Récit de la course : Marathon de Genève 2008, par yayoun

L'auteur : yayoun

La course : Marathon de Genève

Date : 28/9/2008

Lieu : Genève (Suisse)

Affichage : 1780 vues

Distance : 42.195km

Objectif : Pas d'objectif

20 commentaires

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Mon marathon d'automne...

              Petit retour en arrière: le 20 août, pour mon anniversaire, richissime idée de mes parents...Et si on allait courir le marathon de Genève? Ok, l'hôtel est aussitôt réservé, les inscriptions faites et c'est le moment de se confronter à la réalite: le marathon est dans le 28 septembre: il me reste 39 jours soit 5 semaines et demie avec entre une assistance utmb et un off chez le canard... Un vrai plan de marathon, 12 semaines: bon, ben je vais  faire confiance à mes acquis, espérer avoir progressé et on va faire un programme court mais efficace. Pour ne pas être dingue qu'à moitié ( la vie ne serait pas drôle sinon), je décide de rajouter un objectif: 4h13 qui se transforme au bout de deux semaines après discussion avec le Castor et Jérôme à moins de 4h: et ben, il y a du pain sur la planche comme on dit...

              26 septembre: marathon J-2: j'ai respecté les entraînements, un peu déconné sur les distances, je manque de récupération, j'ai débordé un peu de mon régime alimentaire lors du off chez le khanard, j'ai fait des fractionnés pour la première fois de ma vie, pour la première fois j'ai aussi accepté pendant mon entrainement d'avoir un barge qui me crie d'aller plus vite et de ne pas lâcher et je ne l'ai pas insulté pour ça sauf une fois alors qu'il me faisait refaire une série malgré le fait que j'en avais ras le bol ( Merci Denis et mea culpa , j'ai même accepté d'aller courir dans sous la pluie, ramper dans la boue, j'en passe et des meilleurs, bref, je n'ai  plus grand chose à perdre mais comme m'a dit Martine un jour, il faut souffrir à l'entraînement pour s'éclater pendant la course...

               Mon sac est prêt, j'ai tout en double au cas où (ah, les TOCS du coureur...), mes parents arrivent. On discute, on partage et puis, c'est pas tout ça mais il faut dormir...

              Très mauvaise nuit, je rêve de chrono, de minutes, c'est à peine si je n'imagine pas qu'un chrono géant me dévore ( ah, ce cher Freud) mais le réveil est rapide. Petit tour dans Lyon le matin, départ pour Genève l'après midi. Première bonne surprise: il fait super beau, la température est idéale, ni trop froid, ni trop chaud. Deuxième bonne surprise, l'hôtel est super: un véritable chalet savoyard sur le quai du mont blanc, c'est chaud, chaleureux, on a envie d'y rester pour plus d'une nuit: 

   Mais ce n'est pas encore l'heure de paresser, il faut aller retirer les dossards. 

Troisième bonne surprise: on est à 200m du départ. Je récupère mon dossard 464 et découvre les cadeaux assez originaux pour que je les mentionne ici: le t-shirt traditionnel, un bob mais aussi du shampoing, un purificateur d'eau à fixer sur le robinet et plus rare, un gloss à lèvres qui a le goût des gels aux fruits rouges...Je récupère du coup le gloss offert à mon père et je lui échange contre le paquet de springles. On se tape une bonne honte à jouer les touristes avec nos bobs et on a plus l'air de pêcheurs de perches que de coureurs: 

 Il est l'heure de rentrer à l'hôtel. Petit arrêt devant la carte du resto: fondue, fondue au chocolat, orchestre suisse jusqu'à pas d'heure...mmmm...Mais non, ce n'est pas un off. On sera sérieux ce soir: pizza et  au lit. 

Et là je fais une merveilleuse découverte: la literie suisse: une sorte de couette est glissée entre le matelas et le drap du dessous, je me couche, repose mes jambes, reçoit plein de textos d'encouragements et m'endors comme un bébé, ma tête posée sur cet oreiller si douillet et moelleux...Première fois que je dors aussi bien avant une course...

