Récit de la course : Black Mountain Trail - Coupo Cambo 2016, par Pastisomaitre

L'auteur : Pastisomaitre

La course : Black Mountain Trail - Coupo Cambo

Date : 5/3/2016

Lieu : St Amans Valtoret (Tarn)

Affichage : 2352 vues

Distance : 55km

Objectif : Pas d'objectif

12 commentaires

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Un pied dans l'ultra

 

 

Je me préparais psychologiquement depuis quelques jours à subir des mauvaises conditions pour mon 2ème Black Mountain Trail, j’imaginais ce qui pouvait m’attendre, mais j’en demandais pas tant…

Je m’apprête à partir sur une course qui est de loin la plus difficile à laquelle je me suis aligné jusqu’à maintenant, que ce soit en distance ou en dénivelé, et je dois dire que je suis pas en pleine confiance et que je sens un peu de pression en moi depuis quelques jours.

J’ai beaucoup bossé le D+ ces dernières semaines, par des allers-retours fastidieux mais forcés sur une bonne côte bien raide près de chez moi. Rien de semblable néanmoins avec ce que je vais grimper ici, mais les jambes sont entrainées à la montée et le buste l’est aux bâtons, c’est l’essentiel.

Bien entendu, cette appréhension augmente en voyant les commentaires de l’orga sur les réseaux sociaux quant aux conditions sibériennes qui nous attendent.

55 kilomètres pour 3500 D+ sont annoncés, une course qualificative pour l’UTMB, ce qui met un peu plus la pression !

Levé 4h, je prends la route, un stop en cours de route pour prendre mon père, qui m’accompagne souvent sur mes courses, et ça me fait bien plaisir.

Nous arrivons sur place à Saint Amans Soult, le temps fidèle aux annonces, glacé dans la vallée, j’imagine déjà les sommets !

Retrait du dossard avec des rappels partout quant au matériel obligatoire, j’avale le petit dej gentiment servi par les bénévoles et je vais enfiler mes multiples couches de vêtements pour partir à l’assaut du pôle nord.

Tout est prêt !

En place dans le SAS de départ ! Je montre Remy Jegard à mon père en vantant sa participation prochaine à une 2ème Barkley, l’immense classe, rêve de tout trailer malgré l’enfer que chacun y vit ! J’adorerais y être même en spectateur tant l’ambiance qui se dégage de cette course est étrange.

Faire un tour là-bas, de nuit qui plus est ! Ça doit laisser des marques à vie !

Il est 8h.

Pan ! le départ !!

Je me suis préparé psychologiquement, je connais une partie du parcours pour avoir fait les 32 kms l’an dernier mais je connais surtout sur le bout des doigts le profil de la course du jour, je l’ai également plastifié et le garde à portée pour appréhender chaque difficulté.

Ca court vite devant, comme d’habitude. Je suis moi-même au milieu du peloton, comme d’habitude.

Quelques mètres de route, et on part directement dans les chemins. Je connais le coin, ici pas de  route, quasiment que de la monotrace, la montagne n’est pas très haute, mais elle est magnifique.

La première difficulté arrive sans tarder, ça commence à monter tranquillement, le peloton ralenti et il y a un premier bouchon, un des seuls de la course d’ailleurs.

Un peu moins de 300 D+ sur cette première montée relativement courte, la pente se durci et devient difficile, mais on arrive assez vite sur une piste large qui redescend aussi sec dans la vallée, non loin du village de départ. Juste avant de retrouver la route, il y a un chemin qui prends sur la droite, des bénévoles en quad barrent la route.

On est au kilomètre 3 et j’attaque la deuxième montée, 3 bons kilomètres assez raides, que de conforts avec les bâtons. Je suis calé dans ma course, je ne double pas, je me fais pas doubler, je reste concentré.

J’ai très peu de souvenirs bizarrement de cette 2ème montée de 543 D+ ainsi que de la descente qui a suivi, j’étais complètement dans ma bulle. J’ai juste un souvenir de bourbier ! Certaines portions étaient à la fois raides et marécageuses, j’avais parfois de la gadoue jusqu’aux cuisses. Le genre de gadoue qui colle pas, heureusement, mais qui nettoie les chaussures, et qui rends l’ascension beaucoup plus difficile.

