Récit de la course : Eco-Trail de Paris® Ile de France - 80 km 2009, par breizhman14

L'auteur : breizhman14

La course : Eco-Trail de Paris® Ile de France - 80 km

Date : 14/3/2009

Lieu : St Quentin En Yvelines (Yvelines)

Affichage : 3217 vues

Distance : 80km

Objectif : Pas d'objectif

16 commentaires

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CR parisien

  

            En revenant de la capitale, ce CR je ne voulais pas l'écrire, mais alors, pas du tout! Me remettre en tête  les heures de galère, je voyais pas l'intérêt, du masochisme à l'état pur, c'était me faire mal une 2ème fois... Et puis finalement c'est bien connu, "avec le temps, avec le temps va, tout s'en va"... y compris la souffrance. Un peu de recul et place au souvenir, au sourire....

             Et des souvenirs il y en a . Sur le parvis au matin, des retrouvailles, des nouvelles rencontres.

      groupement.jpg

                                        quelques célébrités

          11H45 à la base de départ, l'attente du coup d'envoi est longue. 12H passées et Pan! C'est parti! Je prends la route avec Marioune et Ampoule 31 mais quelques hectos plus loin je les perds sur ce terrain bourré de trous aussi ridicules que dangereux. Les premiers kils vont s'enchaîner facile, je courre un bon moment à proximité du lapin bleu.

 

             Pendant 10 km le parcours est peu intéressant, voire ennuyeux. Le temps est maussade, tout ça me paraît un peu terne. 2ème heure et le terrain devient plus forestier, donc plus attractif. Je garde la même allure, en aisance, à 10km/h. Il faut attendre le 18ème km pour goûter aux premières buttes. Ca fait du bien!

       cote1.jpg

                                                       1ères grimpettes

  

                     On pousse encore un peu, km 21 et 1er ravito. 2h04 que je courre. 2ème passage devant Taz, Domi  et badgone qui braille à tout va! Ca donne une énergie totale ça! 1 texto à vetchar qui joue la provinciale à paris, remplissage du camel, 2 verres de coca, banane, 1 barre et c'est reparti.

 

                   On attaque la portion majeure du parcours: 30 km avant le prochain ravito. C'est là aussi qu'est concentré l'essentiel des 1500m de dénivelé. On sent tout de suite la différence de style du parcours, c'est très typé montagnes russes. Longues grimpettes droit dans la butte, relance sur le plat et redescente tout droit.

                  cote2.jpg

                                                    Non non! La RP, c'est pas plat!

  

                 Ca va toujours nickel bien comme ça pendant 1 heure, je double tranquille tout plein de monde. Brusquement, je sens mon estomac qui se serre, se bloque... Kezako? Début d'un long calvaire, ça devient difficile de mettre un pied devant l'autre. "Et m.rde! C'est quoi ce b.rdel?" Comme bien sûr personne n'est là pour me souffler la réponse, je continue comme je peux, c'est à dire pas bien du tout. Je trottine 100m et marche 30 sec, trottine à nouveau et remarche... Bientôt mes trottinements font maxi 50m... je suis doublé par la gauche, par la droite... Encore heureux que j'arrive à marcher à allure normale! Du coup je suis tout content dès que je vois une côte. Au moins je suis à la même allure que tout le monde et c'est moins frustrant.

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                                                           Là je vais même en dépasser! Si!

 

 

