Récit de la course : Marathon de New-York 2019, par Seabiscuit

L'auteur : Seabiscuit

La course : Marathon de New-York

Date : 3/11/2019

Lieu : New York (Etats-Unis)

Affichage : 618 vues

Distance : 42.195km

Objectif : Pas d'objectif

3 commentaires

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Une ambiance de folie !

 

C’est le grand jour. Des mois qu’on l’attendait. Et on y est …

Comme souvent tout est parti d’une idée lancée en l’air un soir autour d’une bière « et si on faisait le marathon de New York ?». L’idée a fait son chemin d’autant qu’une occasion s’y prêtait, ce sera l’année des 50 ans d’Yvan !!

On en a parlé autour de nous pour rameuter les troupes, on s’est réuni pour en parler et un noyau dur s’est constitué. Le même que pour la SaintéLyon, les 4 irréductibles : Fabien, Philippe, Yvan et moi. On ne pouvait plus reculer. Une fois le Tour Operator retenu, les formalités se sont enchainées et il a fallu s’entraîner …

Ca paraissait loin, presque irréel … la confirmation de la pré-inscription date de septembre 2018 soit plus d’un an avant l’évènement !! Tant de choses peuvent se passer d’ici là. La tuile serait de se blesser. C’est donc un risque que j’ai gardé en mémoire sur toute la période jusqu’à la veille du marathon. Le leitmotiv a été de préserver mon corps, le solliciter tout en le ménageant. Plus facile à dire qu’à faire !

Revenons au matin du 3 novembre 2019. Les affaires sont prêtes, tout est calculé ; même les vieux vêtements qu’on est allé dénicher au fond d’une armoire pour avoir moins froid lors de l’attente. Le dossard est épinglé sur le maillot « France ». Aujourd’hui on montre les couleurs nationales. Les Frenchies chez l’Oncle Sam !!

Lever à 4h35, aucune difficulté avec le décalage horaire, ça fait belle lurette que je suis réveillé !

Petit-déjeuner à 4h50, je le prends copieux car le départ est dans 5h, l’appétit est bon.

Départ du bus à 5h55. On profite du voyage pour découvrir la partie résidentielle de Brooklyn et on assiste à un magnifique lever de soleil alors qu’on s’engage sur le pont Verrazano.

Arrivée à Staten Island sur le site de départ à 6h45 après un trajet mené tambour battant par un chauffeur qui semblait prendre du plaisir à dépasser les autres bus, tantôt par la gauche, tantôt par la droite, ce qui nous a valu quelques frayeurs.

 

Première surprise : la foule. Des coureurs sont déjà arrivés au village, ça grouille ! Pour y accéder on doit franchir le point de contrôle encadré par un dispositif de policiers impressionnant.

 

 Une fois à l’intérieur du Fort Wadsworth, centre de l’armée de réserve des Etats-Unis, l’objectif est de dénicher le fameux bonnet donuts dont Philippe nous a tant parlé. Magnifiques couleurs orange et rose ! Avec nos loques, on sera ainsi ridicule de la tête aux pieds (mais on n’est pas les seuls).

  

Après un petit tour dans le village de départ histoire d’aller prendre un thé chaud et un passage aux toilettes, il y a l’embarras du choix, on se pose. On s’aperçoit que côté logistique on a des progrès à faire. Alors que certains ont prévu le matelas ou le siège pneumatique, nous devons nous contenter du sac plastique qu’on a quémandé auprès d’Air France à Roissy.

  

 Heureusement l’organisation a prévu de soigner le bétail. Ils ont étendu de la paille pour que nous puissions nous poser quelques heures avant de gagner le corral. Il ne fait pas chaud mais il fait beau et au sol en l’absence de vent, les rayons du soleil arrivent à nous distiller une douce chaleur.