Arrivé au sommet, ça redescend aussi sec.

En fin de descente, on arrive sur ce genre de paysage qu’on voit beaucoup dans cette montagne noire, une petite vallée encaissée, un sol couvert de feuilles mortes jaunies, pas une ronce ou une fougère, un bois impeccable et une petite rivière claire qui serpent au milieu. Un monde à part.

On et au km 10, je repère une route qui arrive jusqu’ici, il faudra que je repère le lieu sur mon parcours pour y revenir en famille.

Le peloton commence à se disperser, j’ai plus d’espace. Vient la 3ème montée de presque 450D+ sur un peu moins de 3 kilomètres. Je suis un gars que je vais tenir toute la montée, un vétéran qui a pas mal d’expérience apparemment, il est du coin et connait bien cette montagne, on échange un peu sur les objectifs de la saison. De son côté il la finira à l’Endurance Trail, 100kms. On échange sur les Templiers qu’il a déjà fait, une course à laquelle j’adorerais participer. L’année prochaine surement…

La côte est extrêmement raide ici, je pense pas me tromper en disant qu’elle tourne au minima à 40%, on monte directement à flanc de colline sans faire de lacets. Je perds mon camarade qui me distance un peu, j’arrive plus haut où je peux accélérer le pas, le chemin serpente dans la forêt et en sors pour arriver sur une crête au milieu d’herbes hautes, on est aux alentours de 800m d’altitude et le gel commence à se montrer. Je peux me remettre à courir sur le plat.

« Il neige » ! une fille de l’orga me réponds que ça va être bien plus dur la haut. Dans quoi me suis-je fourré ?

Il neige à gros flocons ici et j’attaque la descente, la neige se transforme en humidité, ce sera l’histoire de la journée finalement.

Et une autre vallée paradisiaque.

J’attaque la 4ème montée, toujours dans le même style, raide par portion, beaucoup de monotraces, je suis concentré sur mes bâtons. On est au km 17 environ, on attaque encore 470 D+, je me sens frais physiquement, pas de douleurs, je suis bien. Mentalement ça va, j’ai des moments d’évasion qui me font oublier l’effort et des moments où je me rends compte de ce que j’ai fait et surtout de ce qui me reste à faire. Le mental c’est le plus dur, ça se travaille mais faut pas se laisser dépasser.

Ici il m’arrive d’imaginer tout ce qui reste à parcourir, 17 kms c’est une belle distance, je suis fier et heureux d’avoir fait tout ça (moral en hausse), mais je me dis qu’il en reste presque 40 ! Soit un marathon ! Et quand on s’imagine l’énormité de cette affirmation, le moral baisse en flèche et je suis persuadé que beaucoup d’abandons se font ainsi, qui plus est ici où le froid est de mise et ou, même si je l’ai pas forcément souligné, le parcours est extrême de par son état ou son dénivelé.

Tous les trailers l’ont lu sur internet ou dans des magazines, mais le vivre c’est vraiment autre chose : j’ai coupé la course en étapes avant de la commencer, et je m’en tiens à ça. 1ère montée, 1,5 kms environ (effort), puis je descends environ autant (repos), puis deuxième montée, environ 3 kms et autant de descente. Une succession de petites victoires, de moments d’efforts suivi par des périodes de repos. J’ai découpé le parcours de 55 kms en 8 montées et 8 descentes, soit des parcours de 3-4 kms à chaque fois, de petits objectifs en petites victoire, on mange les heures et on arrive au bout en ne prenant que du plaisir !

C’est facile à dire, plus dur à faire, mais ça marche.

Alors sur ce parcours, quand on se rend compte que les moments de descentes, donc de repos, se transforment en calvaire car hyper raide et glissant, il faut savoir rester positif !

Je grimpe donc la quatrième montée.

