Récit de la course : Infinity Trail BackYard - Dijon 2022, par tidgi

L'auteur : tidgi

La course : Infinity Trail BackYard - Dijon

Date : 24/6/2022

Lieu : Dijon (Côte-d'Or)

Affichage : 1051 vues

Distance : 160.8km

Objectif : Objectif majeur

9 commentaires

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La chute du mental entraine t-elle la chute du plaisir ? Ou l'inverse ? Vous avez 4h...

 

Commençons par le concept : courir sur une boucle de 6,7km en 1 maximum.
Toutes les heures, un nouveau départ est donné, si l’on ne se présente pas dans le sas de départ, on est éliminé.
Et ceci jusqu’à ce qu’il n’en reste plus qu’un. Cela peut donc durer… longtemps.

 

Et justement, le côté « je ne sais pas combien de km » ou « je ne sais pas combien de temps », je n’ai jamais connu.

Ce concept, je l’ai découvert il y a moins de 2 ans, quand j’ai découvert (via Kikourou) une édition de la Backyard en Chartreuse. Et pourquoi ne pas essayer ? Inscrit rapidement car il ne restait plus beaucoup de place.
Malheureusement, le Covid avait eu raison de l’épreuve, transformée en « Backyard à la maison » sur un circuit que j’avais tracé dans mon village. Et ceci pendant 15h (le temps d’un couvre-feu levé et pendant que certains allaient acheter pâtes et PQ !!). Très ludique, je me suis dit que j’y reviendrai…

 

Je repère le circuit « Infinity Trail » et la 1ére édition d’une BackYard à Dijon. Tiens ! Tiens !

Début Avril, l’association « Vaincre Parkinson » organise la 1ère édition de son « Trail Tour ». Un circuit de 6,7km et 300m de D+, à faire en 1h15 et en 30h maximum, donc non validé « Backyard ».

Néanmoins, l’occasion de courir pour une bonne cause et de voir comment gérer les temps de pause inter-boucles. Au-delà d’une chouette ambiance, je m’en sors plutôt bien en tenant les 30h pour 24 boucles, malgré des conditions météo assez particulières (neige, pluie, boue).

Bingo ! Dijon sera donc mon prochain objectif sur une « vraie » BackYard.



Cette épreuve aura une saveur particulière, car le circuit se trouve dans un parc dans lequel j’ai appris à faire du vélo, ayant passé mon enfance du côté de Dijon. En plus mon « camp de base » (ma maman) se trouve à une quinzaine de km !

Un contact avec l’orga 2 mois avant, puis avec Mathieu (un habitué de ce type d’épreuve et qui a tracé le parcours – il joue donc à domicile), et me voilà à faire quelques recos seul, ou à plusieurs dont une avec Mathieu 2 semaines avant l’événement. L’occasion de visualiser et de mettre des marques sur le parcours.
N’ayant aucune expérience sur une épreuve « illimité », je me fixe naïvement l’objectif (parce qu’il faut bien un objectif…) de 30h puisque c’est ce que j’ai pu faire 2 mois avant (bien que ce soit sur 24 boucles et avec un temps de récupération plus important).


La veille de la course, je n'oublie pas le rituel glace/chantilly, précédée néanmoins d'une innovation patates douces, un régal !




 


Nous voilà le jour J !

Plusieurs favoris (et favorites), ainsi que beaucoup d’habitués sont là. Je viens apprendre donc…

Et cela commence par l’installation du campement. Ici c’est le salon du camping !



Je fais de suite petit joueur avec ma tente (prêté par mon fils au dernier moment - au vu de la météo annoncée), pendant que d’autres sont là avec barnum, tente debout, ainsi que toute la logistique pour vivre en totale autonomie… Impressionnant !

Mon voisin de campement n’a, lui, qu’un fauteuil, mais il n’a pas prévu de rester au-delà de la 6° heure. On sympathise entre voisins, c’est plutôt bon enfant… Une bonne humeur règne sur le camp. J’aime bien.

