Récit de la course : Le Tour de la Grande Casse - 65 km 2018, par BastienN

L'auteur : BastienN

La course : Le Tour de la Grande Casse - 65 km

Date : 26/8/2018

Lieu : Pralognan La Vanoise (Savoie)

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Distance : 66km

Objectif : Se dépenser

7 commentaires

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Un tour de très grande classe!

Ce Tour de la Grande Casse me faisait envie depuis un moment: pour la beauté des paysages traversés, pour l'ambiance montagnarde, et pour son format "raisonnable" notamment.

J'ai enfin pu le réaliser, pour mon plus grand plaisir. Ayant pu grapiller ici-même des informations utiles grâce aux CR réalisés au sujet de précédentes éditions, j'ajoute ma petite pierre.

Côté préparation, étant un peu un touche à tout épicurien (distances, terrains) je n'avais pas fait de préparation spécifique pour cette épreuve mais pris soin de profiter d'escapades Corses et Cévenoles estivales pour effectuer quelques sorties longues avec du dénivelé positif et négatif significatif.

Côté tactique ou stratégie de course, comme je n'avais pas de repères sur ce format de courses en compétition (ayant fait soit plus long en off soit plus court en compétition), mon idée était de "Faire la course/l'effort" pour voir ce que je pouvais donner sur ce type de parcours et en prendre de l'expérience, mais en adoptant certains principes de prudence (qui se sont avérés plus ou moins judicieux ! ) pour être sûr de profiter de la montagne jusqu’au bout.

Le briefing de la veille a été l’occasion de faire la connaissance avec Cédric (cedtrail95) et Sébastien (dafunker) : rencontre bien sympathique poursuivie autour d’un verre et d’un diner au restaurant…

 

1- De Pralognan au Col de la Vanoise: grimpette nocturne sur fond de pleine lune

 

Le départ, initialement prévu à 4h, est donné à 4h30 : le temps de laisser passer le dernier nuage d’une nuit nébuleuse, qui bouche le col de la Vanoise. J’hésite entre regretter la demi-heure de sommeil supplémentaire perdue et saluer la bienveillante prudence des organisateurs. Il fait frais (autour de 1°) sans faire trop froid, je trouve malgré tout le coureur en sandales assez intrépide au regard de ce qui nous attend: trois cols entre 2400 et 2700 mètres d'altitude sur la première partie de course …

Je fais la première montée, que je connais bien pour l’avoir faite plusieurs fois en randonnée, à un rythme soutenu mais raisonnable, mêlant marche rapide si nécessaire et parties courues si possible.

Arrivés au niveau du lac des vaches, nous commençons à rencontrer la neige fraichement tombée dans la nuit. Rien de méchant, juste une petite pellicule, de quoi rendre certaines pierres glissantes mais aussi créer une belle ambiance. La pleine lune dans l'enfilade du lac au pied de l'aiguille de la Vanoise, surplombant la guirlande des frontales du peloton des coureurs, offre un spectacle magnifique. Je tente de partager mon extase avec les coureurs autours de moi, espérant un peu d’échange, mais pas un ne répond… Les poètes et esthètes du peloton doivent être derrière, ou devant, mais pas autour de moi.

Une fois, deux fois, trois fois dans la montée, mon bâton droit se coince entre deux pierres et je suis obligé de le ramasser. La quatrième fois, décidé à ne pas me laisser faire, je ne le lâche pas ! Résultat, la dragonne casse, et je vais faire le reste de la course en serrant fort mon bâton, j’en aurai presque des crampes dans la paume de la main en fin de parcours !

J’arrive au refuge de la Vanoise en 1h15 dans un effort volontaire mais géré: c’est à peu près ce que j’avais espéré  comme tempo. Il fait désormais froid, je me ravitaille et rempli mon bidon, perdant au passage 2-3 places.