Dans un moment de fort pourcentage, je vois les gars devant moi disparaitre derrière un buisson, mais j’aperçois également des gars en bas de la vallée grimper la montagne à pic, je pense redescendre toute la montagne pour la remonter aussi sec.

En fait non. On arrive à un croisement où on rejoint la trace du 36kms, beaucoup de monde ici, on intègre une sorte de peloton.

Ça me fait d’ailleurs plaisir, car même avec 2h de plus qu’eux dans les jambes, je double pas mal de monde dans ce peloton, pour finalement me retrouver avec un gars avec qui je vais passer  ¼ heure de montée.

Je ne connais pas son nom mais nous échangeons sur le fait qu’il vient de Charente Maritime, et est venu exprès pour le BMT, c’est son premier vrai trail de montagne. Si tu me lis, j’espère que tu es arrivé au bout sans encombre !

On sort de la monotrace pour rejoindre une piste beaucoup moins raide, on court un certain temps, d’autres gars nous suivent. Des coureurs viennent d’en face en faisant des signes.

Plus de balisage ici, on a du louper une intersection. Pfffff… ça m’énerve, j’espère ne pas avoir perdu trop de temps.

Retour sur nos pas.

Effectivement quelques centaines de mètres en arrière il y avait une bifurcation pour reprendre la montée via une monotrace, le balisage était correct mais je pense qu’un bénévole ou une bonne rubalise en travers du chemin n’aurait pas été du luxe.

Enfin on aura pas perdu beaucoup de temps.

Je perds mon compagnon de route sans trop m’en rendre compte, on arrive en haut de cette 4ème montée et attaquons une descente dont je me souviendrais longtemps.

Elle n’est pas très longue, 2 kms à tout casser, mais extrêmement raide, tellement qu’il est difficile de tenir debout à flanc de colline sans s’accrocher avec les mains, la même sensation qu’au ski quand on attaque une bonne piste rouge en se mettant en travers pour attendre quelqu’un, les skis tiennent pas et on descends quand même.

En plus ici, il y a beaucoup de monde, en majorité des coureurs du 36 kms et le terrain est très gras et donc friable sous les pieds.

Je mélange course et glissade, en m’asseyant sur mon pied gauche, jambe droite en avant, et en glissant comme sur une luge, très efficace ici ! Faut faire gaffe à pas y laisser un bâton surtout.

Je double du monde et reprends un peu d’espace. En bas serpente une superbe rivière, j’y arrive finalement et la traverse en y allant carrément les 2 pieds dedans car je loupe le premier rocher. C’est froid, tant pis.

Un peu plus de 400 D+ sur la 5ème difficulté du jour.

Pas loin de 1700 D+ dans les pattes et pas de sensations désagréables, je suis content, l’entrainement porte ses fruits.

Dans le courant de la montée, un gars me regarde avec un sourire et me demande ou j’en suis de la course, je lui dis que je suis au km 25, presque la moitié. C’est une sensation étrange que d’être le gars qui fait 55 bornes parmi ceux qui en font 35, je l’ai vécu l’an dernier dans l’autres sens, quand je croisais des coureurs du 50kms, je les regardais admiratif en me disant qu’ils étaient tarés, que j’en chiais sur 32 alors qu’ils en faisaient 18 de plus !

Cette année, je me sens dans l’autre camp, c’est excellent pour le moral mais c’est en même temps stressant car on se dit qu’il reste pas mal de route et que finalement si on avait choisi 35, on serait pas loin de la fin !

Le 2ème ravito apparait tout en haut de la montée, on doit être aux alentours de 900m d’altitude ici et il y fait bien froid.

Je m’arrête pas au ravitaillement mais je fais une pause éclair étirement. Le haut des cuisses commence à tirer, les douleurs habituelles qui surviennent bien plus tard que d’habitude, je m’étire quelque secondes et je me sens beaucoup mieux, j’attaque la descente sans aucune douleur, comme si je venais de prendre le départ !

Je guette ma montre depuis le début, car je sais que le portail de Nore fait office de barrière horaire à partir de 17h, ce qui représente 9h de couse pour environ 47 kms, c’est un peu tendu étant donné le terrain et le temps. Je fais gaffe à tenir un certain rythme pour pas me faire avoir !