     6h: le réveil sonne...Hmmm, qu'il est dur de s'arracher à la couette chaude et toujours cette même question qui revient me hanter: pourquoi se lever aussi tôt un dimanche matin???

Mais en même temps, l'excitation est là et il faut aller prendre le petit déj: je suis habituée à courir une demie heure après avoir mangé. Ca fait longtemps que je ne respecte plus la règle des trois heures sinon j'ai faim au départ et la crise d'hypo est assurée...

Je croise deux autres coureurs, marathoniens consciencieux, certainement lecteurs assidus de quelque magazine de courses qui terminent le 2e assiette de pâtes mélangé à du café et du jus d'orange...Ce sera pour moi...J'en rencontre un 3e qui a déja mangé en face de moi hier soir, sourire discret, on fait partie de la même secte, la même galère ou le même paradis...il finira 8e...

   On s'asseoit sur de petites chaises avec un dossier en forme de coeur, j'ai l'impression de déjeûner dans la maison des trois ours ...sauf que je ne suis pas Boucle d'or...Autant au réveil, ça allait mais là le stress commence à monter...Les kikous sont géniaux, je reçois de nouveau des coups de fils, des textos alors qu'en fait, dans le groupe, je suis l'une de celles qui courra la plus petite distance ce week-end là et pourtant, ils m'ont supporté comme si j'étais une grande eux qui sont des champions d'un autre monde...

   Ca y est, maintenant, je suis dans ma course, je retrouve la concentration qui était la mienne avant de passer les oraux de mes concours, la même gnaque qui fait qu'on ne se laissait pas démonter par le jury, mon dieu...je retrouve mon esprit de compétitrice...Aie, ça va faire mal J'écris consciencieusement mes temps de passage sur mes mains: la gauche pour 3h53, la droite pour 3h59'06". De toute façon, je les connais par coeur, j'enlève le surplus d'encre en les passant sous l'eau et voilà, j'ai deux beaux nouveaux tattoos violets. Je suis prête, c'est le moment d'y aller...

      8h: on arrive sur le quai de départ et là c'est magnifique: le soleil se lève sur le lac Léman, les montagnes sont roses, le jet d'eau est à son maximum: bon, là, il faut que j'y arrive: il fait beau, la température est idéale, le parcours est plat, je le connais, tout le monde est derrière moi (ma famille, les copains, les collègues: p**** et si j'y arrive pas, qu'est-ce que je vais mettre sur kikourou, qu'est-ce que je vais dire lundi??? Je reprends ma préparation mentale de l'agrég, je n'ai pas le choix, il faut que j'y arrive), c'est maintenant ou jamais, je n'ai pas le choix, j'y vais et je me fais plaisir et effectivement, je vais m'éclater...

     8h15: je trottine...aie, j'ai mon ischio qui tire, le pied gauche qui fait mal...Et oui, j'ai eu la bonne idée de m'ouvrir le pied 72h avant le marathon...Je cours sur un compeed plus élasto plus disque en silicone pour amortir et éviter la douleur...m'en fiche, ça pourrait être pire...Je repense à cette vidéo que tout le monde a vue de la team Hoyt, j'ai téléchargé le cantique sur mon ipod et je la ferme, j'arrête de me plaindre, j'ai deux jambes, c'est le moment de s'en servir: si elles me font mal, c'est qu'elles sont toujours là et que je suis vivante

      Je vais me placer dans le sas de départ, branche tous les appareils de ma mère, les miens, repère le ballon vert, celui des 4h...J'ai des fourmis dans les jambes, j'entends les paroles d'Ema raisonner dans ma tête: ne lâche rien ma petite Sahara, ne lâche rien et fais toi plaisir, ça marche Ema, je ne lâcherai pas...The Final Countdown commence à raisonner dans mes oreilles... Bisous à tout le monde, bon courage, bonne chance,enjoy, on se revoit tout à l'heure...5, 4, 3, 2, 1...Top