Mon fils m’aide à l’installation, et reviendra pour une assistance sur quelques boucles mais quelques heures plus tard.


 

Après un rapide briefing, le départ est donc donné à midi ! Pour un temps illimité…

 

Côté stratégie, j’ai choisi de tourner entre 50 et 55 minutes maxi. J’ai bien repéré les différents points de passage, qui aideront à ajuster la progression.

Ça discute pas mal sur le premier tour. Il fait bon, le terrain est bien sec. Et ça chambre aussi parfois.


Je veille à gérer au mieux mon alimentation, souvent un point faible sur mes ultras. Le ravito chaud proposé toutes les 3 heures par l’organisation est plutôt sur un bon timing : on évite de trop manger.

Pour certains, pas besoin de l’organisation grâce à une assistance de luxe avec repas personnalisé compris.

 

Le rythme est trouvé assez rapidement et les premiers tours s’enchainent bien.

 



La chaleur ambiante a invité la pluie qui s’abat alors lors du 5e  tour, obligeant à - curieusement - courir plus vite (comme beaucoup autour de moi) : je dois me réfugier sous la tente, en décidant de changer de tee-shirt avant le moment prévu.

Heureusement que les jambes vont encore bien. Je me rends compte que, assis sous ma tente, ce n’est pas si simple de gérer, et qu’une assistance sera la bienvenue quand mon fils, accompagnée de sa mamie, sera à nouveau là, soit entre la 6e et la 9e boucle. Cool !

Je profite alors de son aide, ce qui m’enlève un peu de charge mentale et m’aide à trouver un rythme de pause. Une pause très raccourcie mais je sais que si je tourne un peu plus vite, je n’irai pas très loin…

 

Une nouvelle fois, au 7e tour, la pluie s’abat mais là j’ai l’imper kivabien. Mais ce que je n’avais pas prévu - et vu - forcément lors des recos « sèches », c’est l’état du terrain, dont la combe Bessey (dernière descente avant la fin de la boucle) qui s’est transformée en rivière. Mes chaussures de route ne sont plus très utiles, tout comme dans la montée du rucher, devenue plus glissante.
Ce sera donc changement de pneus avec mes chaussures de trail (usées, trouées et qui étaient juste là en secours). Et cela accroche mieux même si je les sens plus lourdes… on fera avec !

 

Mon fils et ma mère me laissent après la 9e boucle et le repas chaud, que le fiston peut aller me chercher avant que je finisse la boucle, afin de gagner du temps. Mon fils se prend au jeu et çà a l’air de lui plaire, c’est cool !
Il n’était pas prévu qu’ils restent si longtemps mais je sens que le lendemain, si je suis toujours en vie, je vais vraiment avoir besoin d’eux. Ils reviendront donc à partir de 9h, soit après la 21° boucle. Je dois donc tenir seul pendant 12h, dont une nuit de 7h. C’est bien de découper ! Yapluka !

 

Pour le ravito chaud de toutes les 3 heures, je décide de laisser l’assiette vers le stand, afin de la récupérer directement pour la remplir à la fin de la boucle et aller ensuite à ma tente. Toujours dans cette optimisation du temps car j’ai vraiment l’impression de peu souffler à chaque fois… En effet je dois revenir en arrière la chercher, aller au ravito et revenir vers mon emplacement.

 

La nuit se passe plutôt bien. Je me mets dans ma bulle avec un peu de musique, et la gestion de mes temps de passage.
Il fait bon, la Lune se lève, les lumières de Dijon, c’est magique ! Je profite !

En plus, il ne pleuvra plus les prochaines heures, le terrain recommence à sécher. C’est top ! Pour l’instant tous les feux sont au vert, malgré la pause raccourcie à chaque tour. Je joue à l’oiseau de nuit…

 

A 3h, 15e boucle, nous ne sommes plus que 18 sur les 102 partants. Autant d’éliminations ? Je ne pensais pas…


Arrive le jour et avec lui une certaine fatigue/lassitude.


