L'auteur : MARC78
La course : Grand Raid 56 - Golfe du Morbihan
Date : 25/6/2010
Lieu : Vannes (Morbihan)
Affichage : 4043 vues
Distance : 177km
Matos : Adidas Super Nova Riot2
Objectif : Terminer
Partager : Tweet
Aujourd’hui que je commence ce récit, je me dis que depuis le lever vendredi matin à 3h45 pour aller prendre le TGV à destination de Vannes, je compte les heures de sommeil sur les 10 doigts de mes mains ! (Ça me rassure d’ailleurs, car j’en compte bien 10 !!)Donc lever à 3h45 ce vendredi 25, pour prendre le RER de 5h10 et finalement arriver 30mn à l’avance pour monter dans le TGV de 7h00.Trajet pas trop dur, entre somnolence et gamberge dans la tête … l’arrivée à Vannes se fait sous un beau soleil sur le coup de 10h30.
Regroupement avec Francine qui était dans le même train mais pas dans le même wagon et direction le port, histoire de commencer à s’imprégner de l’atmosphère de nos futurs exploits !Le village du Raid sur le port est entrain de s’éveiller, et nous nous dirigeons vers la remise des dossards avec vérification totale des sacs. Nous sommes chargés comme des bourricots alors nous décidons de nous habiller de suite en tenue de combat pour le raid et de laisser nos sacs aux consignes de la course, direction une pizzeria pour manger un bon plat de pâtes !Ensuite nous nous allongeons prêt du village, sur une pelouse pour commater un peu en attendant 19h00, heure du départ sur le port de Vannes.
18h00 nous retournons au stade remplir nos bidons et camel-back et parfaire nos tenues.18h20 nous sommes au pied de l’arche de départ, et c’est avec une grande joie que nous retrouvons Yaël et que nous faisons (enfin !!!) connaissance avec Jacky et Trédionnais !!!
Nous immortalisons ce moment.Briefing de l’organisateur … bonne chance à tous les coureurs … un petit coup de folklore breton fort entraînant et 19h00 … PAN … c’est parti pour 178km en maxi 42h.
Contrairement à d’autres courses, notre départ est prudent. Je scrute mon GPS très souvent pour essayer d’être le plus régulier possible, et nous sommes à 6’45’’/km … cela me semble encore un peu rapide et malgré cela beaucoup de coureurs nous doublent ce qui me parait vraiment très étonnant ! La suite des évènements me donnera certainement raison …
1ère constatation, Jacky a le don d’ubiquité !!! Il est partout !! Il nous encourage à plusieurs endroits jusqu’au 1er ravitaillement à Séné. 19km de parcouru et 2h07’ de course … il commence à faire plus frais et on ne s’attarde pas, direction Noyalo pour le 2ème ravito.
La nuit tombe, et déjà les jambes se font lourdes … Je suis entrain de prendre des photos et un caméraman s’approche de moi, et me filme tout en me posant des questions !! Tiens je risque d’être sur la vidéo du site du Raid cette année !!! Sur le trajet, Francine fait un écart, manque de tomber, se tord la cheville … et elle a l’air de souffrir.A Noyalo nous mettons nos frontales, moi mes manchons sur les bras et repartons vers Sarzeau, là il y aura des kinés et Osthéos pour la cheville de Francine.Les ravitaillements sont conséquents et il y a de tout, mais je commence à saturer en sucre, et j’ai des hauts le cœur quand je commence à penser bouffe !!! Nous marchons pas mal, pour soulager cette fameuse cheville Francinienne.
Arrivée à Sarzeau après 53km et 7h23’ de course. Francine va voir les kinés et y restera une bonne vingtaine de minutes pour se faire strapper. Je l’attends en lui gardant ses affaires. Décoincer de cette salle de sport est plutôt difficile !! Il faisait bon !! Nous retournons affronter la fraîcheur de la nuit. Pas envie de dormir, c’est l’adrénaline qui me tient éveillé.
Nous nous dirigeons maintenant vers PortNeze alternant course et marche. Je sens que c’est très dur pour Francine mais elle suit sans rien dire. J’avoue que je ne suis pas vraiment tendre car j’impose un peu mon rythme au niveau course et marche … mais je me sens bien malgré la fatigue.
La fatigue parlons-en … début d’un chemin, un pied qui ne va pas où je veux qu’il aille et je m’affale comme une grosse b …… la tête la première dans la terre sans même me retenir avec les mains qui faisaient la grève du zèle ! Bilan : mes lunettes m’ont coupé au niveau du sourcil et me suis écorché au genou.Pffffffff …. Quelle buse le Marc ….
