Récit de la course : Paris - Alsace 2017, par FOREST Alex

L'auteur : FOREST Alex

La course : Paris - Alsace

Date : 31/5/2017

Lieu : Neuilly Sur Marne (Seine-Saint-Denis)

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Distance : 430km

Objectif : Terminer

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Paris - Alsace 2017

Mercredi 31 mai 2017, je vais prendre le départ de mon 2ème Paris-Alsace à la Marche.

Cette épreuve mythique a été créée en 1926. Cette année, c’est la 69ème édition.

Pour prendre le départ de cette épreuve, il faut se qualifier. J’ai obtenu mon invitation suite aux 24h de Château Thierry, malgré une performance très décevante (162km). Mais l’organisation croit en mes capacités à terminer l’épreuve.

Concernant ma préparation, j’ai fait peu de kilomètres par rapport aux années précédentes (la priorité était d’être avec mes enfants), donc à peine + de 1000kms depuis le début de l’année, mais + des ¾ ont été faits en marchant (pour comparaison, l’année dernière, j’avais fait le double de kms durant la même période, mais quasiment aucun km en marchant).

Donc voilà, mercredi vers 10h, je retrouve mes assistants Huguette et Daniel, puis Gilbert et son camping-car. Nous nous rendons à Neuilly où nous arrivons vers 11h.

Je récupère mes dossards, passe à la visite médicale, puis on retrouve Philippe et on va manger. Ensuite, pour moi c’est la sieste pendant que mes assistants préparent le camping-car. Jean-Hervé nous rejoint dans l’après-midi.

Vers 17h30, on se rend au départ pour la présentation des athlètes.

Donc je récapitule, j’ai le dossard 13, nous sommes 12 hommes au départ, j’ai la plus mauvaise perf des partants, j’ai une grosse équipe de 5 coureurs aguerris sur la MilKil, mais 4 n’ont jamais mis les pieds sur une épreuve de Marche, on est super motivé, tout va bien, vivement le départ !

 

 

18h30, ça y est enfin, le départ est donné !

On commence d’abord par un prologue de 14km entre Neuilly / Marne et St Thibault les Vignes.

Et ça démarre bien trop vite pour moi qui ne sais pas marcher.

Eddy part en tête, suivi par Dmitriy, puis Matthieu, Florian et Cédric. Sans surprise, les 5 + rapides sont devant moi.

Cédric lève le pied rapidement, je passe devant et essaie de rester au contact de Florian. On traverse la Marne, déjà 1km parcouru, l’arrivée approche, on attaque la 1ère montée. Et déjà un juge me montre sa palette jaune, il m’indique que mes jambes sont trop fléchis.

Ça commence bien ! Je ralentis un peu, mais en même temps j’ai pas envie de faire le prologue tout seul. Heureusement, devant ça temporise aussi, et après quelques kilomètres je finis par revenir sur Florian, Matthieu et Eddy.

Je dis en plaisantant que c’est + facile pour moi, je n’ai pas de vélo à tirer. Les camping-cars ne peuvent pas nous suivre pendant le prologue, et moi j’ai choisi de faire le prologue sans assistance (j’ai une flasque de 300ml d’eau dans la poche), tandis que les autres ont un accompagnateur à vélo à leur coté.

L’ambiance est bonne, on discute un peu, je propose de partager mon ravito, mais bizarrement personne ne veut de mon eau bouillante.

Je fais un 1er constat : je n’ai aucun mal à suivre le rythme (environ 9km/h) en montée, par contre, dès que ça redescend je suis en galère, alors que les autres descendent à 10km/h sans forcer, j’arrive tout juste à tenir mon rythme de montée.

Bon voilà, le prologue se passe tranquillement. Je parcours les 14km en 1h28’26’’, je suis 4ème, quelques secondes derrière Matthieu et Florian, et juste devant Eddy.

Grosse satisfaction, j’améliore de 4 min mon chrono de l’an dernier, et surtout je suis moins de 3 min derrière Dmitriy, je partirai donc 10 min + tôt que l’an dernier de Château Thierry.

 

 

Allez, on ne traine pas, je monte dans le camping-car et on file à Château-Thierry. Je mange quelques pates pendant le trajet. Puis une fois arrivé à Château-Thierry, je retourne m’allonger quelques minutes, pendant que mon assistance va chercher des pizzas.

22h, j’avale un quart de pizza, je me prépare. Cette fois, ça y est, c’est le grand départ, 352km jusqu’à Epinal où il faudra arriver avant samedi 7h.

 

Pour cette 1ère nuit, la stratégie est simple, tenir le même rythme que l’an dernier, voir gagner quelques minutes, au moins pendant les 100 premiers kms, sans s’occuper des autres, le seul objectif est de prendre de l’avance sur les barrières horaires.

De toute façon, devant moi, Dmitriy, Matthieu et Flo vont logiquement creuser l’écart rapidement, derrière Eddy va de suite me dépasser, et puis d’autres suivront.

 

 

22h30, Yohann DINIZ donne le départ aux leaders Maggy et Dmitriy.

22h33, me voilà parti !

Et là, rien ne se passe comme prévu !

D’abord, Eddy ne me rattrape pas.

Ensuite, je constate que les campings-cars de Florian et Matthieu n’avancent pas assez vite, je reviens sur eux. Et après quelques minutes, je suis contraint de les dépasser, le rythme est trop lent pour moi.

Bon je ne m’inquiète pas, ils ont certainement décidé d’assurer un départ tranquille, et quand ils décideront de mettre en route, ils reviendront sur moi à grande vitesse.

Donc maintenant il ne reste plus qu’un seul homme devant moi, le patron Dmitriy Osipov, en route pour une 7ème victoire, lui au moins je suis sûr de ne pas le rattraper, il doit déjà être loin devant.

