Récit de la course : Embrunman 2021, par Louis_Savoyat

L'auteur : Louis_Savoyat

La course : Embrunman

Date : 15/8/2021

Lieu : Embrun (Hautes-Alpes)

Affichage : 1168 vues

Distance : 231km

Objectif : Battre un record

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Embrunman 2021 – Ici, nulle part ailleurs

 

Embrunman 2021 – Ici, nulle part ailleurs

 

Du temps a coulé depuis 2017, c’est le 4ème CR pour L’Embrunman déjà..

n°1 2017 : http://www.kikourou.net/recits/recit-19693-embrunman-2017-par-louis_savoyat.html

n°2 2019 : http://www.kikourou.net/recits/recit-20906-embrunman-2019-par-louis_savoyat.html

n°3 2020 (en off) : http://www.kikourou.net/recits/recit-21281-embrunman-2020-par-louis_savoyat.html

Et maintenant 2021... bonne lecture :)


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Un gars fait semblant d’attendre sereinement le 15 août.. Bon sans mentir cette course représente un objectif très important depuis plusieurs jours..semaines.. mois.. années ? Depuis un bon moment c’est sûr. La pression est là..vraiment je crois qu’à travers tout ce que j’ai déjà vécu tout domaine confondu : sportif, extrasportif, etc… jusqu’à présent pas grand-chose n’avait déjà représenté autant d’importance..attendez…c’est même sûr : rien ne m’avait jamais autant saisi pendant un temps aussi long. C’était devenu une obsession, un devoir, une nécessité absolue, c’était plus que du « simple sport » pour moi. La barre est mise haute d’un point de vue exigence personnelle, il y a un passé personnel derrière tout cela.

J’ai fait mon possible pour minimiser l’enjeu les derniers jours approchant ce 15 août : « ce n’est qu’une course après tout », « il y a d’autres choses importantes dans la vie.. », relativiser, canaliser au maximum cette envie, en parler avec beaucoup de retenue... La vérité c’est que ce n’est pas une simple course sans faire offense à d’autres organisations mais c’est l’Embrunman ; c’est gros. On le sent, même en restant discret dans l’approche, on vous en parle dans l’entourage, c’est un sujet qui revient sur le tapis malgré vous. Bref le temps passe et vous approche de cette date de mi-août. Les traces de bronzage sur les bras et les cuisses sont déjà bien saillantes.

Je sais que le titre de finisher n’est pas un objectif, c’est plus le chrono que je vais regarder mais pour autant faire des projections c’est très dur sur ce genre de format, ce n’est pas un 10km ou un semi… difficile de faire des prévisions, il y a tellement de paramètres à prendre en compte.

Et oui, il y a des centaines de manières d’approcher la course et de se projeter. C’est 3800m de natation en eau libre départ de nuit, c’est 188km 3600 d+ au-dessus de l’Izoard, c’est 42km 400d+ de course à pied autours d’Embrun avec une côte de 1.5km à passer trois fois.

Une approche sur laquelle je n’ai pas de doute c’est que tout va se jouer sur le marathon. La météo annonce une température supérieure à 30°C en milieu d’après-midi du 15 août. Par rapport à mon passif ici je sais que cela va doublement jouer. Celui ou celle qui pose le vélo au parc trop entamé explosera quelques kilomètres plus tard sur le marathon. C’est inévitable. Je le sais et je suis prévenu. Dès lors cela fait une excuse en moins.

La course est enfin là, c’est le 15 août, le « Mythe » est là.

15 août 2021 : 5h15 entrée dans le parc à vélo, emplacement 1056. Je bénéficie d’un emplacement royal tout près de la sortie du parc. Le parc à vélo a été aménagé avec des rangées dans la longueur donc il est particulièrement long et impressionnant.

Je sais que la natation à Embrun est stable, il n’y a pas de courants les couloirs sont espacés, les bouées sont bien identifiables (une fois que le soleil s’est levé seulement car quand on part il fait encore bien sombre), les combinaisons néoprènes sont bien autorisées, tout roule. 2 tours du plan d’eau sont à réaliser dans le sens antihoraire en contournant les bouées en place par la gauche. Un léger retard va nous pousser à partir peu après 6h (quelques minutes de luminosité en plus, c’est toujours ça de pris).

Le départ se déroule en 3 vagues successives : les dames à 5h45 et quelques vétérans puis à 5h52 le reste des vétérans et en dernier les élites et les plus jeunes. Ce départ en vague aura son incidence dans la course en elle-même. D’habitude le temps me parait très long avant le coup de feu du départ, aujourd’hui c’est allé vite. Peut-être car dans la tactique c’était le marathon qui allait compter. Mais dans l’immédiat il ne faut pas rater la natation, rendez-vous à la première bouée.

 

C’est parti.

Ce n’est pas extrêmement dense et le départ se déroule à bonne allure. Je vais essayer de faire une natation honnête. L’idéal serait de passer sous la barre des 1h en accrochant des bons gars devant.

Le départ en 3 vagues dérange. L’avantage est qu’il permet d’avoir un départ moins condensé avec le départ des nageurs les plus rapides juste devant. Le désavantage c’est le retour rapide sur les moins bons nageurs des premières vagues. Très vite il y a un retour sur eux. Ils ne gênent pas tant que cela mais je perds le visuel sur les nageurs rapides de la première vague. J’ai l’impression qu’il n’y a pas de groupe de nageurs après ¼ de la natation effectuée. Au demi-tour à la bouée du fond du plan d’eau, je nage carrément sur un nageur. A ce moment j’ai compris qu’il va certainement falloir naviguer pendant toute la natation et se débrouiller majoritairement seul. Dommage moi qui était super motivé pour nager au contact et bénéficier de cet effet de vague...pas pour aujourd’hui.

J’ai l’impression d’être facile mais je ne sais pas si concrètement je suis dans mes allures ou alors hors sujet (la semaine d’arrivée dans la région j’étais très loin de bonnes allures avec la combinaison sur les épaules). En étant sincère je crois que je suis plus hors-sujet que vraiment dans le coup à en juger les ultimes séances dans le lac. Je n’ai pas un très bon sentiment sur le chrono final natation mais le temps me parait passer vite au moment d’attaquer le deuxième tour, je n’ai pas d’impression de difficulté.