    Ca crie, ça applaudit et on commence en marchant...j'adore cette ambiance, ça y est c'est parti...Je passe sous le portique et je déclence mon polar à ce moment exact: à partir de maintenant, chaque seconde compte...On part devat l'hôtel du Président Wilson qui accueille à présent le conseil des droits de l'homme...Symbolique du marathon, courir, c'est être libre...On suit le quai du Mont Blanc...je me sens bien, je décide d'écouter mon chrono mais aussi mes sensations...Je dépasse le ballon vert et j'en profite pour croiser les doigts et espérer qu'il ne me redouble pas (ça, ça me détruirait le moral...)Je prends mon rythme: le 1er km arrive: 7'05....Malheur, je dois passer en 5'35...mais qu'est-ce que j'ai foutu...Si j'ai déjà perdu deux minutes, c'est foutu...Du coup, en dépit des règles élémentaires de prudence en marathon, j'accélère pour rattraper le temps perdu (ah, la recherche du temps perdu...Elle a pris 7 tomes à Proust, elle me prendra 7 kms mais sans madeleine...)... En plus ma mère me rattrape, on entre dans le centre ville: Boss, Chanel, Gucci mais bon, j'ai pas vraiment le temps de regarder les sacs...Je passe le 2e kilo: 5'10"...Ouh là, je vais trop vite, je fais n'importe quoi...Une petite voix dans ma tête me dit de continuer sur le rythme de 5'35" et puis advienne que pourra...La constance sera ta meilleure alliée sur marathon m'a dit Yoda, je l'écoute, il s'y connait plus que moi...Je continue à mon rythme, on passe devant l'île Rousseau (grr, j'ai toujours détesté Rousseau puis là, c'est pas vraiment le promeneur solitaire), premier ravitaillement, j'ai rattrapé une minute mais je n'arrive pas à passer en 5'35", je vais toujours trop vite, 5'20; 5'25 mais mes jambes ne veulent pas m'obéir et suivent les autres...Je laisse ma mère et continue ma course...On part alors pour un tour dans la vieille ville...Je fais un bout de chemin avec un gars qui court déguiser en pilote de rallye pour faire la pub de son équipe pour le Paris-Dakar...Mais pas évidemment de courir avec un casque sur la tête...Je le laisse et continue d'avancer mais il y a un truc qui cloche, je n'arrive pas à me caler sur une allure quand je comprends enfin mon erreur: au 7e km grâce à un autre coureur....P**** mais quelle tâche...J'ai confondu les kms du marathon et ceux du semi, le marathon était en noir, le semi en rouge, j'ai inversé les deux et en réalité j'ai pratiquement 4' d'avance sur mes prévisions...Alors là, je suis en colère contre moi...Me reviennent en mémoire les mots de certains articles sur marathon: vous paierez toujours un départ trop rapide...Si je me loupe à cause d'une erreur aussi stupide...

      Je pourrais ralentir mais je me sens bien alors je décide de continuer à ce rythme: je ne pense pas à grand chose: je regarde mon chrono à chaque km, j'ajoute 5'30 et je vérifie au suivant que je passe dans les temps. Le parcours change et c'est la première fois que dans une course, je traverse le garage BMW et Audi...Je suis bien en Suisse... Je passe le 10km en 53'.Tiens, la dernière fois que j'ai fait un 10 bornes, je l'avais passé en 59', ça me rassure, j'ai effectivement progressé. Je vais me remettre au 10 kms. Je fais alors la connaissance de Simon venu de Londres et on commence à parler en anglais puisque l'effort l'empêche de réfléchir en français...Au bout de 10 kms, il me demande mon prénom m'expliquant que ça fait dix bornes qu'on court ensemble et qu'il a bien l'impression qu'on va finir ensemble alors autant qu'on se connaisse...