Alors je continue tranquillement ma marche. Je dépasse Irina, partie 2 min avant moi, et je reviens encore sur un camping-car, ce doit être celui de Maggy, en tête chez les filles. Mais en me rapprochant, je vois le dossard 1 à l’arrière du véhicule. Heu, c’est quoi cette blague ? Bon, de toute façon, il est trop lent, je le dépasse. Et oui, c’est bien Dmitriy qui promène au ralenti. Un petit encouragement et je continue ma route.

Ensuite, je dépasse Maggy, et cette fois, je me retrouve en tête de l’épreuve. Non mais vraiment n’importe quoi, ça fait même pas 1h qu’on est parti de Château-Thierry, et je me retrouve devant tout le monde, la bonne blague !

Bon faut que je profite à fond là, parce que ça peut pas durer longtemps, je pense que je vais bientôt me réveiller. Et puis faudra que je fasse gaffe à pas prendre froid, avec les courants d’air que je vais me prendre bientôt, je risque de m’enrhumer.

Allez, un peu de sérieux, revenons à ma Marche.

C’est un peu la panique pour mon assistance. Je leur ai demandé de me ravitailler toutes les 20 – 30 minutes, en boisson au début. Mais comme j’avance environ à 9km/h, ils ont du mal à me ravitailler, ils sont obligés de courir à mes cotés pour tenir mon rythme, or c’est interdit par le règlement. Daniel renverse plusieurs fois la bouteille. Du coup, je temporise afin qu’il puisse me ravitailler calmement.

Jean-Hervé vient également faire le point avec moi sur cette situation de course improbable. Je lui répète que la place n’a pas d’importance, l’objectif est de prendre de l’avance sur les barrières horaires, et mes repères sont mes temps de passage de l’an dernier. Mais je sens bien que Jean-Hervé n’est pas totalement convaincu.

 

Enfin voilà, j’approche du 1er pointage à Dormans, et je commence à croire que je vais pointer en tête d’un pointage du Paris-Alsace.

Bah oui, c’est ce qui arrive à 1h18, je pointe 1er à Dormans. Et preuve que je n’avance pas si vite que ça, j’ai seulement 16min d’avance par rapport à l’an dernier, mais comme j’étais parti 10 min plus tard, ça ne me fait que 6min d’avance, donc c’est bien les autres qui avancent trop doucement.

 

Enfin ouais mais bon quand même, ça reste n’importe quoi cette blague ! Surtout que depuis que je suis en tête, je suis beaucoup + surveillé par les juges, ça c’est le jeu de la Marche. Et avec ma marche peu académique de coureur, et mon assistance débutante en marche, bah c’est pas gagné. Philippe me conseille d’ailleurs de lever le pied dans les descentes.

En même temps, à chaque fois que je croise un juge, c’est toujours l’occasion d’un échange amical, d’un encouragement, alors j’en récolte un max et ça fait bien plaisir.

Enfin voilà, puisque tout va bien pour le moment, je continue ma route à travers la Champagne. D’ailleurs le coin a l’air joli, dommage qu’il fasse nuit.

 

La nuit se passe bien, j’arrive au 2ème pointage à Epernay à 4h43, toujours en tête. J’ai 27min d’avance par rapport à l’an dernier.

Le jour se lève, la fatigue aussi, mon rythme baisse légèrement. Mais toujours personne ne se décide à passer devant moi, alors je continue à récolter le max d’encouragements. Tiens, parmi tous les encouragements reçus, y en a des marrants qui te foutent grave la pression, du style : « Super, un français en tête, y en avait marre des victoires russes…». Heu, bah non, faut pas compter sur moi, y a un malentendu, vous faites erreur là !

La fatigue commence aussi à se faire sentir dans mon assistance, puisque Gilbert s’endort au volant et manque de m’écraser. Ouf, + de peur que de mal.

 

J’arrive au pointage à Condé sur Marne à 7h02, 29min + tôt que l’an dernier.

Pain au chocolat pour le petit déjeuner, on ne change pas les bonnes habitudes.

Un ardoisier me donne les écarts à Condé. Cédric, 2ème, est 4min derrière, puis suivent Pascal et Florian. On est 8 en 30min, on est encore tous groupés.

Longues lignes droites jusqu’à Chalons, ce n’est pas la partie la + marrante du parcours. Mais cette année, on a droit à un grand soleil, qui d’ailleurs commence à chauffer fort, et je préfère ça au déluge de l’an dernier.

 

On entre dans Chalons en Champagne. Jean-Hervé vient m’accompagner à vélo, au cas où le camping-car serait bloqué dans la circulation.

Une voiture de l’organisation m’ouvre la route, cela facilite mon passage dans la ville, et m’évite de chercher le balisage. Enfin c’est ce qu’on pense, mais apparemment le chauffeur ne connait pas vraiment le parcours, et il ne regarde pas non plus le fléchage.

Du coup, il m’emmène sur une mauvaise route et me fait rater le pointage. Et comme mes 3 poursuivants m’ont en point de mire, ils s’égarent comme moi et évite le pointage. De même, pour un juge qui nous suivait.

L’organisation est vite prévenue de cette mésaventure, et décide de zapper le point de contrôle de Chalons pour tout le monde, puisque nous sommes rapidement retombé sur le bon parcours, sans gain de distance, nous pouvons continuer notre route.

 

C’est à la sortie de Chalons, après presque 12h et 100km depuis Château Thierry, que ma blague du départ prend fin. Cédric me dépasse et prend la tête de l’épreuve. Enfin un vrai marcheur devant, ça fait + sérieux !