 On y est pas mal, l’attente passe assez vite. Allongés, il suffit de lever le nez pour assister au spectacle offert par la ronde incessante des hélicoptères qui nous survolent. Je finis par somnoler jusqu’à ce coup assourdissant qui nous fait tous sursauter et nous redresser comme un seul homme. Le premier départ vient d’être donné. Pas par un vulgaire coup de pistolet mais par un canon. J’ai maintenant l’explication de la présence d’un blindé de l’armée à proximité de la ligne de départ.

 Ca se précise !! Pour nous c’est 10h10, encore une grosse ½ heure à patienter. Puis on gagne le sas orange, vague 2, corral C. On retire une à une les couches superflues au fur et à mesure de la progression, de la longue procession devrais-je dire, jusqu’au départ. L’excitation me gagne progressivement. C’est une fois que je suis dans l’alignement du pont que je réalise. Je vais prendre le départ du marathon de New-York. Rien que ça ! On marche les derniers mètres non chronométrés avec un breton, on se prend en photo pour immortaliser ce moment si spécial.

 L’émotion devient plus forte quand l’hymne national américain est chanté a capella. Waouh … ressaisis-toi Ludo. Nouveau coup de canon. Il est pour nous cette fois. C’est l’ordre que les jambes attendaient pour se mettre en route. Et c’est parti pour un peu plus de 42 195 m (avec ce monde, pas sûr que je puisse suivre rigoureusement la ligne bleue).

 

J’ai la chance d’être sur le pont, j’en prends plein les yeux, Manhattan sur ma gauche, les plages et l’océan sur ma droite. Certains coureurs, ceux du sas vert, ont moins de chance, ils passent en dessous, la vue n’y doit pas être aussi belle. La météo est parfaite, la statue de la liberté semble nous faire signe là-bas au loin pour nous encourager à la rejoindre, j’enregistre les images, j’incruste dans mon disque dur cérébral la vision du pont Verrazano que j’ai en face de moi et que j’avais tant imaginé. Je savoure l’instant présent, je mesure la chance d’être là.

    

 L’hélicoptère du département de police de New York (NYPD) nous accompagne. Il vole en stationnaire à notre hauteur et chose géniale, le co-pilote nous fait signe. C’est l’une des images que je retiens de ce départ. Il symbolise l’engouement général pour cet événement et prouve que tous les New Yorkais, y compris les forces de l’ordre, sont fiers de leur marathon.

  

 Premier mile déjà parcouru, il faut juste faire attention à ne pas se prendre les pieds dans les vêtements qui jonchent le sol. Je me fais la réflexion qui si je m’amusais à tout ramasser je pourrais ouvrir un magasin !

  

 Un coureur est déjà arrêté, il se masse le genou. La course s’annonce longue et pénible pour lui !

On quitte le pont et on prend pied dans Brooklyn. Là, première claque. Je découvre l’incroyable ambiance, celle qui fait du marathon de New York un mythe. Je n’ai jamais connu une telle ferveur, me voilà projeté dans un col du Tour de France. Ca augure de la suite ! La communauté hispanique semble bien représentée dans ce quartier de Dyker Heights car les Viva Francia rivalisent avec les Go French.

Les deux premiers kilomètres courus sur le pont m’auront permis de prendre pied dans l’évènement, calmement et progressivement. A partir de maintenant je suis comme pris dans un tourbillon d’émotion. J’en ai la chaire de poule.

Le bonnet Donuts que je pensais garder m’embarrasse finalement, je ne tarde pas à le jeter en direction d’un enfant assis avec sa famille sur le perron de leur maison. Il arrive dans leurs bras, ils en rigolent et m’adressent un petit signe de remerciement.