4h00 plus tard nous arrivons au ravitaillement de PortNeze après 11h19’ de course contre le chrono.J’avoue que ce ravito, je ne l’ai plus en tête !! Je ne m’en rappelle plus, il est 6h20 du matin et le jour est quasi levé, plus besoin de frontale. Ouf je commençais à avoir un mal de crâne !! Bon la prochaine étape, c’est la mi-course et je suis pressé d’y être ! C’est Arzon et l’embarquement en zodiac pour traverser jusqu’à Locmariaquer où nous attend notre sac avec quelques fringues de rechange (très important …)
Pour l’instant, tout va bien au niveau de mes pieds. J’ai opté pour des ‘’doubles chaussettes’’ X-Sport, les pieds ne frottent pas, ce sont les 2 chaussettes qui glissent l’une sur l’autre et évitent aux pieds de s’échauffer ! Le top !! Pas une ampoule !!! Le rêve !!! Francine a de plus en plus de mal à supporter sa cheville, et nous marchons souvent.
3h de chemins et routes, et nous arrivons à l’embarcadère ! Et hop un joli poncho jaune et direction le zodiac où nous prenons place à 4 coureurs. La traversée se fera en 11mn qui sera déduite de notre temps final. Un hélico nous suis et descend à notre hauteur pour nous filmer !! C’est apparemment aussi pour la vidéo du site du Raid !!! Nous voici sur l’autre rive … mais le ravito et nos affaires, sont encore à 1,5km !!! Mince !! Bon l’envie est trop forte, on s’arrête au 1er bistro du port et Francine m’offre un Gini super glacé qui fait du bien par où il passe !!!Et c’est reparti, trottinage et marche … pour enfin arriver à cette salle de sport !!!
Et là … je commets l’irréparable : je me lave les pieds qui sont noirs de terre et … je change de chaussettes !!! ERREUR … FATALE ERREUR !!!! Je mets de la Nok et des chaussettes BV Sports spécial trail, mais ‘’normales’’ celles-ci … Je vais m’empifrer de pâtes au gruyère et jambon blanc pendant que Francine se fait changer son strap à la cheville. Je discute avec quelques coureurs. Encore une fois le ravitaillement est hyper complet et les bénévoles ne ‘’plaignent’’ pas la nourriture ! J’entends par là que vous pouvez y revenir 10 fois et manger comme un cochon, on ne vous en tiendra pas rigueur !!!!!
Il est temps de repartir, direction Crac’h. Encore une fois, la ‘’route’’ semble longue. Nous allons marcher et courir durant 3h30 pour y parvenir. Il fait chaud … très chaud … certains disent + de 40° sur les portions de bitume en plein cagnasse !!! Nous y voici … ça sent l’épuisement à plein nez … j’avoue que je commence à en avoir marre … et Francine qui souffre de sa cheville … des idées d’abandon nous traverse l’esprit, mais un bon ravito nous remet dans le droit chemin et nous fait repartir rapidement vers Auray, notre prochaine étape.
Toujours cette chaleur … et voilà, ce qui devait arriver arriva … j’ai les plantes de pieds en feu !! Mais pourquoi ai-je changé de chaussettes ? Quel abruti je suis !!!! Les premières ampoules font leur apparition, je tremperais bien les pieds dans l’eau mais ce n’est pas recommandé !! Le bitume brûlant et le goudron qui fond, n’arrangent rien.Nous tournons en rond dans les faubourgs d’Auray pour trouver le pointage et le point d’eau. Il faut avouer que les Bretons (remarquez, c’est aussi un peu partout …), n’ont pas la notion des distances !! Vous demandez ‘’il est loin le ravito ?’’ … on vous réponds ‘’non, environ 300m’’ … cool … sauf qu’1km après vous êtes toujours entrain de suivre les balises en vous demandant si vous allez enfin toucher le but !! Nous avons eu le droit à cette mésaventure, quasiment à chaque fois que nous avons posé la question !!!!
Bon on y est … remplissage du camel-back et des bidons avec de l’eau bien fraîche ! Ah le bonheur !! Repos à l’ombre d’un arbre 10mn et c’est reparti … non sans avoir aéré un peu les pieds pour les refroidir … Allez … cette fois-ci c’est le ravito du Bono qui se profile dans quelques heures … joli petit village avec un joli pont.Le soleil ne se cache pas … les pieds fument … les ampoules se remplissent de liquide douloureux … la tête est pleine du mot ‘’abandon’’ … Les sentiers sont superbes, les paysages aussi, cela compense le dureté de la course. Je peste durant les ¾ du chemin qui nous même au ravito … nous y voici … mais là c’est plutôt pénurie et peu de place pour se reposer.