 

2- Refuge de la Vanoise, Col de la Leisse, Val Claret:  petit matin gelé et radieux

La traversée du Col de la Vanoise est plate et peu technique. La nuit, les quelques flocons tombés et le gel rendent pourtant certains passages un peu piégeux : pierres glissantes, ruisseau ou flaques transformés en plaques de glaces. Je glisse un peu, met un pied dans l'eau, mais suis envoûté par l'atmosphère.

J’effectue la petite descente raide vers le vallon de la Leisse, technique et gelée, de façon prudente, perdant encore deux places en me faisant doubler par deux descendeurs qui effectuent dans ces conditions une descente que je n’oserais pas en plein jour…

La lueur du jour, puis les premiers rayons du soleil apparaissent au gré d’une remontée du vallon de la Leisse roulante, sauvage et magique dans l’ambiance blanche du jour : le plaisir pure de la course en montagne est là. Je trottine allègrement, reprends une ou deux places. Je ne m’arrête pas au ravitaillement du refuge de la Leisse : je mange une barre que j’ai sur moi, je sais le col plus très loin et la descente ensuite vers Val Claret relativement brève et facile. Je fais pourtant une petite glissade-chute sur une pierre gelée, sans gravité.

J’arrive à Val Claret en 3h25.

 

3- Val Claret - Le Laisonnay : les marmottes se réveillent

Val Claret représentant à peu de choses près la moitié du parcours (en fait un peu moins), j’avais décidé d’y faire un vrai ravitaillement, d’en profiter pour « refaire mon sac » (ranger la frontale, retirer le T-Shirt chaud, etc.). Constatant que les autres coureurs ne s’arrêtent quasiment pas, j’y fait finalement une halte très brève, remplis mon bidon, et repars avec encore ma tenue « de nuit », frontale encore sur la tête alors que le soleil pointe.

Dans la remontée vers le Col du Palet, je reprends deux places en montant au train, ce que je sais faire de mieux en montagne. Les bénévoles blottis dans le froid au sommet du col, tout en vérifiant mon numéro de dossard, m’annoncent 12ème . Je ne sais pas si je trouve ça bien ou pas mais les remercie, et sais la course encore longue. Mais en doublant juste après un coureur qui n’a pas l’air très bien, je me dis que 11ème c’est pas loin de 10ème (et oui Clin d'œil), et que faire un « Top 10 » serait symboliquement flatteur.

Mais dans la grande descente vers le Laisonnay, parfois très roulante, parfois un peu plus raide dans de petites coupes, je vois inexorablement s’éloigner des coureurs sur lesquels je revenais dans la montée : je commence à comprendre où se situent mes points forts et mes points faibles dans le parcours du jour ! Mais le plus important n’est pas là : aube resplandissante, marmottes se réchauffant les cordes vocales au petit matin et face nord de la Grande Casse me rappellent pourquoi je suis là : profiter d’une magnifique échappée belle alpine, du bonheur d’être en mouvement et en montagne.

Arrivée au Laisonnay en 5h06 : le soleil est déjà bien haut, je range enfin frontale, T-Shirt chaud et gants. Cela me fait un gros sac sur le dos (je me sens un peu comme une tortue), d’autant plus que je n’ai toujours quasiment pas entamé ma réserve d’eau, le bidon rempli de ravitaillement en ravitaillement suffisant largement… Je me ravitaille en sucré et en salé dans un mélange un peu douteux mais remontant, accepte une soupe dont je ne boirai que deux gorgées : deux coureurs arrivés après moi au ravitaillement sont déjà repartis en trombe, je n’ai pas envie de perdre trop de temps à attendre que la soupe ne refroidisse…

 

Le Laisonnay-Le Planay : ambiance champêtre…

La descente continue d’abord en direction de Champagny en suivant parfois le torrent, avant une remontée vers la Tour du Merle dans un sentier de forêt que je trouve très joli, puis une grande descente champêtre entre bois, hameaux et prairies. Je redouble à la montée les deux coureurs qui m’ont empêché de profiter de ma soupe, l’un deux me redoublera à la fin de la descente : la routine habituelle quoi…

C’est dans ce tronçon qu’une modification de parcours due à un éboulement nous prive de la fin d'itinéraire prévue (remontée depuis Plan Fournier vers le Col de Leschaux, puis redescente sur Pralognan). A la place, nous  redescendons jusque dans le fond de vallée pour aller ensuite chercher une dernière grosse ascension…

Arrivée au Planay en 6h32.