La remontée vers le nord se fait par la 4ème avenue. Les groupes de musique nous transcendent et tous les genres sont représentés : rock, pop, fanfare, percussions … Nous sommes dimanche et pour l’occasion une chorale de gospel chante devant son église. Les spectateurs nous acclament et leurs pancartes nous distraient. Elles sont souvent humoristiques et il y a de véritables perles :

« Dites-vous que vous avez payez pour le faire », « Au moins vous n’êtes pas au boulot », « Vous êtes mon inspiration », « Je suis fière de vous » …

      

  

La foule aux abords du parcours est continue et c’est un flot incessant d’encouragements qui nous accompagnent. Il n’y a guère que dans Williamsburg, le quartier juif de Brooklyn, entre le 15ème et le 20ème kilomètre, que c’est plus calme. Partout ailleurs, c’est juste dingue car les gens partagent avec nous l’évènement, ils le vivent profondément. Le « tapé de main » se fait aussi bien par les enfants que par les adultes et c’est touchant de voir des handicapés en fauteuil s’y adonner également. Je me prête au jeu et ça me donne une énergie incroyable. J’avais prévu d’en profiter pleinement, d’emmagasiner un maximum de souvenirs positifs au détriment du chrono. Je dois dire que je suis comblé.

Je passe au semi en 1h53’ mais comme dit précédemment c’est accessoire d’autant qu’on ne vient pas à New York pour battre son record personnel. Le profil n’y est pas simple, en raison notamment des ponts. Outre le Verrazano qui se franchit sans s’en rendre compte malgré un dénivelé non négligeable car placé au départ, on emprunte le Pulaski vers le 21ème km, le Queensboro vers le 25ème, le Willis vers le 32ème puis le Madison vers le 34ème. Le Queensboro est de loin celui qui m’a semblé le plus difficile car il est long, il monte pas mal et parce qu’on le parcourt en sa partie inférieure, on a donc l’impression d’être dans un tunnel.

A la sortie du pont, on entend la clameur monter. Je m’engage sur les 6 km de ligne droite de la première avenue et je croyais avoir tout vu mais c’était sans compter les résidents du Queens. Epoustouflants !! même les policiers participent, ils nous tapent dans la main. It’s amazing !! Les familles et les amis brandissent des pancartes avec la photo du coureur encouragé. Certaines sont format XXL, pas commun de voir çà ! L’ambiance me porte, la magie continue à opérer.

Le spectacle est aussi proposé par les coureurs comme cet homme qui court pieds nus ou ces courageux qui courent torse nu, cet autre qui affiche toutes les éditions auxquelles il a participé sur son t-shirt ou au contraire celui qui précise « first marathon », ce jeune papa qui arbore la photo de son fils et celle de l’écographie de son deuxième …

J’approche du 30ème et tout va bien, je cours en-dedans, j’ai encore de la réserve. On remonte avec Yvan quelques compatriotes reconnaissables au maillot bleu, je les encourage. Je ne suis pas le seul car à la vue de la mention « FRANCE » sur le devant de notre maillot les « Allez la France » fusent par les français présents sur le bord, souvent aussi par des bénévoles aux ravitaillements, sans doute des étudiant(e)s français(es) car prononcés sans accent. Et d’une manière générale j’ai le sentiment que nous sommes appréciés par les New Yorkais. Ils sont très chaleureux.

 

Yvan a tellement entendu parler du mur qu’il l’appréhende, je le rassure, nous avons été constants entre 5’20’’ et 5’25’’ depuis le début, il ne devrait pas connaître de défaillance.

On fait une brève entrée dans le Bronx, histoire de parcourir The five Borough puis on regagne Manhattan par la 5ème avenue.

Peu après le 36ème, on rentre dans Central Park. Ce n’est plus de la ferveur, c’est de l’hystérie !! Y a-t-il plus beau moment de sport qu’actuellement : je cours dans un parc paré de ses milles couleurs d’automne, encouragé par une foule en liesse, dans un état de relative fraicheur, avec un pote qui va achever dans quelques mètres son premier marathon. Je suis sur un nuage, je ne cours plus, je vole …

Yvan, se sentant aussi pousser des ailes à l’idée d’afficher un premier chrono sur cette distance, accélère. Les mètres défilent. Reste 400 m, puis 200 m. Je m’immobilise à 100 m de la ligne pour immortaliser cette dernière ligne droite. Il me reste à piquer un sprint pour le rattraper et franchir ensemble la ligne.