Le jour est bien levé maintenant, on voit beaucoup mieux et on continu à revenir sur des vétérans des premières vagues. Physiquement c’est toujours bien par contre je dois avouer que je bois beaucoup d’eau, elle est vaseuse et c’est mauvais. Je travaille toujours très seul.

Pas évident de devoir naviguer et remonter comme cela, il faut des solides repères en nageant, nous ne sommes pas en course à pied ou en vélo ou l’on dispose d’un large champ de vision, il faut -être multi-tâche et pas simple. Au dernier demi-tour je commence à sentir que c’est dur et je commence à moins être efficace sur la prise de repères, heureusement c’est la dernière ligne droite vers l’arche de sortie natation bien visible. Je sais que ce n’est pas catastrophique mais pas extraordinaire non plus. Verdict : 1h05 ; c’est juste ok par rapport à l’investissement dans la discipline lors de ces derniers mois.

Transition 1 express le temps de passer les chaussettes au pied (le plus long) et d’attraper le vélo et le reste en 2 min 30 ; en avant ! J’entends mon frère Mathis me dire « allez c’est parfait t’es bien ! ». Il travaille pour les prises de plan vidéos Active Images de l’événement et est un des seuls dans le parc à pouvoir voir ce qui se passe de l’intérieur à cause du huit clos. A ce moment je ne connais pas ma position et je navigue à l’aveugle.

A vélo, la route des Puys, je la connais par cœur, je connais même tout le parcours vélo quasiment par cœur. C’est le genre de parcours que je pourrais raconter dans le moindre détail tellement il est marquant. Les bosses sèches je sais comment les appréhender. Il faut choisir le bon braquet et savoir passer en force par moment. J’arrive vers Les Méans, Saint-Apollinaire et les Rousses, ensuite c’est la descente vers Savines-le-Lac et jusqu’à présent rien à signaler. Le mot d’ordre c’est tranquille. Donc je suis dans des zones de puissances en aisances. Beaucoup de vétérans repris et déjà la densité des concurrents n’existe quasiment plus et j’ai le champ libre pour relier Savines. Ça va vraiment vite dans la descente, développement tout à droite. Je mets la main dans le dos pour aller chercher du solide *1barre Clif.

Maintenant c’est la nationale 94 large et roulante. C’est toujours impressionnant de voir sur le bas-côté les panneaux 150 kilomètres restants à vélo. Sur les portions qui nous mènent à Guillestre je sais qu’il faut éviter de lâcher du jus. Il faut juste bien se caler, économiser trouver les bonnes portions de routes, boire régulièrement. *1gel aptonia cola. Je ne me laisse vraiment pas galvaniser par rien du tout, je ne sais pas encore si c’est une bonne journée d’un point de vue physique ou pas pour moi, je cogite sereinement, je me dis que c’est mon jour. Il n’y a pas de raison : la préparation a été bonne sans accrots donc logiquement ça le fait. *1 demi-barre énergétique maison.

J’arrive dans les Gorges du Guil. Je suis vraiment radin dans l’énergie que je dépense. Je suis vigilant pour ne pas taper de watts trop haut sur le compteur (un peu paradoxale, un peu contre intuitif mais oui c’est ce que je me dis de faire). Mon plan était vraiment tourné vers le marathon, rien d’autres. La phrase que je me suis souvent répété avant le départ : « la natation est une blague tout comme le vélo », je me suis dis « par contre tu vas faire un marathon de l’espace », « c’est ton jour » .

Dans la voiture sur le chemin vers Embrun quelques heures plus tôt j’ai mis le titre  « Madan – Haska », c’est un titre que j’adore mais que j’avais réservé à l’écoute pendant plusieurs mois pour l’occasion. Il est accroché à une dynamique autour de l’Embrunman. Il a fait son effet, j’étais dans un bel état de motivation. Cela vient de là l’injonction « c’est ton jour ».

Dans les gorges du Guil, pourcentages légers 2-3-4% Le piège c’était de griller des cartouches. Jusqu’à présent je n’avais rien donné et je me suis montré très nonchalant. Dans ces portions je retrouve un peu plus de densité au niveau des concurrents. Les gars si vous voulez doubler pour imprimer votre rythme, ne comptez pas sur moi, allez-y !

Je regarde mes watts : ils sont très bas, je ne pousse même pas 200 watts et l’allure n’est pas horrible pour autant, c’est parfait. Les gars qui prennent de l’avance ici se grillent et je me dis que je les reverrai dans l’Izoard (c’est ce qu’il s’est passé).*1 pâte de fruit.

Un gars me dit « on fait jeu égal depuis un petit moment » ou un truc du genre. Il s’appelle Quentin Rivière, c'est mon voisin de parc à vélo, dossard "1055" (pûr hasard).

Au niveau des boissons mes 2 bidons sont maintenant quasiment vides je suis bientôt à sec donc je sais qu’au ravitaillement à Arvieux il faudra en remplir un pour rallier le sommet et ce sera suffisant.

Après Arvieux et Brunissard c’est les pentes les plus dures de l’ascension, là le 39*28 est de mise et je sais qu’une fois que j’aurais atteint la forêt de pin, on retrouvera un petit peu de répit. Je travaille toujours avec Quentin « tu utilises quel braquet ? » – « 34*28, et toi » « 39*28 » « oula tu tires ». Il a raison je suis un adepte du 39*28 sur cette course et même de tirer gros en général mais dans une optique de vélo sur la défensive, une cadence de pédalage un peu plus importante n’aurait pas été du luxe. Bon.. très honnêtement l’Izoard est un passage difficile mais nous ne sommes pas ici à fond, mon cœur navigue autour des 160 bpm, c’est de la gestion et pas vraiment de l’effort.

A plus de 2000m, l’altitude ne semble pas me déranger pas après toute la prépa haute montagne de juillet (voir plus bas « Val d’Isère 1800m : 4 semaines de préparation en altitude »).

En haut de l’Izoard je change mes bidons et je blinde mes poches, j’ai un besoin de St-Yorre à cause de la chaleur et de la peur de manquer de sels minéraux, donc je bois, je fais un arrêt ni express ni trop long. Les deux pieds sur les pédales et ça repart, j’entre aperçois tout juste ma tante j’ai entendu à peine ses encouragements (j’étais vraiment dans mon truc) et je plonge dans la descente.