          11e km, on retrouve le lac et on commence à remonter les quais par l'autre côté...le public est nombreux, les participants du semi qui ne partent qu'à 11h nous encouragent et crient notre prénom marqué sur le dossard...ça fait plaisir mais j'en aurais encore plus besoin  à la 2e boucle. Les bénévoles sont des supers supporters, c'est génial...Je repère le 32e km, je me fais la promesse de faire toute cette partie en courant au 2e tour...Je repère un marchand de glaces...Tiens je filerai bien de l'argent à un spectateur pour qu'il m'en achète une pour le 2e tour...Je remonte les quais, j'ai enfin trouvé mon allure à la seconde près, je me sens bien...

       Je croise les premiers qui déjà redescendent puis plus loin mon père...La vue sur le lac est superbe, il y a des très beaux hôtels, j'ai de la bonne musique, je m'amuse...mais comme tout marathon, le mien est fait de haut et de bas et comme j'étais très haut, la chute fait mal...Mon pied me fait mal...ça me brûle et ça ne me quittera plus jusquà la fin...Mon genou gauche commence aussi à souffrir...j'ai une barre en dessous du genou...Mince, au 14e km, ça fait tôt pour avoir déjà mal, je sentais bien que je n'avais pas assez récupéré mais hors de question que ça m'empêche de finir...J'essaie de penser à autre chose, d'oublier la douleur et celle du genou disparat pour revenir par intermittence de manière assez brutale...Le quai me paraît long, qu'est-ce que ça va être au 2e tour...

         Je sors alors ma carte magique...plusieurs prénoms écrits sur la paume de ma main...des mots qui ont une signification profonde pour moi...qui me rappellent mes motivations...ça y est le mental de compétitrice (ou mauvaise perdante au choix c'est pour ça que je fais un sport individuel ) reprend le dessus et ça repart... on tourne enfin.

          Je passe le 15e km en 1h 20'57" au lieu des 1h25 ( je suis à sur une base de 5'20" au km)de prévue et on repart vers l'arrivée du premier semi à 4 km...J'ai quatre minutes d'avance maintenant...Je tiens le bon bout...Je continue avec Simon...un de ses copains nous rejoint, fait un bout de chemin avec nous, nous accompagne jusqu'au semi, les spectateurs sont nombreux et vraiment, ça fait un bien fou...Je passe les 20 avec 6' d'avance, je passe mon semi en 1h 53 au lieu de 1h59'34" et là, je me fais peur ( à mon dernier semi remontant à un an, j'ai mis 1h59): j'ai promis à Jérôme la veille de ne pas le passer en moins d'1h59 et là j'ai six minutes d'avance...et si j'explose sur le 2e semi...Aie, aie, aie ...mais en même temps, ça me rassure, j'ai six minutes d'avance sur mon 2e semi, je ne vois pas le ballon vert.

 

      On repasse sous le sas de départ, j'imagine que je remets les compteurs à zéro, que plus aucune partie de mon corps ne me fait mal et je repars...Je croise ma mère qui me tape dans la main à chaque fois qu'elle me croise...le copain de Simon nous laisse et me confie la responsabilité de l'emmener jusqu'au bout pour son premier marathon (et moi qui va m'emmener jusqu'au bout???? En réalité, un certain nombre de kikous dans mes pensées...). Je lui explique qu'à partir de maintenant, j'ai peur de taper le mur et que donc, je vais réellement respecter 5'35" au km pour me rassurer...je pense aux secondes, c'est ce qui me fait tenir sur les 5km suivants...être la plus régulière possible...ne pas perdre une seconde qui pourrait me laissait croire que mon corps ne suit plus et ralentit...On passe devant un grand hôtel avec concierge et chauffeur...Je monterai bien me coucher et me faire un jacuzzi mais ce sera pour plus tard, il y a une course à finir...