D’habitude, sur un ultra, le jour naissant me rebooste, surtout si j’ai passé une nuit en mode semi-comateux.
Ici, le jour fait du bien mais malgré une nuit qui s’est bien passée, je ne trouve pas le « boost » nécessaire.

Mes temps de passage commencent à s’allonger doucement (heureusement modérément quand je compare à posteriori), ce qui me génère un stress supplémentaire en plus de la gestion de la pause. Pour m’aider mentalement, je compte le temps avant l’arrivée du fiston et ma mère, qui pourront œuvrer à l’assistance. Tenir donc...

Néanmoins partir pour 30 boucles deviendrait presque une « expédition ». Donc je découpe par paliers : 18h et on verra, puis 20h, puis 24h… Prendre chaque tour comme il vient…

 

Le terrain ayant bien séché, je décide de repasser en chaussures de route, afin de limiter la fatigue et le poids aux pieds. Ces derniers vont me remercier dans le long-faux-plat-montant-bitumeux –« où il faut courir quasiment tout le temps » !

 

A la 20e boucle, plus que 9 concurrents. Un top 10 pour ma pomme !
C’est bien non ? On arrête là ? Ben non :)

Je vois qu’au départ de chaque boucle, je reste à présent derrière le groupe, parfois avec Franck avec lequel j’ai cheminé sur certaines boucles.

Il est 9h du matin, 21 boucles sont passées, nous ne repartons qu’à 7. Mes « assistants » sont là, mais je ne me sens pas plus remotivé que çà pour la course, le plaisir commence dangereusement à s’éloigner.

Ca s’élimine mais je me sens de plus en plus le petit poucet du groupe, qui doit serrer les dents pour tenir un rythme qui ralentit malgré tout : je tourne en 55’, en ayant l’impression de fournir plus d’effort.

Dans la tête, les 30h paraissent à nouveau lointaines. Je repense très sérieusement terminer sur un compte symbolique = 24h, soit 100 miles (et oui ! Le kilométrage de la boucle est fait pour avoir 100 miles dans la musette au bout d’une journée complète).

 

22 boucles, plus que 6. Courir devient pénible, la foulée s’est bien dégradée.

23 boucles de faites. Je repars derrière avec Franck qui sent qu’il ne peut plus courir au bout de 50m, devant gérer une blessure depuis longtemps.
Il me laisse alors seul, alors que les 4 sont déjà loin devant. Nous ne sommes donc plus que 5. Un top 5 !

C’est alors le tournant du match !

Celui où le cerveau décide de stopper le jeu : cette boucle sera la dernière. Il l’a décidé…
Mais plutôt que me défoncer sur celle-ci, je reste prudent, pensant secrètement que je vais repartir à la suivante… sur un malentendu (?)...

Mes temps de passage sont plus longs (2 minutes de plus), et je me prends presque à stresser à l’idée de ne pas pouvoir valider cette 24e boucle. A priori, je devrais finir en 57 ou 58 minutes. Juste ce qu’il faut puisque je ne pense pas repartir… Et le malentendu… ?...

Philippe (qui finira 3e) me dépasse dans la dernière descente (tiens je l’ai dépassé alors, lors d’un arrêt de sa part). Je n’ai même pas la force de l’encourager. Je profite des derniers points de vue, que je ne reverrai plus...


Le restant de ma petite famille arrive (de Lyon) sur place quand je décide de poser les armes.
Le plaisir n’y est plus, plus de goût : Do Not Finish (DNF !). Il fallait bien un 1er en 15 ans de course…



Je raye donc mon nom de la liste :


L’émotion me submerge ! J’ai l’impression d’avoir raté quelque chose, une forme d’impuissance…
Est-ce le mental ou le plaisir qui n'y était plus ? Une limite ?

 

 


En guise de bilan...

Avec le recul et dès J+1, aurais-je dû abandonner à ce moment-là, même si le plaisir n’y était plus ?