Pour la descente je m’empresse de prendre successivement *1-2 Tuc *1 œuf dur * 1 barre Mars 1* banane, c’est un peu un numéro de jongleurs avec les mains sur le guidon, dans la poche et les lacets de la descente à négocier mais je sais par expérience que c’est très important de manger le plus possible en haut pour ingérer durant la longue descente. Ce n’est pas toujours facile de lâcher le guidon pour mettre la main à la poche mais ça passe. Ma bouche est remplie, j’essaie de broyer la nourriture à grand coup de mâchoire.

Je suis habile mais je fais une petite faute dans 2 lacets successifs du haut du col, ma roue arrière chasse légèrement à un moment mais rien de grave. Là je fais une grosse descente et ça va très vite jusqu’à Briançon. J’y vais franchement, la descente je la connais je sais qu’il n’y a pas de piège et que c’est juste une perte de vitesse de toucher aux poignées de frein. Je suis content de la manière dont je gère, c’est un point fort de mon vélo car je gagne beaucoup de seconde là ou d’autres se laissent aller et je ne dépense pas vraiment plus d’énergie pour autant. On se retrouve avec Quentin et nous sommes à nouveau sur le même rythme « on est partis pour finir le vélo ensemble ».

Arrivé à Briançon il y a de la circulation et des sirènes de pompiers comme s’il y avait eu un accident et des bouchons et il faut un peu trouver son chemin, pas top mais ça va. Encore une fois je ne pousse pas beaucoup de watts et je suis toujours très à l’économie, les bras bien allongés sur les prolongateurs, on engrange facilement de la vitesse car il y a un vent favorable et c’est vraiment simple de faire un retour sur les gars en vélo de route. *1 barre ovomaltine.

Un petit groupe de 4 se forme, naturellement on se comprend, il faut travailler ensemble, se relayer (attention dans les règles du non-drafting bien sûr !). Quand vous avez un rythme imposé devant par un autre concurrent vous êtes plus confiant, plus efficace, bref on s’entend bien, ça tourne, les kilomètres passent.

On attaque le mur Palon, je laisse partir les deux du groupe avec les vélos de routes avec qui on avait travaillé et reste avec Quentin et nos deux vélos de chronos. S’il y a bien un moment ou le vélo de route est plus avantagé par rapport au vélo de chrono, c’est bien celui-là ! Je suis toujours très avare sur les efforts à fournir. L’effort perçu dans cette côte raide n’est pas extrême, bien-sûr ce n’est pas facile mais ça reste très raisonnable. Le vélo est entrain de passer vite et j’engrange de plus en plus de confiance pour le marathon car je ne sens absolument rien au niveau des jambes, j’ai de la fraicheur, c’est un peu insolent de dire cela après 160km mais c’est le plan. Donc c’est bien.

J’échange toujours avec mon acolyte du vélo il a un peu mal aux jambes apparemment. Il me demande comment j’appréhende la suite et je lui dis que j’en garde sous le pied. J’apprends que c’est son premier format XXL, c’est très costaud ce qu’il fait (plus tard je verrai son temps marathon à pied, c’est très solide pour un classement monstrueux...).

Vers Réotier la chaleur continue à augmenter et la fatigue commence légèrement à arriver. Je pense que la température me fait plus de mal que les jambes en elle-même. Autant en profiter pour faire un bref arrêt à l’ombre pour me vider la vessie, ça fait un moment que j’y pensais.

Maintenant je suis à la recherche du prochain point ravito et le temps commence à me paraitre un peu plus long d’autant plus que cette fois je suis vraiment isolé, seul au monde. *1 barre Clif ou 1 pâte de fruit (je ne sais plus). Je demande à une personne au bord « Le prochain ravito ? » « je ne sais pas », le suivant pareil, celui d’après pareil. Je commence à m’agacer un petit peu, j’ai moins de repères et je vais avoir besoin de faire un plein, j’ai la bouche sèche et nous ne sommes qu’en début d’après-midi et la température va continuer à grimper.

Je vois un bénévole vers saint-Clément et là ça y est « ravitaillement à 50 mètres sur la droite » Le plein pour 1 bidon de Saint Yorre et la boisson Iso Punch Power . Ça va mieux et je sais que je me suis refait une santé et qu’il va être possible de continuer à nouveau sereinement, on approche du retour sur Embrun, je suis pressé d’y arriver même si, je roule en dedans.

Dans des portions défavorables un groupe de 4 revient sur moi, je ne suis pas un gars très performant dans les faux plats exigeants donc cela ne m’étonne pas. Comme on a retrouvé de la densité un arbitre nous passe et siffle pour exiger de la distance entre les concurrents vis-à-vis de la règle du non-drafting, pas toujours évident sur ces routes étroites.

Je vois encore 40km restants (quand même !). On redescend sur Embrun et avec le Chalvet en point de mire. Ce sont des portions descentes ça devrait passer vite... et ..c’est le cas. Je m’arrête à l’ultime ravitaillement à Pont-Neuf car apparemment c’est le dernier du jour à vélo.  *2 TUC. Il me faut de l’eau et aussi je prends du Coca frais (normalement j’évite le Coca mais comme il est frais je remarque que cela me fait du bien et j’en reprends). C’est toujours intéressant d’avoir un apport en sucre rapide juste avant le dernier écueil.

Là une bénévole me demande si je connais mon classement. Je ne me suis pas vraiment posé la question depuis la sortie du parc à vélo. Elle m’annonce dans les 70 premiers.

Alors là…je n’y crois pas.. je suis un peu stupéfait, ça donne un coup de boost moral… mais comment ça se fait sérieusement…il y a un bug…je n’avais vraiment rien poussé jusqu’à présent (je pense que la bénévole s’est trompé et a dû laisser passer un sacré nombre de concurrents à travers la passoir dans son comptage). Au moins je suis boosté pour monter le Chalvet.