Cela fait 21h16’ de course, il est 16h15 … Assis au pied du chemin, on discute avec Francine … elle a mal et songe à abandonner dès maintenant … j’ai la tête farcie et moi je pense la même chose, j’en ai marre, pourtant les jambes me supportent encore mais je marche sur des braises depuis pas mal d’heures …On remet les chaussures et c’est reparti tant bien que mal, et surtout plus mal que bien, en marchant. Je force parfois un peu l’allure et je sens Francine qui décroche derrière …
Bon on rejoint le prochain ravito ensembles et on avise, celui-ci est au km126, il restera alors 52km pour rallier l’arrivée à Vannes. Un champ, une petite tente en bord de mer … c’est là … on s’assoit sur un banc, des idées d’abandon dans la tête pour Francine et moi. Elle a sa cheville qui est enflée, et la douleur remonte dans son mollet … rien à faire pour continuer au risque de compromettre sa deuxième partie de saison … elle jette l’éponge et va rendre puce et dossard …
Moi je cogite, je ne peux presque plus poser les pieds par terre, et je jure comme un charretier après moi pour avoir eu cette stupide idée de changer de chaussettes … Que faire ??? Bon Francine me propose des pansements gel … je vais m’en mettre sur toutes les ampoules bien mures … il reste 8km jusqu’au prochain grand ravito à Lamor-Baden où il y a kinés, Osthéos et podologue … et après j’aviserais en conséquence.Je laisse à regret Francine derrière moi et me voici livré à moi-même pour les 52 derniers kilomètres.
Un compagnon de route s’offre à moi, et nous courons sur les portions plates et descendantes, et marchons au moindre faux plat. Nous discutons et j’en oublie mes pieds qui fument !!!
Lamor-Baden … enfin … direction immédiate vers les podologues … dispo de suite, je m’allonge et commence un calvaire … déjà pour enlever les pansements gel sur des ampoules ‘’fraîches’’, j’ai hurlé … puis lorsqu’il ma enlevé le liquide des ampoules à la seringue, j’ai hurlé … puis lorsqu’il m’a injecté de l’éosine dans les ampoules, aussi à la seringue, j’ai hurlé … Hein Nath !! Tu l’as vécu en direct au téléphone !!! Pansements gras … élasto … chaussettes … chaussures … je me lève … mais comment je vais pouvoir marcher ??? Bon on avisera après … je vais voir l’osthéo pour un bon massage des adducteurs, cuisses et mollets … Wahou !!! J’ai des jambes neuves !!!
Bon ce n’est pas pareil pour les pieds.Je vais au ravito encore une fois me goinfrer de pâtes et jambon et remplir mon camel-back pour les derniers 44km. Je marche sur des œufs. Comment vais-je faire pour repartir ?? Marc, 44km c’est pas la mer à boire, t’en a fais 134 alors quitte à marcher sur les 1er kilomètres, tu repars !!Bon OK … ma conscience ou plutôt mon inconscience a parlé … Je repars. Les gens applaudissent et j’en vois qui ont mal pour moi … Je laisse passer la 1ère féminine du 88km … elle me glisse un courage et bonne chance … merci et réciproquement !!!
Au bout de 500m … je trottine … je passe par-dessus la douleur, faudra faire avec de toute façon.Voilà, je coure, j’ai mal, mais je coure. Le moindre caillou sous la semelle en plein sur une ampoule, me donne une bouffée de chaleur avec la douleur en prime.
Arradon, prochain ravito, est à porté de semelle …. La nuit est tombée et souvent je suis seul sur les sentiers côtiers … Je coure dans la fraîcheur … ça fait du bien …Méchant coup de barre … je continue en marchant, je sens que je titube … Paf … je me cogne sur un mur … bon là, Marc il est temps de t’arrêter, sinon tu finis soit dans un fossé, soit tu prends un bain de mer involontaire !
J’avise un banc … je m’allonge … et j’essaye de dormir avec Le bruit des pas des coureurs en fond, leurs discussions, et 4 ou 5 fois, un gentil trailers qui prends soin de ma santé, en me demandant si tout va bien ! Je montre mon pouce vers le haut et je lâche dans un râle ‘’Oui oui je dors …’’30-40mn plus tard je me lève et je repars en courant ! VinDiou !! Ça m’a refilé la pêche cette mini sieste !
