoup plus qu’une Saintélyon par exemple. On ne peut lui souhaiter qu’un bel avenir à la hauteur de l’investissement matériel et humain du staff organisateur. Une course organisée par des traileurs pour des traileurs.
Venez vous y frotter l’année prochaine.
Christian
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