Je repars. D’un coup le bouchon d’un de mes bidons explose mais son contenu est quand même utilisable. Je vide le surplus qui risque de s’échapper du capuchon. Le Chalvet se passe bien, je ne grille toujours pas de cartouche et je trouve du plaisir, j’ai mes repères et je sais quand la montée se termine car je l’ai repéré dans le détail trois jours plus tôt, tout est bien calibré *1 TUC très rapide et je viens reprendre de l’eau froide à la fontaine du haut du Chalvet avant de faire la descente.

Pour entamer à pied je souhaite que mes réservoirs soient pleins et ça passe par l’anticipation. Les derniers kilomètres vers le parc à vélos sont gratuits et ça va vite. Je vois un gars desserrer les boucles de ses chaussures pour détendre un peu ses pieds. Il a raison. Je m’exécute aussi.

Qu’est-ce que j’apprécie cette fin de course, c’est facile. J’ai laissé quelque forces dans l’Izoard et Réotier mais je n’ai grillé aucune grosse cartouche, je suis conforme au plan, c’est toujours bien.

Le parc à vélo est là, 7h19 proche des bases de 2020 lorsque je l’avait fait en off où j’avais beaucoup moins calculé. Je savais pertinemment que je le vélo était la discipline où j’allais ressentir le plus de facilité sur le triathlon. 26km/h de moyenne avec les arrêts et en étant assez avare sur les efforts dans les portions défavorables. En poussant pour faire un chrono et en me rentrant dedans dans les bosses, sûrement qu’il est possible de le boucler à plus de 28km/h de moyenne. Néanmoins c’était très bien comme cela.

C’est le Marathon maintenant, c’est ce pourquoi je me suis tellement investi en course à pied c’est dernier mois. C’est le cagnard que je vais affronter. C’est des mauvais moments du passé à outrepasser. C’est des moments où j’ai eu tellement de défaillances aussi. C’est un moment clé pour moi. C’est là où je souhaite pleinement m’exprimer. Je l’attends depuis tellement longtemps, c’est une bataille qui s’annonce. C’est ma bataille. Je suis prêt.

Je pose le vélo, le parc à vélo est très peu rempli, à peu près 1/10ème ou 2/10ème de sa contenance, je ne sais pas, j’ai du mal à évaluer, je n’ai pas eu la présence d’esprit de relever mon temps à l’arche.

Je prends plus mon temps qu’à la T1, je m’assois j’ouvre la glacière, je prends mes flasques ISO, boit 33cl de Saint-Yorre, casquette, je change de lunettes, de chaussettes, les plaques carbones Saucony aux pieds, j’enlève du sel sur mon visage, je me rince car je veux attaquer dans de bonnes conditions. Maintenant ready.

 

Ça y est, c’est parti.

La course commence.

Je sors du parc est là on est en route sur le sable de la digue, pas de doute, on est bien à Embrun, mes poches sont surchargées avec mes flasques dans le dos et ma nutrition. Un mars tombe je le ramasse et je le cale sous l’élastique de ma cuisse de tri-fonction, je ne le mangerais jamais mais je sais qu’il est là.. c’est psychologique.

Le parcours à pied a été légèrement modifié, on va beaucoup plus loin sur la digue pour aller chercher l’aller-retour car la fin du tour à pied de 14 bornes est raccourcie et emprunte une courte portion en sous-bois cette année. Il n’y a pas encore trop de monde, j’ai un dossard autour de la taille, je suis en tri fonction, j’ai tout ce dont il me faut, apparemment je suis dans le coup et je sais ce qu’il m’attend. J’ai vu mon frère qui shoot les participants appareil à la main, « Si je rate mon marathon je suis une tarl****. » je lui ai lâché ça. Je ne me donne pas vraiment le droit à l’erreur ; pas aujourd’hui.

Comme souvent c’est bien le premier tier de la course qui est le plus difficile à gérer : vous êtes encore trop loin de l’arrivée pour envisager quoique ce soit (penser à la ligne c’est prétentieux à ce stade) pourtant vous avez déjà accomplie une bonne partie de la course... mais comme dis mon plan, la course commence au marathon…donc je suis au début de la course !

Après l’aller-retour sur la digue je jauge et je reconnais Etienne Diemunsch et quelques mètres plus loin le croate Andrej Vistica que je croise dans l’autre sens, ils ont plus de 20 kilomètres d’avance et ils doivent être train de se battre pour une place sur le podium. Cela veut dire que je vais assister à leurs retours et assister aux premières loges au spectacle, c’est top !

Pour le moment j’adopte toujours une tactique très défensive, je me suis mis en route je ne regarde pas encore avec insistance mon allure à la montre. Le premier ravito arrive en bas de la côte Chamois et je sais que je ne vais sûrement pas faire le demeuré à sauter les ravitos sur ce marathon (je ne crois pas si bien dire). Je me demande quand les élites vont me reprendre car ils n’avaient qu’une à deux minutes de retard sur le départ du marathon. Avant de quitter le ravitaillement, il y a des acclamations et je comprends que c’est Diemunsch qui passe. Je me retourne et je vois qu’il y a Vistica à quelques longueurs et je suis parti pour faire la bosse avec lui.

« Diemunsch not so far away »,

Vistica c’est un athlète que je suis. Un taulier d’Embrun chez les pros. Il n’a vraiment pas l’air fringuant et il ne court pas plus vite que moi dans la bosse donc bon ça me va de rester à côté, c’est un top athlète et je sais que c’est un excellent coureur à pied qui est capable de passer le marathon d’Embrun en moins de 2h55 (il va finir 3ème et faire tomber son record sur l’épreuve).

C’est clairement un moment privilégié qui me fait oublier que je ne suis qu’à peine au quart de marathon, je passe aussi la montée dans la rue piétonne d’Embrun dans sa foulée et on va chercher le ravito. Je le laisse partir car ce serait aller dans le mur que d’essayer de le suivre encore plus longtemps d’autant plus que c’est le genre de gars à courir en 3’50’’/ km dès que les portions sont plus favorables.

Je ne souhaite pas m’exploser les muscles donc patience et sagesse sont encore de mise. La descente passe bien, je n’ai pas mal aux jambes, je pense à l’alimentation, cela fait un moment que je n’ai pas pris quelque chose. Donc, *1 gel cola avec de l’eau, oula il ne passe pas facilement !