 

Le Planay – Pralognan : Un final redoutable

Au planay, dernier ravitaillement avant la fin et avant, surtout, une dernière difficulté annoncée comme sérieuse. Si ça ne tenait qu’à moi, je serais resté un peu plus : les bénévoles ont l’air sympathiques, il fait beau et désormais doux, de quoi pousser à la procrastination au regard des mille mètres de dénivelé à venir. Mais le passage en trombe d’un coureur qui ne s’arrête même pas, et le départ avant moi de celui qui vient de me doubler dans la descente me poussent un peu.

La montée dans la forêt, annoncée raide (1000 mètres de dénivelé sur 5km) est à la hauteur de sa réputation. Les jambes piquent un peu, mais l’envie de reprendre les deux coureurs qui viennent de me dépasser, le fait de doubler petit à petit les concurrents du « semi-Maratrail » partis de Champagny dans la matinée, me permettent de monter régulièrement, en poussant fort sur les bâtons malgré tout. Signe que l’effort est dur et que je commence à avoir envie d’en finir : je ne peux m’empêcher de regarder très régulièrement ma montre, pour vérifier le dénivelé accompli et la distance parcourue… Et constater que les chiffres évoluent bien trop peu à mon goût !

Enfin passé le Col de la Chal, je suis obligé de me forcer un peu pour me remettre à courir. Si les jambes ne semblent pas tout de suite convaincues, je ne regrette pas cette reprise de rythme : un petit kilomètre sur l’arrête, sur un chemin magnifique et avec à nouveau un peu de vue me fait retrouver l’un de ces petits moments d’extase que procure la course en montagne : des petites bosses, un chemin qui serpente, un paysage magnifique, des odeurs de montagne, tout va (presque) bien !

Au début de la dernière descente, une jeune femme m’annonce 8ème. Je ne suis pas certain de la croire, mais cela me convainc à ne pas trop trainer dans la descente : j’effectue donc les cinq derniers kilomètres de descente sur Pralognan, d’abord dans un alpage avec une vue magnifique, puis dans la forêt, en essayant de courir raisonnablement vite mais en assurant mes appuis entre racines et pierres. A ce rythme, je reperds une dernière place un kilomètre avant l’arrivée, mais sens que je ne peux pas descendre aussi vite que ce collègue sans prendre de risque réel.

Tout juste suis-je capable, à l’entrée de Pralognan et dans le tour du village destiné à nous faire profiter de l’ambiance, de finir à un rythme soutenu pour résister au retour d’un autre coureur. Bien m’en a pris : je termine ainsi les 66km et 3860 mètres de D+ et D- en 8h29, en 9ème position au classement général, mais aussi premier Master (je suis V1) juste devant deux autres coureurs de la même catégorie, ce qui me vaudra un appel au podium et une invitation pour l’un des trails de Pralognan en 2019 : le Tour des Glaciers de la Vanoise 2019 me fait de l’œil !

 

Je recroiserai en fin d’après midi Cédric, avec lequel je prendrai enfin une bière bien méritée en applaudissant les derniers arrivants, non sans avoir au préalable réalisé quelques longueurs techniquement et esthétiquement pitoyables mais ô combien bienfaisantes dans la piscine de l’hôtel…

 

Au final ?

Une boucle très très belle, à la hauteur de mes attentes, surtout sur la première partie du parcours. Une ambiance et une organisation que j’ai beaucoup appréciées. Une expérience, un résultat et des sensations qui me permettent d’en savoir un peu plus sur ce que je peux faire et espérer sur ce format de course.

Côté « leçons » :

-          J’ai maudit mes bâtons dans certains moments, et les ai adulés dans d’autres…

-          Je n’ai pas regretté un choix vestimentaire plutôt prudent et modulable : les gants, le buff, et la double-couche de T-shirt (un manche courte et un chaud) m’ont permis d’être bien avant le lever du jour dans une ambiance assez glaciale, puis à l’aise une fois les températures plus clémentes. Je n’ai pas eu à enfiler ma veste par contre.

