Récit de la course : Grand Raid du Queyras - 128 km 2014, par Thibaud GUEYFFIER

L'auteur : Thibaud GUEYFFIER

La course : Grand Raid du Queyras - 128 km

Date : 28/6/2014

Lieu : Aiguilles (Hautes-Alpes)

Affichage : 1581 vues

Distance : 128km

Objectif : Pas d'objectif

2 commentaires

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Le récit

 
 
 



Petit résumé du grand raid du Queyras (10ème scratch et 4ème v1):

 

Samedi matin quatre heure, le ciel est étoilé comme ça n’est possible qu’en montagne. Une belle promesse qui bien souvent ici ne manquera pas d’être trahie. On est 160 sur la ligne, silhouettes filiformes teint halés, dress code bien étudié, sac high tech, bâtons en carbone et visages absorbés.

Ça y est c’est parti et ça commence par un ballet de lampes frontales le long d’une haie impressionnantes de flambeaux portés par des bénévoles courageux, c’est vraiment trop beau. La tête de course s’enflamme un peu, pour beaucoup cela se paiera cher. Je pars relax, je cherche ma musique intérieure, je papote un peu, je plaisante sur la montée sur Gilly. Pendant ce temps la nuit pâlit et nous laisse découvrir un massif encore généreusement enneigé en ce début de saison. Au sommet le soleil déchire le profil du monumental mont Viso.


Première descente rapide et premier ravitaillement : pain frais charcuterie et fromages locaux à tomber. Et il faut reprendre des forces, pour affronter la première difficulté 1100m de montée pour atteindre le col Vieux qui culmine à plus de 2800m d’altitude. La neige complique un peu la partie finale, en haut deux italiens esthètes et biens avisés s’apprêtent à se faire une superbe trace en ski de rando dans le soleil éclatant de cette matinée. Descente sur Saint Véran village charmant odeur de feu de bois, de pierre, un chat glisse, quelques beaux visages ridés nous sourient.


Les montagnes russes s’enchainent, +600m pour goûter l’air pur d’Estronques, descente à bloc dans les sapinières pour rejoindre Ceillac. Une montée asphyxiante pour Escreins, pente trop raide, roche friable, le pied se dérobe, l’altitude, la nausée je commence à tituber et avoir du mal à m’alimenter. Je rencontre les premiers morts vivants de la course, visages gris, hagards certains annoncent déjà leur abandon au prochain poste. Au sommet 1400m de descente non-stop nous attendent durant lesquels nous seront « purifiés » par un typique orage de montagne.


Arrivée dans la ville de Guillestre, accueil chaud sur la place centrale. Je plonge ma tête dans la fontaine histoire de gagner en lucidité et oublier les chocs de la descente.


Je ne perds pas de temps et ne cède pas à cette chaise-sirène qui me regarde. Il faut avancer le maximum avec je jour. Je m’accroche dans cette remontée de 1400 m vers Furfande aux baskets de mon équipier des huit prochaines heures, Michael, brillant triathlète et traileur habitant à Gap. On s’entend bien mais je m’accroche et puise dans les réserves profondes car le tempo est monté d’un cran. La pluie qui recommence, les rafales de vent qui me laissent transi de froid m’épuisent. Il me distance je le perds de vue c’est le crépuscule le balisage jusqu’à lors parfait disparaît brusquement. Je me calme, un coup de gps sur lequel j’ai enregistré tout le parcours me remet sur la route. Vive la technologie Garmin ! Descente à tombeau ouvert dans les éboulis et les pentes herbeuses glissantes je me réchauffe et je rejoins c’était inespéré, mon équipier en arrivant sur Arvieux. Accueil génial soupe moulinée parfaitement assortie, on prend un peu de temps car il reste 30 km et 2000mde montée dont 1200 pour atteindre le mythique col de l’Izoard. On débriefe et se remotive. A côté de nous deux types sont allongés sur des brancards l’un dort et l’autre nous observe le regard vide et inexpressif ce sont les n°9 et 10. On repart j’ai beaucoup de mal à garder le rythme dans les montées et peu avant le sommet je décroche je recolle presque au dernier ravitaillement. Mais il est en forme et trace sa route, ce qu’il fallait faire. Encore 15km et environ 1000 m de montée, la pluie à tout détrempé le sol, mes fringues, ce qu’il me reste de force mentale, je mange à toute petite dose mais l’hypoglycémie me cloue sur les 400 derniers mètres, même boire devient une décision forcée. Les derniers kilomètres sont lassant, interminables. Enfin l’arche orange tel un ovni apparaît dans la nuit en contre bas ! Quelques applaudissements qui ont beaucoup d’importance et de valeurs à 4h17 du matin. Enfin cette chaise, je trinque avec mon pote retrouvé, la bière est tiède mais c’est l’ivresse !

Quand je reprend la route à 11h il pleut abondamment, les nuages engloutissent le paysage et il n'y a que 26 arrivants...

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2 commentaires

Commentaire de Shoto posté le 01-10-2018 à 08:15:10

Difficile de trouver cet équilibre en trail entre le trop vite qui nous entraîne vers l Hypoglycémie fatale, l épuisement de notre stock de glycogène et les nausées, et par ailleurs le bon rythme qui nous assure le bon tempo et la bonne place de finisher. Merci pour ton récit bien écrit et plaisant. Bravo pour ton score final.

Commentaire de Free Wheelin' Nat posté le 03-10-2018 à 20:25:09

Un ultra est toujours dur en soi, mais dans des conditions telles que tu les décris, il peut devenir un enfer... Bravo finisher!!

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