Ça y est on quitte un peu la civilisation pour aller chercher la portion à l’opposé d’Embrun, dans les champs, dans la pampa, c’est la portion de la solitude. Là il fait vraiment très chaud, c’est une fournaise, le sol réfléchit le soleil, l’air est chaud, il n’y a pas de vent, la boisson chauffe très vite dans les flasques, je sais que la fatigue s’accumule très vite ici, mais il n’y  a pas d’échappatoire, il faut avancer, c’est tout.

Lors du dernier ravitaillement, j’ai eu du mal à trouver ce dont j’avais besoin, tout était chaud et me paraissait imbuvable, je sens vraiment la surchauffe moteur, ce n’est pas très bon signe mais ça va encore je suis loin de l’agonie. Mais là j’ai des débuts de nausées après le passage sur le pont de l’autoroute.

Je cherche à trouver un coin tranquille sur le bas-côté. Je suis genoux à terre, j’aimerais bien que cela sorte pour repartir. Je perds bien deux trois minutes ici, peut-être plus je ne sais pas. Je marche sur 10-20 mètres. Je cherche des boissons fraiches au ravito mais sans succès. Allez ! Il faut bien avancer tu as fait 12 kilomètres déjà et maintenant tu vas pouvoir retrouver des parties plus fraiches vers le parc à vélo. Enfaite j’ai l’impression que la pire des sensations c’est quand je marche plutôt que quand je ne cours…

Je boucle le premier tour, ça va mieux car les portions sont un peu plus ombragées. Je me refroidis un peu et je demande de la boisson froide, cette fois il y en a bien donc je profite même si je perds du temps.

Quand je passe à côté de l’arche d’arrivée avant de récupérer le premier bracelet orange du deuxième tour, je vois le chrono : 10h00 de course. Ça fait « tilt » dans ma tête. J’explique pourquoi plus tard.

En 2017, j’avais calé mon premier marathon d’ Embrun en 4h20…mais comment est-ce que j’avais pu faire ?? Un 4h30 dans ces conditions serait bien cette année.

Au niveau des allures je suis constant et je suis en moyenne sur du 5:00/km -  5 :15/km donc ce n’est pas ridicule. Sur la digue la température a encore augmenter il doit être 15h dans ces eaux là, le soleil tape très très fort. Je vois qu’il y a des robinets sur le bas-côté et des athlètes qui s’arrêtent.. Je fais de même pendant 30-45 secondes et cela me fait vraiment du bien. *douche 1 Le retour de la digue : la même chose *douche 2. Je prends aussi une éponge que je cale dans une poche derrière la nuque.

Je vais bientôt attaquer la deuxième côte Chamois. Je me dis « si tu peux courir dans la côte alors court, cela sera bon signe ! ». J’ai chaud avant de rejoindre le ravito du bas de la côte, il y a une douche de l’orga je fais encore un arrêt pour me rafraichir la nuque *douche 3, petite erreur j’ai mouillé mes chaussures et chaussettes, c’est trempé, cela risque de créer des frottements, tant pis, au pire des cas elles ne vont pas mettre très longtemps à sécher avec la chaleur qu’il fait.

Avant d’aborder la bosse je suis dans un moment dur, je vais avoir à nouveau des nausées avec la chaleur. C’est inévitable. Prendre du temps à l’ombre me fait beaucoup de bien de même que de me rafraichir. J’essaie les quarts de citrons au ravito et c’est pas mal, ça me donne de la fraicheur en bouche, je l’avoue à ce moment je suis un peu à la recherche de l’aliment mystère qui me fera le plus de bien.

Le problème en réalité c’est bien la surchauffe moteur, je refuse de croire que la solution serait d’alterner de la marche-course dans les temps faibles : lorsque je marche je trouve le temps très long, c’est démotivant et peu valorisant pour l’égo. Il n’y a pas d’air, et comme au premier tour ce sera surement plus dur de marcher que de garder le rythme de croisière en 5:00/km. Que faire ?

Là je me lance un gros pari. J’ai la chance de courir à bonne allure (quand je cours), sans faire de fausse modestie, j’ai une grosse VMA, j’ai accumulé des très grosses séances fartlek avec le CA Montreuil 93 durant l’hiver, et sur piste à l’Insep avec mon groupe (merci Achour K.), je vaux au moins 33min sur 10km donc les allures élevées ça va, je sais que je l’ai déjà fait et que ça tient, je suis très confiant là-dessus. Donc je me suis dit « tu vas courir fort entre tous les points ravitos, tu marqueras les arrêts sans en sauter un seul et tu prendras une grosse douche sur la nuque et visage et de la boisson fraiche ». J’ai mis 2km pour valider définitivement la tactique pondue sur le terrain. Je vais m’y tenir coute que coute.  

La deuxième montée côte Chamois passe bien. Je n’ai pas mal aux jambes. *douche 4 en haut. La descente passe bien aussi. Les kilomètres défilent peu à peu, avant d’attaquer le 2ème passage désertique du marathon, j’ai demandé à un jeune bénévole de me vider une bonne dizaine d’éponge sur la nuque *douche 5. J’anticipe pour trouver des boissons fraiches : iso, saint-yorre et un peu de coca.

Ce mix là fait que je suis maintenant ballonné (mais le pire c’est de risquer la déshydration et cela c’est impensable), j’ai des nausées sous le soleil. Je rejoints le même point où je m’étais agenouillé au tour précédent, je me rafraichis la nuque *douche n°6, je bois un peu d’eau et là je sens qu’il y a un surplus de liquide, à nouveau je suis à genoux et cette fois-ci ça sort. Un bénévole s’inquiète mais ça va. La sensation de malaise je l’ai déjà connu à Embrun, cette sensation où le corps ne répond plus, celle où il y a un trou noir total mais là ce n’était pas ça. Je retrouve le sourire ça va tout de suite mieux.

 Bénévole : « tu veux quelque chose »

« Plus rien ne passe, je ne peux prendre que du liquide là. »

« Il faut que tu tournes au coca, c’est ce que je fais moi dans ce cas-là. »

Il a raison.

Je suis d’accord avec cela même si le coca c’est acide, j’ai besoin de sucre rapide et le goût passe très bien quand j’ai la nausée par rapport aux autres boissons ISO.