    Il commence à faire chaud,  j'enlève les manchons, je bois plus aux ravitos. Les spectateurs sont plus nombreux...je sais ce qui m'attend...Je commence à comprendre pourquoi on traverse les garages voiture: au 2e tour, on est à point pour acheter une audi, n'importe quoi tant qu'il n'y a pas besoin des jambes pour avancer...Je suis toujours en avance mais au 27e km, aie, le moral chute...j'ai de nouveau très mal au genou, l'impression qu'il se bloque, j'ai faim et je sens que les pâtes de fruits qui marchent très bien en trail ne sont pas d'une assimilation assez rapide pour du bitume...Je sors donc mon gel pour éviter l'hypo qui explique ma baisse de moral et là, autre sale coup, je me mets à saigner du nez et évidemment mon coalgan est dans mon sac de trail...en plus, si je le bouche, je n'arrive plus à respirer correctement...y a plus qu'à attendre que ça passe...

       Le gel fait son effet et les problèmes qui me paraissaient être des obstacles insurmontables quelques minutes plus tôt me semblent tout à fait simples à résoudre à présent...Arrive la première montée de la boucle: je l'ai repérée au 1er tour, elle est au 29km...je pensais marcher mais la course marche très bien alors je fais confiance à mon corps...puis le 30e est là: passé en 2h 43, j'ai toujours sept minutes d'avance...Yes...mais c'est le 32e qui me fait peur...

    On repart pour la remontée des quais...Je croise le semi qui vient de partir, je les applaudis et cela me vaut une salve d'applaudissements en retour...ten, il me mette les larmes aux yeux...tss tss c'est pas le moment... on se concentre... mais il m'ont filé une de ces pêches Simon est toujours là...il tient bien le coup...on aborde le 32 km et là, je suis complètement libérée...je ne tape pas le mur, je ne le vois même pas le murAlors qu'à Lyon, la vraie galère avait commencé là, là c'est le début du décollage pour l'extase...Dans ma playlist, j'ai prévu le coup...Passe eye of the tiger...Je fredonne I want it all de Queen en ayant une banane d'enfer ...ça doit être l'endorphine...je plane à quinze mille...Elvis Presley swingue dans mon ipod et je bats la mesure en remontant les quais...Je recroise les mêmes personnes, les mêmes supporters...le ballon vert est loin...Je sais, je sens que mon objectif est proche et qu'en plus, je peux faire mieux...je me prends à rêver...Je croise mon père...C'est génial, il est avant le ballon du 3h30...il n'y croit pas...Lui aussi se fait peur en craignant d'aller trop vite ...Quand à moi, il me reste 10 bornes et à ce moment là, je m'accroche, j'entends Maria dans ma tête qui me dit de m'accrocher, de bouffer les mecs qui sont devant moi...Des gens commencent à craquer et moi, je cours toujours, je ne marche pas et c'est le cercle vertueux: le moral est boosté, du coup les jambes suivent...Je tourne au 36e km: 3h17'10"...Je suis toujours sur la base de 5'30" au km et maintenant il ne me reste plus qu'à remonter les quais, je vois l'arrivée en face...Je la veux cette arrivée...Ma mère me tape dans la main...c'est bon, tout le monde est dans ses temps, rdv à l'arrivée mais ça devient de plus en plus difficile d'additionner 5'35" au temps enregistré à chaque km, mon cerveau fatigue...