Un petit ravito intermédiaire, je ne m’attarde pas mais je mange et bois …
Plus que quelques kilomètres et c’est Arradon : 31h51’ de course, il est 3h00 du matin ce dimanche et Ô surprise, Yaël et Jacky sont là pour nous encourager, se relayant pour dormir et faire le guet !!! trop fort et surtout mille merci ! De les voir m’a donner un sacré coup de fouet et quand ils m’ont appris qu’il ya avait eu 60% d’abandon, je me suis senti l’âme d’un guerrier, un warrior comme m’a dit Yaël !Bon j’ai eu un méga coup de barre quand on me dit qu’il reste 14km …
Je suis près du but, je le sens et mes jambes tournent ! Je coure très régulièrement, je marche juste dans les montées et Dieu sait si il y en a sur cette fin de parcours à fort dénivelé !! Passage en forêt, montées, descentes, racines (aie mes pieds …) rien ne nous est épargné sur ces derniers kilomètres.Des tours et des détours, où l’on voit les coureurs sur l’autre rive sans trop savoir si ils sont devant nous ou derrière nous où nous sommes déjà passé … pour arriver à Conleau, ultime pointage et s’entendre dire qu’il reste 4km. On fait le tour de la presqu’île … et c’est le retour sur Vannes.
Je suis à plus de 35h mais je me fixe moins de 36h pour franchir la ligne. Je sais que j’en suis là, grâce à tous les PCaPiens présent pour nous encourager, Yaël, Jacky, Franck (Psycoz), et tous vos messages d’encouragements par sms, Runner35 qui a fait un suivi live (même sur mon profil Facebook !), bref encore, du fond du cœur, UN GRAND MERCI A TOUS !! Je longe le port … je ne sais pas pourquoi mais j’ai les larmes qui me montent aux yeux, je suis au bout … c’est la première fois que je puise aussi loin dans mes ressources mentales et physiques. Aujourd’hui je sais ce qu’est « aller au bout de soi-même’’ …
Francine est venu à ma rencontre pour m’accompagner jusqu’à la passerelle pour traverser de l’autre côté du port (la fameuse où il faut passer en marchant sous peine de 3h de pénalité !). On contourne le port et ultime ligne droite … l’arche d’arrivée enfin !!! TOP … pointage … temps définitif : 35h33’26’’ et une place de 160ème sur 251 arrivants et 560 partants (60% d’abandon, du jamais vu !!)
C’est fini … fin d’une belle aventure ! Je l’avoue j’ai souffert … surtout au niveau des pieds ! Première fois que j’ai des ampoules. Je sais maintenant que si je change de chaussettes, j’aurais les 2 mêmes paires qui m’ont épargné sur la 1ère partie du parcours.Et puis j’ai eu cette sensation bizarre de vouloir souvent jeter l’éponge tout en sachant au fond de moi-même que je ne le ferais pas … Le Grand raid du Morbihan, je l’ai rêvé, je l’ai fait, je l’ai terminé et sans aucun doute j’y retournerais.
La Bretagne est une superbe région, un bien beau terrain de jeu pour les trails. Quant à l’organisation et bénévoles, je les ai trouvé au top, car organiser une telle épreuve relève de véritables travaux d’Hercule !!!!!
Les photos de ma course:
http://picasaweb.google.fr/100911440513722063795/GrandRaidDuMorbihan2010#
5 commentaires
Commentaire de mara posté le 03-07-2010 à 11:49:00
Bravo !! Merci pour ce récit et les photos.
Bonne recup'
Commentaire de nono_la_robote07 posté le 03-07-2010 à 13:35:00
Un récit bien sympathique. Nous nous sommes croisés quelques fois sur la course notamment au ravitaillement où Francine a arrêté. Bonne récup à vous deux.
Caroline
Commentaire de Bert' posté le 05-07-2010 à 18:29:00
Bravo Marc ! Pas simple de finir en temps normal... mais encore plus dur cette année. Alors un grand coup de chapeau pour ton exemple.
Merci aussi de ton témoignage qui ne peut qu'aider les autres à mieux aborder la course.
Commentaire de Mustang posté le 05-07-2010 à 23:33:00
un grand bravo pour ta ténacité!
Commentaire de MARC78 posté le 08-07-2010 à 07:22:00
Merci à vous !!!!!
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.