Je suis au 26ème kilomètres, il ne reste bientôt plus qu’un tour, alors on va pouvoir commencer à jouer. Clairement la tactique course tempo et arrêt 100% des ravitos/fontaines est efficace, elle fonctionne à merveille.

Fin 2ème tour 11h30, au chrono de l’arche j’ai mis 1h30 pour le tour 2 avec les arrêts généreux. Je commence à réfléchir au chrono sous les 13h, ce serait beau quand même !

Il y a une seconde petite voix qui me dis aussi que si le chrono affiche 13hxx ce serait aussi pas mal et que tu t’assureras de finir entier. Mais un chrono avec un 12hxx a quand même une très très belle saveur !

Je vais voir…

Mais rapidement je n’oublie pas pourquoi je suis venu ce 15 août, pourquoi est-ce que j’ai autant travaillé à pied ces derniers mois. Je suis dans la bataille. J’ai trouvé la bonne tactique vis-à-vis de la chaleur, j’ai encore de la ressource, je cours toujours dans les bosses, j’ai des plaques carbones aux pieds et ce sont des allures qui sont largement dans mes cordes. Donc pour résumer si je maintiens cette allure, que je time correctement mes temps d’arrêts aux douches/fontaines, la logique veut que ça passe donc vas-y !

Sur l’aller-retour de la digue le ciel commence à se couvrir à croire que les éléments sont avec moi. Si le ciel est voilé pour le dernier passage dans la solitude à l’opposé du circuit la température ressentie va tomber de 2-3°C donc sous les 30°C et je dirai certainement aurevoir les nausées. Je croise les doigts. Douche 7 et 8.

Avant la dernière côte Chamois je trouve une boisson ISO Menthe fraiche, elle passe bien au goût. Je gère la montée en étant fringuant, je n’ai pas faibli sur l’allure à pied, au contraire, dans la montée de la rue piétonne aussi ça va très bien. Je me suis vu dans la vitrine des boutiques le corps penché en avant, éponge mouillée derrière la nuque j’ai compris que la foulée était bonne et que pour les parties courus, oui ça avançait. Douche 9 en haut de la bosse.

La descente se fait toujours lucide, j’arrive bien à réfléchir, j’ai les repères et ça y est, le décompte s’installe. 11 kilomètres, 10 puis 9 j’ai les jambes un poil lourdes ; elles commencent à montrer les premiers signes faiblesses super tard. Elles furent vraiment solides à vélo et à pied en encaissant toutes les côtes sans broncher. Sur le off de 2020 j’avais les mollets en feu et je me souviens les avoir même plonger dans les bassins des fontaines, là rien, pas de douleurs ou presque rien...

Je me dis « quand tu auras atteint les 5 derniers kilomètres en réalité il ne t’en restera plus que 3 car les deux derniers c’est le finish ». Je cogite beaucoup, je ne cesse de regarder ma montre les calculs fusent et à priori ça devrait le faire sous les 13h si mon corps ne me lâche pas. Les derniers arrêts fontaines ravitos sous toujours très timés : 30 secondes max et je suis rigoureux avec cela. Pas question de lâcher 45 secondes de trop à trainasser devant un stand à chercher je ne sais quoi. 45 secondes c’est passer d’une allure footing en 5 :00 à une allure tempo marathon en 4 :15 au kilomètres : c’est énorme. Douche 10 avant d’attaquer l’ultime portion difficile.

J’ai passé le dernier passage compliqué sous le soleil voilé. La météo est avec moi ! Douche 11 la montre en main. Elle a duré 20 secondes, c’était la dernière et je sais maintenant que c’est un boulevard qui s’ouvre.

C’est la dernière longue ligne droite vers le parc le long de la Durance. Je repère mon frère qui a eu la bonne idée de venir à ma rencontre en vélo. Il affiche un grand sourire.

« Putain super ça ! C’est lourd ce que tu as fait ! Super course ! »

«  Merci Mathis ! » 

« A un moment tu as disparu des tablettes, on pensait que c’était mort et après tu es revenu, c’est bon…profite maintenant profite, savoure ! »

On court un peu en 4 :40/km et là je sais que je suis en dessous des 13h et que j’ai une grosse marge. Dernier tour en 1h17 malgré les arrêts. 4h17 temps total marathon avec ses 30°C. Boom ! Le tapis bleu et l’arche, Je m’allonge et j’essaie de réaliser. Je prends mon temps, voilà c’est réussi. 12h50min19’’

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Je n’étais plus trop pressé de quitter le tapis bleu, au début par bonheur, ensuite car je suis allé dans la tente médicale juste à côté pour trouver un lit. Bilan>transport vers centre médical>perfusion. J’étais somnolant, je savais qu’il n’y avait pas d’inquiétude et que c’était de la fatigue, mon frère le savait aussi.

Merci l’organisation, merci les bénévoles. J’ai poussé très loin sous le cagnard. Mon dernier tour m’a fait gagner 20 places, c’est le 68ème temps sur le 3ème tour. J’ai finit plus fort la deuxième partie de la course que la première.

Je suis classé 125ème. C’est cool, c’est une satisfaction pleine.

Au final j’ai suivi un plan qui s’est avéré payant, j’ai géré comme il fallait la surchauffe moteur (je sais maintenant que je suis sensible aux températures très hautes et qu’il faut trouver de la fraicheur sur les efforts longs). Je ne regrette pas de m’être aujourd’hui bridé sur le vélo. C’était ce qu’il fallait faire. J’améliore de 40 minutes par rapport à 2017, un chrono amélioré dans les 3 disciplines et malgré des conditions de courses moins évidentes. Les progrès sont confirmés et ça j’apprécie. Je souhaitais croire que cette édition serait la bonne, c’était long mais après persistance c’était en effet la bonne.

Alors tout n’est pas parfait mais tout de même… c’est un sentiment de fluidité qui a régné aujourd’hui, je savoure car j’avais ouvert un nouveau cycle en 2019 pour essayer de faire mieux que 2017 car la course m’avait manqué. Cette année en 2021, je n’ai pas eu le sentiment d’avoir été réellement extraordinaire. A aucun moment je n’ai jamais eu le ressenti de toucher le fond, c’était fluide, c’était une course gérée avec justesse. Je n’ai pas fait d’erreur. Vous faites une erreur vous le payez comptant. Ici, tous les détails comptent.