    Je supplie mon corps de ne pas me lâcher maintenant...je promets à mon pied gauche de l'amener voir un podologue pour le réparer...à mes cuisses de les amener chez le kiné dans la semaine pour un massage bien mérité mais je vous en prie, ne me lâchez pas,  pas maintenant...je ne pensais pas pouvoir tenir cette vitesse aussi longtemps...j'ai peur de craquer...mais les kms passent...le 37e...le 38e...le 39e...plus qu'un km et ce sera dans la poche...Je passe les 40 kms en 3h42...il me reste 18 minutes pour faire deux bornes...Je le tiens mon temps et il est hors de question que je le lâche...Je pense à tous ceux qui m'ont soutenue et j'ai envie de leur dire...ça y est, je vais le faire et ce grâce à vous, merci d'avoir cru en moi...J'ai un sourire jusqu'aux oreilles...Simon aussi...on ne perd pas la concentration, les poings serrés...j'ai la gnaque, l'envie et je fais un pari risqué, j'accélère, Simon me fait confiance et me suit...La foule est là, j'entends mon prénom, des allez Sarah, un homme agé en costume et manteau cachemire qui me dit Bravo Mademoiselle, c'est extraordinaire ce que vous faites...pour la première fois dans une course, je vois du respect, de l'admiration dans les yeux des gens (s'ils savaient ceux que d'autres font, les distances qu'ils sont capable de courir), les enfants veulent nous taper dans les mains, c'est extraordinaire...ça me donne des ailes...j'ai l'impression d'être autant encouragé que si j'étais la première...Je m'envole et ce que je ressens est indescriptible...c'est un des plus beaux moments de ma vie... c'est magique...je passe en 4'45" le 1er km...Allez les jambes, c'est maintenant ou jamais...c'est le moment de faire ce sprint, de ressentir ce moment où on est intensément libre, où on a l'impression d'être au dessus de son corps, de tout laisser derrière soi...Du bonheur à l'état pur...Mais en même temps, je me dis, si je craque maintenant ...c'est impossible, je ne peux pas craquer....Il y a une ambiance de folie sur ce dernier km, je vois l'arche...et là je comprends vraiment le sens de ENJOY...je voudrais que ce moment dure toujours...graver dans ma mémoire les sons, les odeurs, les émotions ressenties...j'accèlère encore...je sais que maintenant mon arrivée est filmée...je passe mon dernier km en 4'30" et là c'est l'explosion de joie, je lève les bras, je franchis la ligne en sautant, j'ai réussi...pétard, j'ai réussi...ça y est papa, je l'ai fait: 3h51'34" ( mon premier marathon était passé en 4h50'34")...et toi combien: 3h26.... C'est génial

      Je m'arrête...première fois que j'arrive avec les jambes coupées et le souffle court...ça y est, je suis une vraie coureuse...je n'ai pas du tout marché et surtout à force d'entendre les autres me raconter l'état dans lequel ils arrivent à la fin d'une course, je me disais que moi, je ne devais pas tout donner et j'avais bien envie d'essayer...Mais alors j'aurais jamais du m'arrêter...J'avais pas mal sur les deux derniers kms mais là, ça ne marche plus...J'ai mal aux abdos, aux adducteurs, aux genoux, aux pieds, bref, mon corps part en vrille...je mets trois plombes à rejoindre ma médaille et ma montre mais le sourire est toujours là...je retourne rejoindre mon père à l'arrivée pour attendre ma mère...on refait notre course, on prolonge le moment de grâce...les arrivées de course m'ont toujours émue...c'est beau je trouve de voir ces gens dire je l'ai fait quelque soit la distance, quelque soit le temps. Chacun a son niveau va au bout de lui-même et cette liberté n'a pas de prix...

        Ca y est, ma mère arrive... 4h30...une heure de gagnée par rapport à l'année dernière...tout le monde est content, c'est le bonheur...On part s'allonger sur la pelouse et là, un gars m'embrasse et me félicite...ben, t'es qui toi, on se connaît pas? un kikoureur?     Serais-je devenue une VIP???Ben non, on ne se connaît pas mais on s'est croisé pendant toute la course, je t'ai encouragée, tu m'as encouragé alors félicitations...Super, merci toi aussi...D'ailleurs,le mot félicitation à la même racine que félicité et là, la félicité est totale...