                   Mais dès que vient le plat...déprimant! Mon moral s'effondre plus vite que mon allure. Je continue mon alternance marche/course, mais plus ça va plus je marche et moins je courre. 50m de course et marche, 50m de course et marche, 50m de course et marche... P.tain c'est long!! Immense impression de solitude... Je ne retiens pas grand chose du parcours si ce n'est mon soulagement à aborder les côtes. Je ne vois rien du chemin, juste un vague souvenir d'avoir longé des étangs...Et comme un bonheur n'arrive jamais seul, c'est une douleur articulaire qui s'annonce. Sébastien Chabal courre à mes côtés et me claque des béquilles sur le haut de la cuisse sans arrêt!!! J'en suis réduit à alterner la marche avec une course en minifoulées boitillantes... et ça dure... ça dure... Pour la 2ème fois dans ma vie de coureur l'idée de l'abandon m'effleure. Un coureur à proximité téléphone à un collègue: "J'arrête au 2ème ravito, j'en peux plus, j'ai trop mal,... tu m'attends?.. ouais?.. Ok, à tout de suite!" Il me demande combien il reste pour atteindre le ravito, je lui réponds "pas grand chose sans doute" juste au moment où on arrive au contrôle du 43ème. Encore 7 km! Je lui dis "pas loin  d'1h" et le vois qui se liquéfie. Désolé mon gars, j'ai à peine ce qu'il faut de forces pour moi, je ne peux rien pour t'aider... Cette image me reste, n'avoir pu aider un gars en pleine dégringolade... mais je suis tombé assez bas moi-même pour me préserver et continuer.

 

                        Le 2ème ravito s'approche, mon état est stationnaire donc j'en suis toujours à marcher/minicourir. C'est long, foutrement long, je n'éprouve rien, aucun plaisir. Je me fais même une tripotée de diagnostiques: "mon gars t'as les cartilages foutus! de l'arthrose! de la sciatique! t'es juste bon à jouer au rami dans un orchestre du 4ème âge!" Ca continue, ça dure, c'est monotone... Le 2ème ravito est tout près, j'entends la sono depuis un moment. Un coureur me dépasse: "Alors? concentré?" C'est Mustang! Je vois à sa tête qu'il est en pleine forme! Ca m'achève un peu plus... On se retrouve au ravito. C'est fou l'impression qu'il dégage, zénitude totale! Je l'envie...

    ravito2.jpg

                                                                    Le Must du Mustang

                   Cet espace ravito est génial. Il y a de tout à foison, sucré, salé, liquide, ambiance musicale, spectacle... N'empêche, faut pas trop traîner, il commence à faire frais. A partir de maintenant c'est l'inconnu, je n'ai encore jamais franchi le cap des 50. Pourtant malgré les apparences je sais que je tiendrai. Après tout reste juste à gérer 3 petites étapes de 10...

 

                         Je repars en alternant toujours marche et minifoulées en répétitions incessantes,, c'est interminable, aucun attrait, aucun intérêt; une monotone marche forcée. Brusquement à 19h, coup de théatre: l'estomac va mieux! Enfin, moins mal... Au bout de 4h, c'est pas dommage... Petit à petit j'arrive à allonger les périodes de course et diminuer la marche!! Boudiou!!Je remercie à plat ventre les "Dieux du Saint K rouge et blanc" et reprend un rythme qui commence à ressembler à celui de mes congénères coureurs. Je retrouve pas la grande forme non plus, non, Chabal est toujours là à me larder la cuisse de béquilles bien senties! La nuit s'approche, m'envelopppe, j'ai l'impression que ma misère est moins perceptible. J'arrive sur les pistes de Jardy. Une bande de kikous échevelés me rattrappe, Marioune, Ampoule, Lutin, + d'autres non-identifiés, ils sont en pleine bourre! me dépassent.. la nuit se referme inexorablement sur moi... 3ème ravito, il reste 17 km, une paille...

 

                         Je repars dans la nuit, bipède incongru et esseulé, une pensée pour ceux de mon entourage qui m'ont regardé comme un taré, mes marmounets qui sont blasés de voir leur père courir... pas question de monter dans le bus!!!

                          Maintenant le parcours est facile et j'arrive à courrir de longues portions sans marcher. Marnes la coquette que je ne trouve pas coquette du tout, Parc de st Cloud dont les allées me paraissent ch.antes mais à un point! Ca finit de grimper et enfin, dernier ravito. Coca, chocolat.

         ravito4.jpg

                                                                              Ca y est je l'aperçois! Tout au fond!