Le résultat est important car il va servir de point de repères pour le reste…Pour être bon sur Embrunman il faut être un excellent nageur, un excellent cycliste et un excellent athlète dans les trois disciplines. C’est la petite conclusion personnelle de l’année, je ne vois pas d’autres chemin.

En 2017 j’étais bluffé par les athlètes du top 100 c’était des machines et le top 20 eux des extraterrestres. Maintenant avec 2021, ces perceptions personnelles ont un peu évolué ils ne le sont plus ou alors plus autant. J’apprends et je comprends, les choses sont plus concrètes : le concret, c’est vivre l’instant, avoir une expérience de ce qu’il s’est produit dans les moments bons et mauvais, c’est ce qui permet de progresser. Je sais que les limites sont encore assez lointaines.

Embrunman quelque part c’est une démarche très égoïste mais c’est ce que j’aime bien : dans la vie en général on peut obtenir beaucoup en fonction de ses racines, du milieu duquel on est issu etc... Concourir à Embrun c’est quelque chose qui ne peut pas s’acheter (..bon bien sûr si le dossard à l’inscription..). Mais ce que je souhaite exprimer c’est qu’il n’y a qu’une seule manière d’aller chercher le résultat : en se présentant au départ et en se battant contre ce fichu parcours. C’est de mettre son corps et tout ce qu’on a en soi sur la table pour aller chercher le bout. C’est nager, appuyer sur les pédales et courir, c’est tout.

Maintenant la médaille est là, le tee-shirt est là, mais surtout le chrono est là. C’est un repère pour moi c’est presque un cap à attendre dans une vie. C’est comme un symbole de réussite et maintenant je sais que dans les moments futurs qui seront durs, quel qu’ils soient, il y aura toujours cette fierté-là.  C’est une ressource exceptionnelle de se remémorer tout le bonheur vécu. De même c’était important de tout retranscrire dans le détail, pour avoir ce souvenir. Il faut aussi éviter de se dire que seule cette course peut provoquer un grand niveau de satisfaction sportif, il n’y a pas que Embrun dans la vie non plus...loin de là. Maintenant, mes prochains défis seront de réussir à trouver de tels niveaux de satisfaction autres part, je le jure ! Mais pour conclure voilà pourquoi c’est égoïste car ce chrono-là…c’est bien le mien et il me collera à la peau toujours. Personne ne pourra ne me le détacher.

Embrun, ici nulle part ailleurs.


Louis


Louis Savoyat Embrunman 2021 12h50min16

 

(merci à mon ami Emiliano pour la création de la vignette)

 

Et maintenant ?

Dans la natation après 200m j’étais content d’être là dans ce plan d’eau et je savais que j’allais réaliser un parcours connu sur le bout des doigts, il fallait que ce soit cette année.. vraiment ! Je m’en serais vraiment voulu si j’avais raté le marathon et je n’aurais sans doute pas été heureux avec un temps au-dessus des 13h30.

Maintenant pour gérer un post Embrun, il faut faire attention à récupérer, à ne pas se blesser, à retrouver des intensités plus élevées mais ce qui est surtout dur c’est le petit vide qui s’instaure. Cela sera sans doute plus facile car j’ai le sentiment du devoir accompli maintenant. J’ai presque « maudit » mon hold-up de 2017 en 13h30, il sortait de je ne sais où et pour avoir l’ambition de revivre ce truc de fou cela passait par faire mieux.

Alors oui je n’ai pas été très généreux dans les efforts, oui j’en ai gardé sous la pédale, oui la natation aurait pu être meilleur, oui peut-être qu’avec un coup de poker cela aurait aussi pu passer tout en poussant plus, en étant moins timoré et plus insouciant. Néanmoins c’était le juste choix. Je pense que je suis plus heureux qu’en 2017 et je préfère retenir Embrunman 2021 que 2017 car le challenge était plus grand : celui de revenir en ayant progresser. Je réalise peu à peu et c’est beaucoup d’émotions qui s’entrechoquent.

Alors c’est sûr c’est une course qui marque une vie et je vais sûrement de suivre de près les éditions suivantes mais je suis particulièrement bien aujourd’hui avec cela.


Quelques retours sur les chronos : 



 

Natation avec une allure de croisière modeste et non des plus uniformes, quelques doutes en deuxième partie de course sur le choix du cap. L’allure n’est pas mauvaise en elle-même mais mériterait franchement de passer sous les 1 :25/100 avec (beaucoup) de travail. 

 

https://www.strava.com/activities/5803078920/segments/2862408023791417562

Pas de remords pour les watts aussi bas qui dénotent une bonne maitrise du parcours. Les watts dépensés ne valent selon moi pas du tout la vitesse moyenne. Les zones d’efforts sont très basses et il n’y a pas de pics significatifs (647w max = les coups de cul de la première boucle). Des zones un peu plus élevées au cours du passage d’ Arvieux et Brunissard.  Exploitation maximale de la position aéro après Briançon dans les faux plats. Bref, à l’économie quasi-totale.


Pour le marahton, le 1er arrêt à genoux est finalement plus important que juste 2-3 minutes pour finalement pas grand-chose, on aperçoit à peine le 2nd arrêt nausées.

Tactique des 100% arrêts ravitos et/ou fontaines bien illustrée par le schèma en « code barre ». Je compte entre 10 et 15 arrêts. Les allures pour les parties courus sont intéressantes, uniformes et déclinent très peu avec la variation de pentes du parcours, on ne perçoit même pas les trois passage de la côte Chamois.