J’approche les 30kms et je sais que j’ai encore de l’avance, mais je vais quand même garder un œil là-dessus.

Ca descend et je quitte la trace du 36kms, que je retrouverai plus tard. Je pars tout droit dans la descente tandis que le 36 pique à gauche direction le pic de Nore.

La descente se fait sur une piste bien large, je vois un mec devant moi, à une centaine de mètres, tout à coup j’aperçois un groupement de rubalises sur la droite, et voit une monotrace qui file dans la forêt.

Le gars l’a pas vu et est parti tout  droit. Tant pis pour lui il avait qu’à faire attention.

Non je plaisante ! Je cris un grand coup en lui faisant un geste explicite, il fait demi-tour.

Arrive encore une portion bien difficile ! Devant moi se trouvent un coureur et une coureuse, à environ 200m, je les vois descendre au ralenti et comprends pourquoi.

Une sorte de marécage terrible dans  la descente, impossible de l’esquiver, les pieds dans la gadoue jusqu’aux genoux, les cailloux qui rentrent directement dans la chaussette.

Ce calvaire dure un bon moment, peut être un bon ¼ d’heure. Je passe devant les deux coureurs et reprends un peu de vitesse pour finir la descente.

Je sais que le km 33 marquera le début de la montée vers le pic de Nore, je sais aussi que cette montée fera environ 7 kms, la plus longue du parcours, mais je sais aussi qu’elle est facile car faite de pentes à faible pourcentage qui me permettront d’avancer vite, voire de courir sur certaines portions. Je pense que c’est à peu de choses près la même montée que celle faite l’an dernier.

Je fais un break avant de démarrer la montée pour tirer encore un peu sur l’arrière des cuisses. Ça soulage instantanément et je suis tranquille pour des kilomètres !

La montée commence tranquillement, les 600D+ vont être une partie de plaisir.

La neige apparait au sol à l’approche des 1000m.

3ème ravito, je m’arrête.

Les mecs de l’orga sont bien entamés ici, bière, Ricard, rouge, ils ont tout ce qu’il faut pour pas avoir froid, et je pense qu’ils savent s’en servir ! En tout cas il y a ici des produits du Tarn : saucisson, bougnette, saucisse! Je me sers copieusement et m’assoit 2mns.

Je fais le plein de coca et je repars en les saluant. Je le sais, je vais roter 2kms maintenant.

Ca rate pas.

Finalement, je marche sur une bonne couche de neige. J’aperçois 2 coureurs devant moi, un peu en galère apparemment. Je vois qu’ils ont un dossard bleu, c’est des coureurs du KV.

Il est 15h, ils sont encore dans la montée, donc à leur 7ème km environ, ce sont des retardataires.

Je les double rapidement et continue la montée. Arrive un croisement, 2 filles pleines de sourires arrivent de la gauche, elles sont sur le 36.

En me voyant, l’une d’entre elle s’exclame « J’y crois pas, t’es plus en forme que nous !! ». Je les encourage à mon tour en leur disant que le sommet est proche et qu’il reste pas beaucoup de difficultés. Elles me laissent passer, je pique à droite dans une monotrace sous les bois, le chemin descend légèrement, puis remonte. Je double un autre coureur du 35 qui m’avoue en chier royalement, je pense l’avoir achevé en lui expliquant qu’on était presque au pic de Nore et qu’il allait devoir encore descendre à Pradelle pour remonter sur le Pic de Nore une deuxième fois.

J’espère qu’il a pu finir.

Cette monotrace est très belle, elle serpente dans la forêt et fait tâche au milieu de la neige.

Je suis presque à 1100m d’altitude et le moment tant attendu arrive, je connais le pic de Nore, je sais qu’il est « pelé »  sur son sommet, donc sujet au vent, et vu qu’on est carrément dans les nuages et qu’il fait bien froid, je pense que ça va donner.

Je sors du bois et arrive directement sur la route, on va la suivre jusqu’à la grosse antenne se trouvant au sommet.