-          J’ai un peu pêché par excès de prudence dans mon autonomie alimentaire en portant trop (eau + barres + pâtes de fruit) : je suis parti avec un Camelback plein dans lequel je n’ai que très peu puisé, et du ravitaillement personnel dont je n’ai consommé que la moitié (deux barres et une pâte de fruit) : j’aurais pu partir plus léger !

-          Je constate à nouveau ce soir que les lendemains de trail sont de bonnes piqûres de rappel sur la faible accessibilité du métro parisien aux personnes qui ont du mal à descendre les escaliers…

 

Mes respects et amitiés à celles et ceux qui seraient allés au bout de ce récit!

BastienN.

7 commentaires

Commentaire de Arclusaz posté le 28-08-2018 à 07:46:15

Quelle course et quel potentiel tu as ! J'ai d'ailleurs failli te jouer dans le concours de pronostics sans savoir que tu étais kikoureur.

Commentaire de BastienN posté le 28-08-2018 à 08:36:55

Merci pour ta lecture et ton commentaire élogieux: c'est vraiment sympa de parler de potentiel à un (jeune) Master/Vétéran, c'est rassurant!
J'espérais surtout pouvoir me faire plaisir sur ce format de course à la fois (un peu) long et (un peu) rapide quand-même, montagnard et (un peu) roulant aussi, et ne suis pas déçu.
Je suis un kikoureur timide et tu as malgré tout bien fait de ne pas me jouer dans les pronostics, je ne t'aurais pas porté chance!
Bien amicalement,
Bastien N.

Commentaire de cedtrail95 posté le 28-08-2018 à 09:57:38

En plus de courir vite, tu as su profiter des magnifiques paysages. Et je confirme qu'au départ, avec ton gros sac, tu étais prêt pour mettre 2 fois plus de temps entre chaque ravitaillement.
Je comprends mieux maintenant pourquoi tu ne parlais pas trop de ton objectif temps la veille au soir. Tu devais avoir à l'esprit que tu pouvais aller vite mais comme c était une première, la prudence s'imposait.
Merci encore pour la bière car on avait dit que le dernier arrivé la payait aux autres. Bon, tu n'imaginais peut-être pas avoir une première place en master à fêter. A bientôt j'espère, peut-être sur le TGV 2019.

Commentaire de Leseb posté le 28-08-2018 à 18:14:25

Chapeau pour ta course, ça m'a replongé dans la mienne l'année dernière, avec des temps de passage et une place finale quasi identique! Sauf que j'avais du laisser la première place V1 au redoutable Tony Moulai, vainqueur de l'édition 2017!
Ce trail est effectivement magnifique et le lever du jour dans le vallon de la Leisse reste un de mes beaux souvenirs de courses!

Commentaire de BastienN posté le 28-08-2018 à 18:59:36

Bonjour @Leseb,

Merci pour ta lecture et ton message.
Je dois t'avouer que ton récit de l'année passée m'a bien inspiré et même servi! Sentiment partagé sur la remontée de la Leisse à l'aube, et seul petit regret: ne pas avoir pu passer par le Col de Leschaux, dont j'apprécie l'ambiance!
Bien amicalement,
Bastien N.

Commentaire de dafunker posté le 30-08-2018 à 18:15:44

Félicitations Bastien, bon récit et très belle course !

C'était un plaisir de faire connaissance avec Cédric et toi.
Vous avez été tous les 2 très modestes quand on voit la course que vous avez réalisés le lendemain.

J'ai une tournée à payer et peut-être que ce sera à l'occasion du TGV 2019 ;)

Commentaire de lamidu42 posté le 03-09-2018 à 19:07:39

bravo pour ta course, le récit et le podium. j'étais pour ma part sur le maratrail. Je te rejoins sur la beauté des pays.

Bonne continuation

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