Nous l’avons fait ! We did it ! en 3heures 50 minutes et 59 secondes.

 

Si on se prête au jeu des comparaisons, la dernière ligne droite est loin d’être aussi grandiose que celle du marathon de Paris. Alors qu’on a emprunté un peu plus tôt des avenues trés larges, l’arrivée est quant à elle bien plus modeste.

 On met quelques temps à reprendre nos esprits puis on entame un autre circuit, celui d’après-course : perception de la médaille puis de la couverture de survie aux couleurs du marathon puis du sac de ravitaillement et enfin du poncho. La distance parcourue pour récupérer tout ça n’est pas négligeable. C’est la parade des zombies !

 

Au final, je suis évidemment super content. Sur le plan physique, j’ai l’impression d’avoir fait une sortie longue, j’ai mal aux jambes mais j’étais à l’aise tout au long de l’épreuve et j’avais le sentiment d’en avoir encore sous le pied. C’est le plan émotionnel, ce fut intense et très riche.  J’en reviens avec énormément de pensées positives. Et que dire de la météo ! Les planètes étaient alignées ce 3 novembre !

 

Mes réflexions

La renommée de ce marathon n’est pas usurpée. L’ambiance y est incroyable, le parcours intéressant mais assez sélectif. Pour ces deux raisons, il ne faut pas y aller de mon point de vue pour faire un temps.

Ce marathon montre plusieurs facettes. Le professionnalisme : (presque) tout est très bien organisé, les prestations sont de qualité (super t-shirt manches longues, poncho doublé polaire, médaille magnifique), le merchandising est très développé (une fois inscrit, on croule sous le nombre de mail pour les articles des partenaires). Le gigantisme : la taille du village marathon, le nombre des bénévoles et leur niveau d’engagement, les moyens mis en œuvre (barrières, hélicos, balisage …). L’engouement : la foule aux bords du parcours le jour J, les messages d’encouragement les jours précédant le marathon (des dames sont venues nous souhaiter Good Luck à plusieurs reprises au restaurant), les messages de félicitations sur le chemin de l’hôtel après le marathon. J’ai vraiment eu le sentiment de vivre une aventure. Quelques axes de progrès : j’ai été fort surpris de voir les meneurs d’allure courir la totalité du marathon en tenant à bout de bras la pancarte indiquant le temps objectif (pas d’oriflamme dans le dos comme chez nous) ! Ceci dit, personnellement ça ne m’a gêné en rien !! Autre point qui m’a surpris, pas de poubelles aux ravitos. On jette les gobelets à terre et il y a des bénévoles qui les ratissent mais ils sont complétement dépassés. C’est donc le bordel à chaque ravito avec les pieds qui collent par le Gatorade qui inonde la route ! 

3 commentaires

Commentaire de augustin posté le 15-11-2019 à 16:40:47

Super experience! bravo et merci de l'avoir partagée avec nous. Ca donne envie...

Commentaire de Carofred83 posté le 16-11-2019 à 15:17:01

super experience, j'ai mis en ligne également la mienne car j'y étais aussi, j'ai trouvé un peu plus de "je n'aime pas" comme les 4h d'attente dans le village, et d'autres petites choses mais en général nous sommes d'accord sur ce marathon, ma femme l'a fait également et a pu profité encore plus de la foule et des acclamations extraordinaires Newyorkais car elle a pris le temps de regarder et de prendre des photos, pour ma part je l'ai fait en mode bourin donc pas vu grand chose...bravo pour ton récit qui est très intéressant pour les prochains qui iront faire le marathon...

Commentaire de Seabiscuit posté le 16-11-2019 à 16:42:49

J'ai lu ton récit Carofred83 qui aborde en effet ce marathon sous un angle plus "performance". D'ailleurs grand bravo pour ton super chrono. L'attente m'a sous doute parue plus acceptable parce que nous étions 3 et à plusieurs ca passe plus vite !!

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