Bon allez, je continue tranquillement. Je profite du point de mire de Cédric, pour me maintenir à un rythme correct, même si j’ai bien baissé depuis le départ. Ce qui n’est pas pour déplaire à mon assistance, qui peut désormais me ravitailler + facilement.

 

J’arrive à Pogny à 11h35 (40min + tot que l’an dernier). Une école primaire est au bord de la route, les enfants crient mon nom, je leur tape dans les mains, c’est génial, j’adore !

Le moral est bon, surtout que je sais que sur le prochain tronçon je vais prendre de l’avance par rapport à l’an dernier, où j’avais fait 2 pauses inutiles pour soigner mes pieds abimés par la pluie.

Je continue à mon rythme, je garde Cédric en point de mire dans les parties dégagées.

Pascal me dépasse à son tour, mais les écarts restent minimes.

 

Je pointe 3ème à Vitry le François à 14h55 (avec + d’1h15 d’avance sur 2016).

Ici encore grosse ambiance, c’est la ville de départ des féminines à partir de 16h.

Au point de contrôle, on me prévient qu’il faut bien suivre le fléchage, notre route tourne à gauche. En effet, les 2 premiers, bien aidé par la voiture ouvreuse, sont allés tout droit pour une visite touristique de la ville.

Du coup, me voilà à nouveau en tête de l’épreuve. Enfin, pas longtemps cette fois-ci, Pascal et Cédric ne tarde pas à me repasser.

D’autant + que la fatigue commence vraiment à se faire sentir, et comme je sais que les prochains kms ne sont pas spécialement marrants, alors je vais essayer de gérer au mieux.

Je sens des contractures un peu partout dans le corps, c’est pas terrible, je demande à mon assistance une petite pause afin de me relâcher et détendre mes muscles. Je ne veux m’arrêter que 2 – 3 minutes, mais je traine un peu, et mon arrêt dure presque 10 minutes.

Florian me passe pendant mon arrêt.

Le soleil cogne fort, il fait mal à tout le monde. Cédric et Florian sont également contraints à des petites pauses à cause de la chaleur.

 

Je passe à Reims la Brulée à 16h13.

Peu après, Dmitriy me dépasse et m’enrhume, à peine le temps de s’encourager, il est déjà loin. Chacun retrouve sa place, c’est mieux ainsi.

J’approche d’une des parties les moins marrantes du parcours, une ligne droite interminable de 8km plein cagnard, je me souviens bien comme j’ai souffert ici l’an dernier. Alors je décide de gérer ce passage vraiment tranquille, jusqu’ici j’ai réussi à prendre de l’avance sur l’an dernier, alors maintenant il faut que j’assure, pour arriver bien jusqu’à l’hotel à Bar le Duc.

La connaissance du parcours aide bien, cette ligne droite passe sans encombre. Jean-Hervé m’accompagne un peu au bout de cette ligne droite, on traverse encore un village dans une ambiance incroyable, certains habitants ont sorti des tables sur le bord de la route devant chez eux juste pour nous encourager.

Je retrouve une route ombragée et gentiment vallonnée, ce qui n’est pas pour me déplaire.

 

Je pointe à Sermaize à 19h35, soit 1h30 d’avance sur l’an dernier, c’est bon pour le moral. Mais je me souviens surtout de l’an dernier, comment j’ai souffert sur le tronçon à venir, je n’avançais plus et les derniers kilomètres avant le repos à Bar le Duc étaient interminables. Alors, comme je ne veux pas revivre la même galère, je choisis d’assurer au mieux afin d’arriver dans un état correct à l’hotel. Mais bon, en même temps, il faut que je profite du jour pour avancer au maximum, ma tête cogite et mon corps fatigue, c’est pas simple !

Je passe à Mogneville à 21h01 dans une ambiance de folie. Plusieurs dizaines de spectateurs sont là pour fêter notre passage.

La nuit tombe, mon rythme aussi. Vivement le repos !

Successivement, Yves-Michel, puis les 3 premières féminines, Maggy, Irina, Tatiana, me dépassent.

J’entre enfin dans Bar le Duc, mais je sais qu’il me reste encore plusieurs kms interminables de traversée de cette ville déserte avant d’arriver à l’hotel. Huguette et Daniel m’accompagnent. Philippe, sentant ma baisse de rythme et se souvenant de l’an dernier, vient me ravitailler. Il me ravitaille régulièrement depuis le départ, parfois avec des produits que j’ignore, mais peu importe, je lui fais entièrement confiance, j’avale tout ce qu’il me propose. Ouais mais enfin là, vraiment, sa boisson a un gout infect ! J’obéis quand même, je bois tout, mais vraiment ça passe pas, beurk ! Enfin heureusement, j’arrive à l’hotel, ouf !

 

Je pointe à l’entrée de l’hotel à 00h11. De suite, j’entre dans la chambre, je m’allonge et je m’endors aussitôt. 1h45 plus tard, Philippe me réveille déjà. Putain, t’es sérieux, j’ai l’impression que ça fait à peine 2 min que je dors ! Mais ma montre donne raison à Philippe, c’est déjà bientôt l’heure de repartir.

On vérifie mes pieds, vu de l’extérieur ils sont dans un bien meilleur état que l’an dernier, mais je demande quand même de me poser des compresses sous mes avant-pieds pour amortir la douleur.

 

2h11, c’est reparti !

J’apprécie la relative fraicheur extérieure, car je trouvais qu’il faisait une chaleur terrible dans la chambre (mais je me suis quand même glissé sous la couette, va comprendre).

Par contre, j’ai toujours ce gout dégueulasse en bouche, mon système digestif n’a pas du tout apprécié le dernier ravito de Philippe, et il me le fait savoir. Car même si musculairement mon corps a apprécié la courte pause et a envie de relancer la machine, mon système digestif refuse. Et j’ai beau avoir 2 heures d’avance par rapport à l’an dernier, c’est loin d’être gagné.