 

Je vais pour repartir, impossible de reposer le pied gauche par terre! Je boite, claudique, et redémarre en marchant, doucement puis plus vite, trottine.. Ca redescend, un coureur rate les balises, je le rappelle "Hé par là! gauche!" Il reprend le fil mais pas un mot à mon égard, preuve qu'il est bien cané lui aussi. C'est la descente du parc. On est aux portes de la capitale mais toujours ce même immense sentiment de solitude.

 

Enfin on longe les quais de la Seine. Reste moins de 10 km, mais ils ont longs, longs, longs à n'en plus finir. Longer les quais n'a pas de sens, pas de fin.

       peniche.jpg

                                                              C'est pas encore l'heure pour le Paradis!

 

 

                   La Grande Dame se laisse entrevoir de loin en loin, mais pourtant paraît à chaque fois aussi inaccessible. Bon sang mais comment ils comptent les km ici??? Ces quais sont interminables! J'ai plus envie. Marre de courir. Pourtant je m'accroche. A la traversée d'un carrefour des bénévoles nous crient " 4km! plus que 4kml!!" J'ai jamais vu des km tout plat aussi longs!! Il me faut près d'1/2 h pour en venir à bout, et cette fois je LA vois toute proche, belle et froide, je sais que j'irai à SES pieds, qu'ELLE m'engloutira.

     tour.jpg

                                                     Enfin! La Tower!

 

 

Presque 22h, j'arrive, les muscles, les jambes, la douleur, les heures, tout ça n'existe plus. Le temps de traverser le parvis, l'ovation, je suis au pied de l'escalier, ELLE me happe, m'aspire... me tire vers l'ultime... 22h03... no comment...

Le t-shirt finisher, une bonne bière, vetchar qui immortalise l'instant...

      finish.jpg

 

 Et comme je m'en veux de ce parcours dantesque, je redescend par l'escalier! Passage par le gymnase, douche chaude-bouillante au top, ravito final kikouresque (et gargantuesque) au top, ostéo (merci l'papy de m'y avoir obligé) au top, cloturent tranquillement une journée pas tout à fait comme les autres.

 

Epilogue:

Après un passage ostéo qui diagnostiquait une inflammation d'un tout petit muscle (moi qui me voyait déjà équipé d'une nouvelle jambe bio-ionique) vous vous êtes tous bien foutu de ce p.tain de tout petit muscle!! Et vous avez eu raison!!

 

Spécial guest thanks to:

- Marioune pour l'extreme gentillesse, dortoir et réfectoire, et pessac léognan 2005 de toute beauté (j'espère qu'il t'en reste!!)

- Ampoule 31 à la bonne humeur toute méridionale (dis-donc y'a koi comme course dans ton secteur???)

- Vetchar pour son élégance à être finisheuse sans être participeuse

- L'papy pour m'avoir tanné jusqu'à ce que j'aille au stand ostéo, merci à tout jamais!

- L'organisation, les bénévoles et signaleurs, parfaits en tous points.

 

Le 14 Mars au soir j'ai dis "Jamais plus!"

Ce soir : Et si je revenais???

 

 

 

16 commentaires

Commentaire de millénium posté le 20-03-2009 à 06:27:00

excellent....Autant d'humour dans une telle souffrance , chapeau.
Tu résumes bien ce que l'on se dit après certaines "galères" : plus jamais...Et puis les images positives reprennent le dessus et on ne pense qu'à..revenir.

Par contre , que tu aies entendu TAZ , monster et BADGONE "hurler" m'étonne (lol)

Bravo breiz

Commentaire de Mustang posté le 20-03-2009 à 07:24:00

Bravo pour ton courage! Désolé de ne pas su te réconforter ( j'étais dans un autre trip). Quoiqu'il en soit, admiration pour ta ténacité. Seules les belles images resteront et c'est celles-là qu'il faut garder. Tes pitchounes peuvent être fiers de toi!
A bientôt!