 

Je m’étais engagé en 2020 à travailler pour trouver la solution pour être beaucoup plus solide à pied sur le long et ne pas avoir de gros coup de mou, cette fois c’est fait. Avec Embrunman 2021 j’ai une course pleine où j’ai le sentiment que les 3 temps sont (même sans être exceptionnels) plutôt décents et honnêtes. Cela ne m’était jamais arrivé quel que soit la distance, il y avait toujours un temps faible et un manque de consistance à un moment donné sur la course. Là ce n’était pratiquement pas le cas. Cette fois je peux dire que j’ai une course de référence et pas n’importe laquelle. La priorité à l’avenir sera la natation pour gagner en densité et être à l’aise sur des grosses allures comme je l’ai fait cette année en course à pied. Il y a tellement d’autres choses à découvrir et à aller chercher… 


 

L’alimentation ; composante clé à Embrun :

 

 

Pack de start + T1+ Ravitaillement Izoard + T2 :

Liquide :

-        1*0.75 cl Boisson Iso Apurna Fraise

-        1*0.75 cl Boisson Iso Eafit +3h gout neutre

-        1*1L Boisson Iso Apurna Fraise

-        1*1L Boisson Iso Eafit +3h gout neutre

-        1* 0.5 cl de Saint Yorre

-        Flasques 2*250ml boisson iso et autres

 

Tout ce qui avait été préparé en liquide = tout bu

Solide :

-        3 gel aptonia long effort cola = 2 pris

-        1 gel aptionia beurre sale = 1 pris

-        2 barres Clif (macadamia et beurre de cacahuète) = 2 prises

-        4 pâtes de fruits (fruits rouges, poires, orange) = 3 prises

-        2 barres Ovomaltine = 2 prises ?

-        1 pain d’épiceè = 0 pris

-        2 Mars (aliment plaisir) = 1 pris

-        2 œufs durs = 1 pris

-        1 banane = 1 prise

-        Sachet tuc = environ 5-6 tucs mangés au total

-        2 Barres énergétiques maison = 1 prise

De l’organisation

-        Quarts de citron = 3 ou 4

-        Quarts d’orange = 1 ou 2

-        Boisson ISO menthe punch power = environ 0.2cl

-        Boisson ISO citron punch power =  environ 0.5 cl

-        Coca = entre 0.5 et 1L

-        Saint-Yorre = entre 0.5 et 1L

-        Eau = Entre 0.5 et 1L

 

Portugal 2021, les bases de la préparation :


En avril 2021 je me suis envolé pour le Portugal, j’avais mon plan de course à pied quotidien et mon vélo de route en soute.

Au Portugal le climat est idéal pour l’entraînement.

3 semaines à Aveiro avec du plat sur les côtes atlantiques et des montées sèches dans l’arrière-pays.

7 jours à Vinhais  -Curopos, petite ville et village des montagnes portugaises au nord-est du territoire chez un ami cycliste portugais.

Un énorme volume à vélo et à pied, je crois que je n’avais jamais fait autant, certes je n’ai pas nagé mais j’ai certainement passé un CAP en cyclisme ces jours-ci grâce à cela. Les séances à pied n’étaient pas aussi structurées et j’ai dû me débrouiller seul.


 


Val d’Isère 1800m : 4 semaines de préparation en altitude :


Fin Juin 2021 j’ai validé pour une petite seconde ma qualification aux championnats de France 10km pour le 4 septembre. Cette qualif a marqué une petite libération, une petite pression en moins a gérer. Le plan ensuite était d’enchainer de suite vers une montée à Val d’Isère pour y préparer Embrun. Le timing était très intéressant : il fallait deux semaines à 20 jours minimum pour y trouver un bénéfice à du spécifique en altitude. Donc ici 4 semaines, ensuite je devais observer au moins 10 jours de retour au niveau de la mer, je suis redescendu le 1er Août, Embrun les 15 deux semaines plus tard, c’était un calcul bien dosé.


 

(spa, jacuzzis, seau d’eau froide ; un bon cocktail pour la récupération) / 

(un peu trop de vélos entassés dans un appart de montagne)

 

-        Iseran 4 ou 5 fois

-        Petit Saint Bernard 3 fois

-        Cormet de Roselend double versant : Bourg Saint Maurice et Beaufort

-        Colle San Carlo (Italie) 10%=10km

-        Col de la Lose (surement le col le plus dur de France à ma connaissance – en concurrence peut-être avec le Mont du Chat (Jura))

-        Montée de Tignes

-        Montée de Val d’Isère

J’ai pris mon vélo de chrono sans hésiter pour devenir plus à l’aise avec dans les ascensions de haute montagne, même si je l’ai essayé un peu tard dans la saison, c’est bien passé. Un grand remerciement à la boutique Yab Sports de Tignes pour avoir réparé successivement mon vélo de chrono et de route, les deux ayant eu une casse en moins de 24h.

 

Les premières séances de natation à + de 1800m en bassin de 25m (pas facile de maintenir l’intensité à cette hauteur)

 

 


6 commentaires

Commentaire de philkikou posté le 30-08-2021 à 22:37:13

J'avais vu les saisons précédentes de " Louis Savoyat et l'Embrunman ",et ça m'avait bien plu ! Je coche la quatrième saison édition 2021 pour un visionnage complet quand j'aurai un peu de temps ;-)

Commentaire de Louis_Savoyat posté le 02-09-2021 à 23:15:35

Bon visionnage alors ;-)

Commentaire de augustin posté le 31-08-2021 à 15:29:37

Sympa ton récit! on se transporte le long de ton épopée et revivons ces paysages évocateurs: Pallon, Champcela, Izoard... belle gestion en tout cas, tant au niveau global qu'au niveau de la chaleur. Et une prose sympa à lire par lamême occasion!

Commentaire de Louis_Savoyat posté le 02-09-2021 à 23:16:07

Merci pour ton commentaire qui fait plaisir!

Commentaire de philkikou posté le 15-09-2021 à 21:18:30

Belle préparation ( du costaud et du sérieux), bonne gestion de la course ( en mode gestion le vélo à 26 de moyenne avec un tel parcours, ça veut tout dire de ton niveau ;-)) avec des conditions météo pas facile en course à pied, ta lucidité t'a permis de ne pas exploser en vol lors du marathon et de signer une belle perf. ! et pour finir belle analyse avec déjà une sacrée expérience qui va te servir pour de nouveaux défis ;-)

Commentaire de Louis_Savoyat posté le 18-09-2021 à 20:27:58

Merci ! En effet ce genre d'expérience est super instructif dès qu'il s'agit de se lancer sur des formats de course plutôt longs. La dimension "gestion de course" a tellement d'importance, l'expérience acquise est précieuse.

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