Heureusement, après un bon moment difficile, je parviens enfin à vomir et à me débloquer doucement.

Je sais que j’ai perdu un peu de temps par rapport à l’an dernier, mais c’est minime, ce sera vite repris. D’autant que j’aperçois le gyrophare d’un camping-car quelques centaines de mètres devant moi. Je suis surpris, car les 5 hommes qui me précèdent devraient avancer bien plus vite que moi. En fait, il s’agit d’une féminine, Françoise. Je profite de ce point de mire pour relancer.

 

J’arrive à Ligny en Barrois à 4h35, et je dépasse Françoise peu après. J’ai environ 2h d’avance sur 2016, le jour se lève, j’ai un mauvais souvenir du prochain tronçon car je l’avais parcouru sous le déluge l’an dernier, mais bon, du coup  je me dis que ça ne pourra pas être pire cette année.

Enfin, ma confiance tombe vite, mon corps n’a pas apprécié ma relance, j’ai des contractures partout, je demande une petite pause pour me détendre.

Françoise repasse devant, et on va progresser ensemble, à peu près au même rythme, jusqu’à Gondrecourt.

Daniel marche à mes cotés pour essayer de me relancer, mais sans effet, je m’endors doucement sur un faux rythme.

 

Je passe à Gondrecourt à 9h47, toujours 2h d’avance sur 2016, écart stabilisé certes, mais sur le prochain tronçon l’an dernier, j’avais été accompagné par un ancien marcheur, Dominique Rouff, qui m’avait fait avancer à un bon rythme jusqu’à Grand. Donc une perte de temps est à prévoir cette année si je ne me réveille pas.

Alors Philippe intervient pour m’engueuler : il me dit qu’à ce rythme-là, je vais me faire éliminer comme l’an dernier, je ne serai jamais à Epinal dans les délais. Je râle, je ne suis pas d’accord, même si je sais qu’il a raison.

Huguette vient m’accompagner à son tour. Mais Philippe m’a énervé. Je donne mes consignes : je ne veux plus personne à coté de moi, c’est moi qui impose mon propre rythme. Par contre, comme il fait encore bien chaud aujourd’hui, je veux qu’on me ravitaille toutes les 10 minutes et qu’on me passe un gant mouillé pour me rafraichir.

Ça y est, c’est reparti, l’équipe est en place et la machine est relancée. Je ventile fort, c’est pas dans mes habitudes quand je marche, mais ça a le mérite d’être efficace.

 

Passage à Grand à 12h21, encore quelques minutes de gagnées par rapport à 2016, et je gagne une place car Cédric a abandonné ici.

Et maintenant le profil est plutôt descendant jusqu’à Neufchateau, ça devrait aller. Enfin c’est ce que je pense. Mais en réalité, aie ! Pourtant, cette descente parait sympa, en forêt avec de belles lignes droites (ça me fait penser au tronçon Millevaches – Meymac sur la MilKil), ça donne envie de courir. Oui, mais là je ne peux pas courir, je dois marcher ! Et ça commence vraiment à devenir une torture de garder cette jambe tendue.

Comme seule consolation, la température baisse légèrement car de gros nuages apparaissent, la route est mouillée par endroit, ceux qui me précèdent ont eu droit à un bel orage, mais apparemment le ciel a choisi de m’épargner.

Enfin, j’arrive en bas de cette descente, 3 – 4 km avant Neufchateau, j’ai trop mal, je demande une pause. Je reste debout, j’essaye de m’étirer et me détendre en m’appuyant contre le camping-car, mais je ne me sens pas bien, j’ai des étoiles devant les yeux, et je sais que je ne dois surtout pas m’asseoir, il faut que je reparte rapidement. C’est ce que je fais donc, mais cette approche de Neufchateau m’est particulièrement difficile, je me traine, d’autant plus que ce n’est pas la partie la plus agréable de parcours, il y a pas mal de circulation dans cette ville, heureusement j’ai un motard de l’organisation qui m’ouvre la route.

 

Je pointe à Neufchateau à 15h57.

Je repense à l’an dernier, c’était mon dernier pointage ici, j’avais à peine quelques minutes d’avance sur la barrière horaire, cette année j’ai 2h de marge supplémentaire, mais est-ce que ce sera suffisant pour arriver à Epinal dans les délais ??

Je cogite, il me reste 3 pointages avant Epinal que je ne connais pas, même si j’ai longuement étudié les temps de passage des éditions précédentes. Et pour être à Epinal avant 7h, je me suis fixé des passages à Gironcourt vers 21h, Mirecourt vers 0h, et Madonne vers 3h. Je suis pile dans ces objectifs, mais je n’ai aucune marge d’erreur, ça s’annonce tendu jusqu’au bout !!

Bon, assez réfléchi, je dois avancer !

Et pour sortir de Neufchateau, il faut remonter ce qu’on a descendu précédemment. Je m’en souvenais de l’an dernier, même si je ne me rappelais plus que c’était aussi pentu. Mais finalement cette montée passe bien, beaucoup mieux que la descente précédente. La tendance se confirme, je suis beaucoup mieux en montée qu’en descente. Du coup, je redoute fort la prochaine descente, très raide sur 1km, elle m’avait achevé l’an dernier, car j’avais du m’arrêter longuement dans le camping-car tellement j’avais mal.

Mais cette année hors de question de monter dans le camping-car ! J’aborde donc cette descente très prudemment, bien moins vite que la montée. Ça va, je passe cette descente sans m’arrêter, même si je grimace, mon corps est très douloureux, mais impossible de me relâcher.