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 20-03-2009 à 08:05:00

Quel courage ! Moi, j'aurais laissé tomber...
Et puis ton temps est plus qu'honorable !
Ça ira mieux la prochaine fois ! Viens donc voir en Ecouves !

Commentaire de hagendaz posté le 20-03-2009 à 08:11:00

ce qui est sûr c'est qu'avec le temps ça va. la preuve!
bravo à toi

Commentaire de gdraid posté le 20-03-2009 à 10:13:00

Merci pour ce récit intéressant.
Bravo breizhman14 pour ta course au mental, jusqu'au bout !
Cette expérience te permettra sans doute d' aborder des épreuves plus longues et pénibles, sans jamais céder au désir d'abandon, si fort parfois.
JC

Commentaire de robin posté le 20-03-2009 à 11:00:00

Hello Breizhman ,

Bravo pour avoir surmonté ce moment difficile ! Tu as connu le côté moins agréable de l'ultra, celui qui laisse un gout amer sur le moment, qui s'estompe et puis disparait !

Bonne récup !

Commentaire de la panthère posté le 20-03-2009 à 16:58:00

j'espère que tu fais bien tes étirements, tu sais, ceux qu'on t'a montrés, marioune, ampoule et moi....
chapeau pour ce trail terminé dans la douleur et l'angoisse....et au prochain!!!!!!!

Commentaire de fabzh posté le 20-03-2009 à 18:04:00

Bravo breizhman

quel courage, bon retablissement
fabzh

Commentaire de hellaumax posté le 20-03-2009 à 22:52:00

Enorme ce récit! Vraiment bravo pour ton courage!

Commentaire de ampoule31 posté le 20-03-2009 à 23:43:00

Y'a plein de courses, qui seraient heureuses de te voir ! Ce petit muscle alors ! Il t'en a fait voir de toutes les couleurs, même le lendemain il a fait parler certain(es) un peu de repos et il n'y parraitra plus rien, pour le bide tout le monde y a droit un jour ou l'autre. C'est super d'avoir terminé, bravo. Heureux de t'avoir connue, a bientôt sur une course ou ailleur.

Commentaire de agnès78 posté le 20-03-2009 à 23:51:00

on t'attend pour 2010 dans notre belle région msieur! Bravo pour ta pugnacité et merci pour ce beau récit
au plaisir de te croiser à nouveau
agnès

Commentaire de patcap21 posté le 21-03-2009 à 00:38:00

Superbe récit pour cette course à l'arrache et dans la douleur, sacrée école pour apprendre à puiser au plus profond de soit ces ultras

Bonne récup à toi

@++

Pat

Commentaire de marioune posté le 21-03-2009 à 06:25:00

Très beau récit Michel, mais quelle épreuve, on dirait un chemin de croix...Ravie de t'avoir revue,à bientôt pour une course qui se déroulera différemment pour toi, si tu preds bien soin de toi ..et de ton fessier!!!!bises

Commentaire de artveja posté le 22-03-2009 à 18:07:00

Quel mental!!! il y a des jours avec et des jours sans...et malgré tout ça, tu fais un très bon chrono. Bonne récupération et à bientôt.

Commentaire de jac posté le 22-03-2009 à 19:10:00

Salut Breiz-superman quelle idée de trimbaler Chabal(pourquoi pas oublier tes pompes lol) enfin chacun son truc, dans les portions les plus dures tu es passé sur mon terrain de jeux, j'espère que tu as apprécié, et oui la capitale est dans une cuvette donc entourée par des bosses.
Merci pour ton cr et bravo pour ta ténacité le principal est de finir une telle épreuve je te souhaite une bonne récup et à un de c 4 sur une trace .
Jacques

Commentaire de ampoule31 posté le 23-03-2009 à 14:38:00

Je reviens, suis pas méridional, mais du sud ouest, profond, toute ma jaunesse passée entre les Landes et les Pyrénées Atlantiques. Faut pas confondre. Oui, oui je sais j'suis pointilleux. A+ Breizman.

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