        On va enfin s'allonger sur la pelouse complètement explosés en écoutant les podiums...quand tout à coup on annonce le podium par équipes...1er....2e...3e Les RUNNING STONES...P*****c'est NOUS...Puisant je ne sais où une énergie impressionnante, nous nous levons d'un bond et courons jusqu'au podium alors qu'on arrivait plus à marcher deux minutes avant...On monte sur un vrai podium...C'est cool, c'est impressionnant...on est à côté de vrais champions, les journalistes nous photographient...C'est la cerise sur le gâteau pour couronner un superbe week-end riche en émotions et en partage...

    Et crème sur la cerise sur le gâteau, pour surcouronner (je sais, ça n'existe pas comme mot mais j'avais besoin d'un superlatif) ce week-end, j'apprends en rentrant que je suis 4e féminine sur 20 dans ma catégorie...Je progresse...et j'aime bien les catégories suisses qui font que la mienne s'arrête à 29 ans...

    Bilan: le parcours de ce marathon a été changé et franchement, je lui mets cinq étoiles au GaultMillau des marathons: le parcours est superbe, les gens sont chaleureux et d'un soutien formidable, l'organisation est sans faille même si elle ne se prend pas au sérieux et permet de créer une ambiance assez décalée et très sympathique...bref, un marathon qui ne se prend pas la tête mais qui réjouit vos jambes et fait décoller votre coeur....

   Et enfin merci à tous ceux qui m'ont soutenue, conseillée, aidée, supportée, entrainée et qui ont partagée ma joie après, ça m'a beaucoup touchée (mais chut, faut pas le dire, on va penser que je suis un bisounours guimauve ) avec une dédicace spéciale à Maria, Jérôme, Cédric, Laurent, Alain, Steph, Béné, Caro qui m'ont rassurée et motivée...Ce moment extraordinaire, c'est aussi grâce à vous que je l'ai vécu alors merci, merci, merci...Pour ceux qui n'étaient pas à l'abracadrabra, j'ai réussi à vous sauver deux bouteilles de champagne...

  Et bien entendu merci à ma famille, ma grand- mère qui suit tous nos résultats et les note scrupuleusement dans son carnet tout en s'inquiétant de savoir si tout cela est bien raisonnable, ma tante qui suivait ça derrière son ordi, mes parents bien entendu (et maman, la prochaine fois que tu as ce genre d'idées, essaie de l'avoir 12 semaines avant qu'on s'entraîne en suivant un vrai programme) et mon frère qui a décidé de nous rejoindre dans notre délire et de venir faire la sainté lyon avec nous....

Alors prochain RDV des running stones: la Sainté Lyon courue en famille en relais à 4 l'année dernière, cette année, tous les quatre en solo comme des grands...

20 commentaires

Commentaire de L'Castor Junior posté le 06-10-2008 à 17:48:00

Ah, ma petite Sahara, tu as vraiment fait fort ce weekend là.
Le gloss a-t-il été vraiment utile ?
En tout cas, vivement la suite ;-))

Commentaire de laurent05 posté le 06-10-2008 à 18:31:00

"J'écris consciencieusement mes temps de passage sur mes mains: la gauche pour 4h53, la droite pour 4h59'06". "

la barriere des 4h dure à ce la mettre dans la tête, pas habituée à ecrire 3...
j'attend la suite avec impacience
bravo sarah

Commentaire de yayoun posté le 06-10-2008 à 18:34:00

Merci Laurent, je n'avais pas vu mais c'est vrai c'est un lapsus révélateur...

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 06-10-2008 à 19:23:00

Plutôt haletant le récit ! J'ai bien aimé ce marathon vécu de l'intérieur . Bravo !

Commentaire de pierrototo posté le 06-10-2008 à 19:52:00

Bravo Sarah !!
Je vois que je ne suis pas le seul a m'etre gourré au niveau des kilometres entre le semi et le marathon (bon mon j'etais sur le semi...).

Bravo a toi belle course !!