En bas, je franchis la rivière, le paysage est joli mais je n’ai pas le temps d’en profiter. Je me souviens que maintenant je vais avoir une montée très raide, je me dis que ça va me faire du bien et ça va me permettre de me relancer. Oui sauf que j’avais oublié qu’avant d’attaquer cette montée, il y avait un peu de plat le long de la rivière. Et là, je n’y arrive plus, j’ai trop mal, je suis bloqué. Encore une fois, c’est la descente qui a gagné.

Je demande une pause, juste avant d’attaquer la montée de Certilleux. On me déplie une chaise et on fait un point avec toute l’équipe + un juge qui se trouvait là. On m’annonce que je suis maintenant 4ème, Pascal a abandonné à Neufchateau. On m’apprend aussi que Osipov, en tête, a pris un carton, ouais bah ça, ça ne va pas me faire arriver plus facilement à Epinal.

J’arrive à limiter ma pause à quelques minutes, mais qui furent bénéfiques, car même si j’ai du mal à me remettre debout, ensuite la côte de Certilleux me permet de rechauffer le moteur (bon ok il n’avait pas vraiment eu le temps de refroidir), et une fois en haut de la bosse, je repars sur un bon rythme sur une petite route en forêt bien sympa, que je n’avais pas pu apprécié l’an dernier à cause de la tombée de la nuit.

Pendant 1h, je vais poursuivre sur ce bon tempo, la confiance remonte, et je vais même commencer à délirer, parce que si 1 des 3 devant moi craque, euh …, bah oui vraiment n’importe quoi, je délire complètement ! Enfin heureusement il suffit d’une petite redescente pour me rappeler comme j’ai trop mal partout.

J’apprécie quand même cette fin de journée, par endroit il y a encore du monde sur le bord de la route pour nous encourager, et notamment quelques jolies filles de l’Est, je savoure.

 

J’arrive à Gironcourt à 21h04. Bah franchement, de jour, avec un vrai pointage avec du monde autour pour t’encourager, ça rend de suite ce village beaucoup moins sinistre que l’an dernier, perdu, tout seul, en pleine nuit.

Mais bon, pas le temps de faire du tourisme (et même si j’ai une allure de touriste), je dois continuer, d’autant que je flirte toujours avec la limite horaire fixée.

Désormais j’avance dans l’inconnu, et la tombée de la nuit ne va pas m’aider. Mon assistance l’a bien compris, je vais avoir besoin d’eux.

Jean-Hervé vient m’accompagner, et commence à me lire tous les encouragements que je reçois. Je suis extrêmement touché par tout ce soutien, et notamment par certains encouragements venant de personnes très chères à mon cœur mais que je ne vois que trop rarement. Tous ces encouragements me portent pendant plusieurs kilomètres et me rapprochent d’Epinal.

Mais à l’approche du prochain pointage à Mirecourt, alors que Jean-Hervé a fini sa lecture, la fatigue reprend le dessus, mes yeux se ferment, je n’arrive plus à les garder ouverts.

 

Je pointe à Mirecourt à 00h09, la fatigue est trop forte, je demande à dormir 6 minutes. Pourquoi 6 minutes ? Je ne sais pas vraiment, mais surement parce Samuel est né un 6, et puis avec le peu de lucidité qui me reste, je sais que je n’ai pas assez de marge pour dormir plus longtemps.

Bon voilà, Philippe ouvre le coffre de sa voiture dans laquelle il a posé un matelas, je plonge dedans et je m’endors instantanément.

Donc 6 min plus tard, on me réveille. Aie, ah ouais quand même, ça faisait longtemps que j’avais pas fait une telle grasse mat’.

Mais bon, pas le choix, faut repartir. Encore une barrière horaire à passer avant Epinal, et là, au niveau chrono, je ne sais plus du tout où j’en suis.

Heureusement, comme je l’ai dit précédemment, j’ai la chance de connaitre des amis formidables. Déjà, j’ai une équipe au top qui va m’amener à l’arrivée dans les délais. Mais là, une nouvelle personne va se joindre à nous. Une amie qui m’avait déjà assistée l’an dernier, et qui vient voir la fin du parcours jusqu’à Epinal. Il s’agit bien sur de Cathy, toujours accompagnée de sa fidèle chienne Dakota.

Ces retrouvailles avec Cathy me font penser à la 1ère MilKil en 2008, quand j’ai retrouvé Gilbert vers Faux la Montagne. Je ressens la même chose : l’arrivée me semble encore inatteignable, mais en même temps, j’ai de mon coté tout pour réussir, alors impossible que je n’y arrive pas ! Sinon je change de sport, je me met à la belote ou à la couture.

Bon, en attendant, revenons sur la route, maintenant je marche donc avec Cathy et Dakota, et je n’ai plus qu’une seule chose en tête, passer l’ultime barrière horaire à Madonne et Lamerey, désormais je n’arrive même plus à penser à Epinal, c’est devenu trop loin. Bon, en même temps, j’ai déjà suffisamment de mal à garder mes yeux ouverts.

On papote beaucoup avec Cathy, ça permet de me maintenir éveillé, mais mon rythme a bien baissé, et mon style ne ressemble plus à rien (bon, en même temps, il n’a jamais ressemblé à quelque chose).

En fait, une seule chose va me relancer (légèrement), c’est quand Serge va me dépasser. On s’encourage, je m’accroche pour rester quelques secondes à ses cotés. Mais il y a un tel différentiel d’allure entre nous 2 que je me mets à sérieusement douter de ma capacité à rester dans les délais. Alors je m’accroche autant que possible au point de mire de Serge, bien encouragé par Cathy et toute l’équipe.

 

Et enfin, à 3h09, je franchis l’ultime pointage à Madonne et Lamerey.