Je suis convaincu que ces limites auraient pu être repoussée en tentant encore 1 tour, puis encore 1 tour. Ai-je été trop intérieur ? Me suis trop écouté ? Ma famille était là, pourquoi ne pas repartir ne serait-ce que pour eux ? Je n’étais pas blessé, juste « détraqué »….

C’est un peu comme ce film émouvant, « la liste de Schindler ». Il aurait pu en sauver plus, encore plus…

 

En tout cas, cela est une belle expérience à la fois :

-          Intérieur : je me suis battu avant tout avec moi-même comme à chacun de mes ultras, mais pas pour rester le dernier ici.

-          Extérieur : en faisant de chouettes rencontres avant et pendant. Nous étions dans le même bateau, chacun avec son niveau d’expérience.

 

Le parcours est très agréable, varié, plaisant.

L’orga est au top avec Maud au micro toujours présente.

 

Bravo ! Je pense que je reviendrai sur ce type de format, peut-être plus plat pour voir, cela se rapprocherait alors de mon expérience circadienne en termes de vitesse moyenne.

Car en ultra avec du dénivelé, je m’étonne encore d’être arrivé à tourner à 7 km/h de moyenne.

 

En tout cas, un grand merci à mon fiston venu m'épauler. Il s'est en plus fait plaisir, une belle complicité père-fils. Top !

Sans oublier ma Maman qui a vibré pour son dingo de fils...

 

 

Merci pour les encouragements, les félicitations, …

 

 

A J+7, la récupération est plutôt bonne.

Puisque j'ai pu m'aligner sur un format Backyard en off dans les Monts d'Or (donc avec du D+), limité à 12 boucles, pour lequel j'ai réussi à en faire 10 (podium des participants !). Une petite sortie de 68 km et 3150m de D+. 


 


En chiffres

102 partants

5° sur les partants avec 24 boucles: https://infinitytrail.fr/resultats-dijon-1/

1 seul finisher avec 38 boucles

 


 

 

9 commentaires

Commentaire de Mazouth posté le 04-07-2022 à 00:01:52

Bravo ! 24h pour une première vraie BY, c'est fort, tu as du potentiel jeune-homme !
Le DNF fait partie du jeu sur la BY, ne regrette rien, le plaisir c'est important #slogan

Commentaire de tidgi posté le 04-07-2022 à 18:46:57

Ah mais y a pas de regrets, çà fait partie du jeu. Merci m'sieur !

Commentaire de truklimb posté le 05-07-2022 à 06:55:42

Bravo Thierry, une très belle première expérience ! Et avoir pu partager ça avec ta famille, c'est top !

Commentaire de tidgi posté le 05-07-2022 à 09:12:51

Sur ce type de format en boucle, c'est super d'arriver à partager, même si parfois la bulle oblige à s'enfermer un peu... et en plus avec le "stress" des courtes pauses... Merci !

Commentaire de BouBou27 posté le 08-07-2022 à 14:23:23

Bravo, ca donne vraiment envie ce genre de format !

Commentaire de tidgi posté le 11-07-2022 à 10:34:36

A essayer en effet, tu ne seras pas déçu ;-)

Commentaire de apollo01 posté le 24-10-2022 à 16:58:46

Bravo pour cette BY!
Je viens de découvrir ce récit suite à mon inscription pour l'édition 2023.
C'est top d'avoir ce retour d'expérience!!!
Je n'arrive pas à trouver le dénivelé sur la boucle, aurais-tu cette information ?
Tu seras sur la prochaine édition ??

Commentaire de tidgi posté le 24-10-2022 à 21:36:35

150m environ.
Je ne sais pas encore si j'y retourne, n'ayant pas encore planifié 2023.

Commentaire de Jokeur posté le 30-10-2022 à 13:35:48

Bonjour.
Félicitation pour ta course.
Inscrit pour celle de 2023 je cherche la trace GPX de la boucle est-ce que tu pourrais m'aider?

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

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