Commentaire de Jerome_I posté le 06-10-2008 à 20:20:00

Bravo Sarah pour ta course et ton récit. Par contre pas la peine de remercier, tu as demandé des conseilles, écouté mais tu as couru ce marathon avec tes jambes et voilà c'est toi qui es allée cherche ces 3h51...

Bravo et bonne recup (surtout après l'arrancabirra...)

Jérome

Commentaire de taz28 posté le 06-10-2008 à 20:39:00

Quelle famille !!

Ils n'ont plus qu'à inventer une nouvelle catégorie au jeu des 7 familles ...
Dans la famille coureurs, je voudrais la fille : Sarah, celle qui court le marathon en 3H51 !!! :-)

Bravo à toi pour ce marathon, que tu viens de nous faire vivre de bien belle manière..

Taz


Commentaire de GrandSteaKikour posté le 06-10-2008 à 21:19:00

Merci d'avoir partagé ce beau moment de course ; ça confirme la magie des grands marathons, avec cette foule, qui ont la capacité de nous transporter bien loin et nous faire toucher la félicité dont tu parles...
Au plaisir de te croiser sur la route ou sur les sentiers !

Commentaire de Souris posté le 06-10-2008 à 22:07:00

Bravo Sarah!! de l'entrainement, de la gniac, du plaisir, et ça donne un super marathon...

Hi hi hi "Running Stones", c'est également le nom d'une association que j'ai créee il y a quelques années ;-)

Commentaire de bibiche posté le 06-10-2008 à 22:53:00


je vois que les sorties du jeudi payent
bisous
à +
et encore bravo pour ta perf

Commentaire de hagendaz posté le 06-10-2008 à 22:55:00

bravo à toi

Commentaire de agnès78 posté le 06-10-2008 à 22:58:00

tu l'as vraiment mérité sarah. BRAVO!

Commentaire de DJ Gombert posté le 07-10-2008 à 00:31:00

Elle est liiiiibre sarah, elle est liiiiibre, y'en a même qui disent qui l'on vu voler, ... un comble quand même pour la Suisse ;-)

Bravo pour la perf !
Tel père ! telle fille ?

Commentaire de rapace74 posté le 07-10-2008 à 08:42:00

félicitation sarah pour avoir fini ton marathon en moins de 4h !!!! merci pour le champagne ce w-e!! je vois que je ne suis pas pret de devenir un "vrai coureur"..... vu que je ne fais pas de marathon...
bises a bientôt

manu

Commentaire de frankek posté le 07-10-2008 à 12:42:00

bravo pour ton marathon ! et belle progréssion ! ça promet !! encore bravo...récupère bien

Commentaire de Françoise 84 posté le 07-10-2008 à 17:34:00

Merci pour ton récit qui nous fait partager ta joie!! Bravo pour la perf et le podium de "l'équipe" et bisous à vous trois!

Commentaire de calimero posté le 07-10-2008 à 22:07:00

Quelle perf et quel récit derrière, que du bon!!

Ta préparation mentale, tes références philosophiques et littéraires tout y était!!

Bravo à toi et à tes parents, chapeau bas!!!

Commentaire de fabzh posté le 08-10-2008 à 11:44:00

Bravo

Ton récit est passionnant, et ta course bien gérée malgré les ptits problèmes du début.
Finalement un plan de 39 jours ça l'fait non?
En tout cas , à te lire ça donne envie, normalement 2009.....
Bonne récup

Commentaire de speedyzaza posté le 08-10-2008 à 15:36:00

Ma petite YAYOUN si ta maman n'avait pas des idées pareilles comment pourrais tu faire de tes rêves une formidable réalité , la souffrance est belle si on l'a choisit bizooo ta mamankikour encore et toujours !!! et ton papa qui s'accroche

Commentaire de BrunoV posté le 14-12-2008 à 12:54:00

mille Bravos, pour ta perf et ton cr magnifique.
j'en prendrais de la graine pour mon premier marathon dans 4 mois

bruno
http://lacourse.canalblog.com/archives/______compte_rendu_de_courses/index.html

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