Bon cette fois c’est sur, j’irai jusqu’à Epinal. Mais il faut que j’y arrive avant 7h si je veux continuer, et ça, c’est pas encore gagné. Enfin j’espère quand même que j’ai pas fait tous ces efforts pour rien, ça serait vraiment con si près du but.

Heureusement, je suis toujours accompagné par ma super assistance, Cathy, Dakota, et toute l’équipe se relaie en permanence pour me maintenir éveillé, et tant que je ne m’endors pas, j’avance !

Toute l’organisation m’encourage aussi régulièrement. A une intersection, Jean Cécillon, directeur de l’épreuve, m’attend pour m’encourager. Au bord de la route que je dois prendre, je remarque (preuve que mes yeux sont encore ouverts) un panneau où il est écrit « route non déneigée ». Je le signale à Jean, mais il me répond que je peux continuer sans crainte, la route est bien dégagée. Ouf, j’ai eu peur, j’ai cru que même ici l’équipement neige allait devenir obligatoire.

5h, le jour se lève enfin, mais ça ne suffira pas à me réveiller, bien au contraire. Je suis à moins de 10km d’Epinal, Cathy, qui connait le coin, me détaille les derniers kilomètres, mais je ne l’entends même plus, je ne comprends plus rien, je suis trop fatigué, c’est interminable !

Dakota désespère de me voir avancer si lentement, elle tire Cathy pour la faire accélérer, je n’arrive plus à suivre mes accompagnatrices. Un juge nous rappelle à l’ordre, mes accompagnateurs ne doivent pas dépasser ma ligne d’épaule (en même temps, la ligne d’épaule, pour Dakota, mouarf).

Enfin voilà Epinal, mais ça tourne encore, ça monte, ça descend, je ne sais plus, c’est toujours autant interminable.

 

Samedi 3 juin, 7h37, après 55h33’07’’ de marche et 367kms parcourus depuis le départ, je franchis enfin cette satanée ligne d’arrivée de cette étape entre Château-Thierry et Epinal.

 

Vous n’allez pas me croire : je suis fatigué !!!

Tellement fatigué, j’ai à peine la lucidité pour tendre ma feuille de pointage à la chef juge, puis je plonge directement dans la voiture de Philippe et je m’endors instantanément, sans même avoir pris le temps d’embrasser Cathy et Dakota, quel malpoli je suis !

 

 

Je suis réveillé par le speaker qui annonce le départ de Tatiana puis Dmitriy, je suis à Plainfaing et il est 9h – 9h10. Enfin je suis réveillé, pas vraiment, mes oreilles ont simplement entendu du bruit, mais mes yeux sont encore bien fermés.

Je vais commencer à essayer d’ouvrir les yeux vers 9h30, mais ça s’annonce bien compliqué. Je suis allongé à l’arrière de la voiture, le coffre est ouvert, le soleil chauffe déjà bien, c’est agréable, et je vois pas du tout comment je vais pouvoir passer en position debout dans moins de 30 minutes.

J’ai beaucoup de mal à maintenir mes yeux ouverts, les minutes défilent, j’ai mal partout, je suis toujours allongé. On me parle, j’essaye de répondre, je sais que je n’ai pas le choix, il faut que je me lève.

L’équipe médicale passe me voir, je leur réponds que tout va bien, je suis en pleine forme, évidemment je n’ai aucune crédibilité, mais au moins ils me laissent tranquille pour le moment.

Je commence à émerger, même si je reste toujours allongé, je demande s’il y a un prix du grimpeur en haut du col du Bonhomme. Philippe part se renseigner, Gilbert vient me voir et me fait comprendre que ce n’est pas le moment de jouer à ça, la seule chose qui compte c’est d’être à l’arrivée et c’est pas encore gagné. En voyant la réaction de Gilbert, je réalise ma connerie, putain c’est vrai faut vraiment que j’assure maintenant, ça serait vraiment trop con d’arrêter si près du but.

Je passe en position assise, maintenant faut que je mette mes chaussures, ça aussi c’est pas gagné ! J’ai super mal aux pieds, enfin je devrai être habitué à cette douleur après tous les kms que j’ai déjà parcourus, mais en fait non, on ne s’habitue jamais à cette douleur, c’est toujours autant insupportable ! Je regarde mes pieds, et j’aperçois à travers la compresse posée par Philippe à Bar le Duc une énorme ampoule pleine de sang sur tout mon avant pied droit. Pas de temps à perdre, Philippe attrape une seringue et sans toucher à la compresse, il me vide l’ampoule, Il aspire 3 seringues de sang, il en reste encore, mais je lui demande d’arrêter, je sens que je vais tomber dans les pommes juste en regardant la seringue (finalement ça aurait été bien que mes yeux restent fermés).

9h55, ça y est, je suis debout, je me rends au départ et je salue les 5 encore en course qui partent à 10h avec moi.

 

 

10h, samedi 3 juin, Plainfaing, le départ de l’étape finale est donné.

Mes premiers mètres sont, heu comment dire, je ne saurai pas les décrire, mes sensations sont très bizarres. Dans quel état j’erre ?

En fait, le plus surprenant, sans doute pris dans l’euphorie de l’épreuve, c’est que j’arrive sans problème à suivre le groupe et je pourrais même accélérer.

Mais j’ai surtout en tête les recommandations de Gilbert, et je ne veux prendre aucun risque.

Les 2 premiers kms sont plats, ensuite on attaque la montée du col du Bonhomme. Jean-Hervé m’accompagne à vélo sur cette partie.

Donc les sensations sont bonnes, idem que pour toutes les montées depuis le départ. La pente est régulière, sans difficulté particulière.

Je me cale en 4ème position, quelques mètres derrière Florian, Maggy et Serge que je garde en point de mire.

 

Je pointe au Col du Bonhomme à 11h40, avec 50min d’avance sur la barrière horaire, ça commence à sentir bon quand même !

Et ici, il y a du monde pour m’encourager (j’étais à leur place l’an dernier). Et notamment Patrick, qui me demande s’il peut m’accompagner. J’accepte avec plaisir. Il m’explique que le marcheur qu’il devait assister a arrêté, et comme les marcheurs restants ont tous déjà plusieurs suiveurs à leurs cotés, il se propose de m’accompagner jusqu’à Ribeauvillé.

Mon assistance va pouvoir souffler un peu, et franchement, si je n’y arrive pas maintenant c’est que vraiment …

Intérieurement, je pense même que l’écart avec Serge qui me précède ne doit pas être si énorme, la 4ème place pourrait se tenter.

Enfin, pour le moment, je continue ma route vers le col du Calvaire. Et tant que ça monte, tout va bien !

Oui, mais avant le col du Calvaire, il y a déjà quelques petites redescentes. Et dès la première petite descente, aie, une douleur me foudroie tout le corps et m’arrête net.

Je grimace de douleur, j’essaye de repartir doucement. Cette fois j’ai bien compris que ça sera difficile jusqu’au bout. Et désormais je n’ai plus qu’une seule idée en tête, atteindre la ligne d’arrivée et mettre fin à cette souffrance.

Je franchis le col du Calvaire vers 12h45, et je plonge dans la longue descente. Yves-Michel me dépasse dès les premiers mètres de descente, la différence d’allure entre nous 2 me désespère.

Cette descente du Calvaire aurait été un régal à courir, mais là, descendre en marchant est un vrai calvaire. J’avance au ralenti, j’aimerai ne pas me prendre de carton, mais je sais que j’en mériterai un, mon geste ne ressemble vraiment  plus à rien.

Les jolis paysages autour du Lac Blanc n’atténuent pas ma douleur. On discute un peu avec Patrick, mais même ça est devenu difficile. Et cette descente est interminable, je n’en vois pas la fin.

Claudie me rattrape à l’entrée de Orbey. Elle m’encourage, elle me conseille surtout de me redresser, car je suis complètement courbé par la fatigue (je n’en ai pas du tout conscience pendant l’épreuve, je le verrai après sur les photos), et l’équipe médicale me surveille attentivement, il ne faudrait pas qu’ils m’arrêtent si près de l’arrivée.

 

Je pointe à Orbey à 14h46, allez il ne me reste plus qu’un seul pointage à passer avant l’arrivée.

Après une belle matinée ensoleillée, le ciel s’est bien assombri, et un gros orage éclate en sortant de Orbey. Par chance, il y a un abribus au bord de la route juste au moment où il commence à pleuvoir, et j’en profite pour m’y abriter le temps d’enfiler ma veste de pluie.

J’ai des brulures partout sur le corps, et particulièrement sous les bras. Tout contact avec un textile est devenu insupportable, et j’espérais bien pouvoir aller jusqu’à l’arrivée en short / débardeur. Mais la pluie est forte, l’eau est froide, je suis encore loin de l’arrivée, donc je suis obligé de me protéger. Je choisis de mettre directement sur ma peau ma veste de pluie WAA, puis, par-dessus, mon débardeur du club avec le dossard. En temps normal, le contact peau / rain jacket n’est déjà pas agréable, mais là, avec les brulures, c’est juste horrible ! Je ne veux plus bouger le haut du corps tellement j’ai mal. Mais si je ne balance pas mes bras, impossible d’avancer. Putain, c’est pas possible, je ne vais pas y arriver ! Je prie pour que la pluie cesse rapidement.

Mais cette grosse averse va durer un certain temps, je ne sais plus combien de temps en fait, mais ça m’a paru une éternité. Heureusement que j’ai toujours ma super équipe autour de moi pour me soutenir.

Pendant cette averse, je me souviens qu’on a perdu le marche-pied du camping-car, j’ai sursauté en attendant un grand bruit, heureusement plus de peur que de mal.

Et quand la pluie cesse enfin, Philippe me propose de changer mes chaussures trempées. Mais je refuse, je veux faire l’intégralité de l’épreuve avec la même paire de chaussures, des Newfeel propulse walk 400 recommandées par Emmanuel. Ces chaussures sont parfaites pour la marche, à condition d’en changer régulièrement, car ici après + de 400kms (+ 317kms l’an dernier + des 24h, donc + de 1000kms au total), elles manquent cruellement d’amorti. Mais le bonhomme n’a plus la lucidité pour penser à ce détail. Et c’est pour cela que Philippe insiste pour que je change de chaussures. Mais je suis + têtu que lui, je m’obstine à garder mes chaussures, et je commence à m’énerver : « putain, mais il va me laisser tranquille avec mes chaussures ! ». Philippe finit par abdiquer à l’entrée de Kaysersberg.

 

17h08, je pointe à Kaysersberg, ultime pointage avant l’arrivée. Cette fois-ci, c’est bon, je vais pouvoir profiter maintenant. Enfin c’est ce que je crois.

Le village de Kaysersberg est magnifique, avec ses maisons typiquement alsaciennes, et ses petites ruelles pavées. Mais un secteur pavé dans un lieu se terminant en –berg, ça sentait le piège, j’aurais du me méfier. Je n’ai jamais traversé la trouée d’Arenberg à vélo, mais je crois que j’ai trouvé pire, la traversée de Kaysersberg à pied ! Enfin, en tout cas, dans mon état de fatigue, marcher sur ces pavés relève de la torture. C’est le supplice ultime !

Et pendant ce temps, Philippe se marre et il a bien raison, quel con je suis d’avoir refusé un meilleur amorti en changeant de chaussures !

Enfin, je sors de Kaysersberg, ouf je revis, j’ai envie d’embrasser le goudron tellement c’est agréable de marcher dessus.

On tourne à gauche et on attaque la dernière montée dans les vignes. Cette fois, j’apprécie vraiment !

Je savoure cette traversée des vignobles alsaciens, pendant que le soleil refait son apparition.

J’arrive à Riquewihr, encore une petite traversée pavée, je ne suis plus à ça près.

Un panneau indique Ribeauvillé à 4km, je suis surpris, je ne me croyais pas si près. Je demande confirmation à Philippe, il me rassure en me disant qu’il reste encore une bonne dizaine de kilomètres, pourquoi faire court quand on peut faire long, j’adore !

Il me reste encore à traverser Beblenheim, puis j’attaque le périphérique de Ribeauvillé. Je me souviens bien de cette petite route l’an dernier, elle était complètement inondée. Elle est bordée de cerisiers, Philippe me cueille quelques cerises, je prends le temps de les déguster. Je savoure vraiment ces derniers kilomètres. Les motards de l’organisation m’attendent à chaque carrefour pour fermer la course, et ils m’encouragent bruyamment.

Dernier changement de direction, je tourne à gauche sur la D106, dernière ligne droite jusqu’à Ribeauvillé.

Les motards me dépassent une dernière fois dans un concert de klaxons d’encouragements.

Je redonne du rythme à ma marche, je ne sens plus mes douleurs, je suis porté vers l’arrivée.

Il est 20h, je m’arrête quelques instants à l’entrée de Ribeauvillé pour attendre toute mon équipe et savourer avec eux ces derniers mètres de bonheur.

Je croise et je félicite Claudie arrivée 30 minutes avant moi.

Beaucoup de monde pour mon arrivée, beaucoup d’émotions aussi, je n’ai pas de mot pour décrire ce moment inoubliable !

Ça y est, je l’ai fait, j’ai terminé le mythique Paris – Alsace !!! 5è homme en 65h47min36s.

 

 

 

Un immense MERCI à ma super équipe d’assistance pour son aide inestimable, impossible d’être à l’arrivée sans vous ! Nous n’étions pas les + nombreux, mais j’avais les meilleurs avec moi !

 

Merci à toute l’équipe d’organisation pour ce travail incroyable, et pour que cette épreuve mythique vive encore longtemps !

 

Merci à tous ceux qui m’ont suivis et encouragés, de près ou de loin !

Je ne cite pas de nom pour n’oublier personne.

 

Merci à mon club UST Courir à St Tropez, j’ai été fier de porter le maillot du club pendant toute l’épreuve et je suis très fier d’être le 1er Varois à l’arrivée ! J’espère juste qu’il ne faudra pas attendre 91 ans pour voir un second varois me succéder.

 

J’aurais pu remercier mes sponsors, mais comme je n’en avais aucun au départ, ce sera pour une prochaine fois.

 

Et bien sur j’embrasse bien fort mes enfants, Sasha & Samuel, vous êtes mon moteur, vous me faites avancer !!

 

 

Et pour conclure, une petite analyse, après quelques mois de recul.

Paris – Alsace est de loin l’épreuve la plus difficile à laquelle j’ai eu l’occasion de participer.

Certainement parce que je suis un coureur et non un marcheur. Je n’ai aucune technique de marche, et je l’ai bien senti.

L’intensité de l’épreuve est une des principales difficultés. Pour donner une comparaison, sur Paris – Alsace, j’ai ressenti la même intensité que quand je cours un marathon en moins de 3h, sauf que là, l’épreuve dure 65h.

Sur une MilKil, quand je suis fatigué, je m’arrête, je me repose, et je repars quand ça va mieux.

Sur un Tor des Geants, le parcours t’offre beaucoup de moment de récupération, c’est la montagne qui impose ton rythme, et dès que ça redescend, dès que le terrain est plus roulant, tu peux facilement récupérer.

Tandis que sur un Paris – Alsace, aucune récupération, aucun relâchement n’est possible.

Surement que si j’avais eu une technique de marche, j’aurais pu me relacher un peu dans les descentes, mais là, au contraire, c’est dans les montées que j’essayais de récupérer.

Je me suis essayé à la Marche en 2014 pour préparer des courses. 3 ans plus tard, mon expérience de coureur m’a permis de venir à bout du Monument de la Marche de Grand Fond.

 

Alors amis coureurs, amis trailers, je vous invite tous à venir essayer la Marche. Vous y découvrirez une ambiance et des personnes formidables, vous y apprendrez beaucoup, et cela vous rendra encore + fort pour vos prochaines épreuves.

 

Au plaisir de partager quelques kilomètres avec vous.

 

5 commentaires

Commentaire de Kashmir57 posté le 29-12-2017 à 20:45:33

Tres beau récit et tres grosse performance .Encore bravo !!

Commentaire de banditblue29 posté le 30-12-2017 à 09:12:29

Merci pour ce récit, bravo pour la performance :-).

Commentaire de Bert' posté le 31-12-2017 à 18:05:42

Tu es un sacré Géant Alex !!
Et ton récit met bien en perspective l'énormité d'une telle épreuve...

Tu peux être sacrément fier de toi pour très longtemps :-)

Commentaire de Jean-Phi posté le 06-01-2018 à 16:49:31

Chapeau Alex ! Tu es vraiment un grand fou, attachant et quel champion !!! Bravo !
Tu as de quoi être fier. Pas certain que beaucoup de coureurs puissent boucler ce genre de périples.

Commentaire de La Tortue posté le 30-03-2018 à 01:27:07

total respect !

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