Ici, c’est le blizzard, il y a un vent absolument terrible, tout est glacé autour de moi. Je ne vois pas à 1m, il doit faire au maximum -15°C  de ressenti comme l’avait laissé entendre l’orga. Des morceaux de glace sont projeté sur moi à l’horizontale tellement le vent est fort, je monte mon Buff jusqu’en dessous des yeux pour ne pas avoir le souffle coupé et regarde mes pieds car il m’est impossible de regarder devant moi avec cette glace qui me rentre dans les yeux.

J’ai l’impression que les 100 derniers D+ ont duré 1h. Un gars marche derrière moi, on échange un regard de compassion.

Je repère une ligne haute tension au-dessus de ma tête, un gros bruit de tonnerre résonne de manière assez impressionnante, je pense que c’est l’effet de ce blizzard sur les lignes.

J’arrive au sommet mais n’ai même pas aperçu l’antenne tellement la visibilité est réduite.

Des gars de l’orga habillés en Sibériens, qui plantent là-haut toute la journée (courageux les gars) me dirigent tant bien que mal vers un chemin qui redescend tout droit dans la vallée. J’entendais rien à ce qu’ils disaient !

Le chemin pique à travers les lacets de la route, je retrouve très vite un climat normal, en grattant les D- à vitesse grand V.

Je repasse sous les nuages, retrouve l’humidité en lieu et place de la neige et aperçois le village de Pradelle Cabardes niché sur la montagne.

Un tout petit village à l’entrée du bois, donnant directement sur le pic de Nore dont le sommet apparait clairement dans les nuages, je longe une rivière que je fini par traverser et entre dans la village par la route. Je traverse les petites rues et arrive sur une place à laquelle j’accède en montant un escalier de pierres.

On est à environ 800m d’altitude et je trouve un ravito vachement sympa. Des gens déguisés, de la soupe chaude, beaucoup de gentillesse.

On discute un peu avec les autres coureurs, je mange beaucoup salé ici.

On est au km 42, j’ai très bien géré l’alimentation tout le long de la course, en mangeant Lions, Mars, Twix et lait concentré régulièrement.

Jamais je n’ai connu un coup de mou, la régularité a fait son effet, même si manger était forcé de temps en temps.

« Vous pouvez aller vous réchauffer sous la tente si vous voulez ».

Je décline directement l’invitation, à ce stade de la course, quand on sait qu’on doit grimper encore sur Nore et retrouver le blizzard, ceux qui vont s’assoir au chaud dans la tente n’en ressortent plus !

« Au revoir tout le monde ! » j’ai un marathon dans les jambes, 30s d’étirement et je repars en courant comme si de rien n’était. Je n’ai jamais vécu une aussi bonne sensation de bien-être en course, c’est royal. Le genre de moments où on se souvient des sorties matinales excessivement difficiles et où reconnait enfin que les souffrances qu’on s’est infligé dans les séances de fractionné ont finalement une utilité. On est capable de se dépasser, de repousser des limites qu’on pensait inatteignables des mois auparavant.

Il reste 1h10 avant la fermeture du Pic de Nore.

Je suis large.

Il reste 3kms de montée, les derniers et ensuite, descente !

Je gère mon planter de bâton le sourire aux lèvres. Je sais à ce moment-là que je vais aller au bout, et je sais que je vais arriver en restant frais. Je suis ravi.

Je me concentre néanmoins sur ma montée, 400 D+ pour retrouver la tempête.

J’aperçois des coureurs devant moi, finalement j’en doublerai une dizaine jusqu’en haut, tous plus cramés les uns que les autres.

Un vétéran me demande combien il reste de montée, l’ayant demandé à l’orga 30s avant, je lui dis qu’il reste 10mn environ.

« l’orga, c’est de connards » qu’il me répond.

Vachement sérieux, il en chie tellement qu’il met en doute les dires des bénévoles.

Je me marre et lui précise qu’il reste 100 D+ environ en regardant ma montre, donc quelques centaines de mètres tout au plus.

Ma montre rend l’âme à ce moment-là d’ailleurs. Un peu plus de 8h de batterie, c’est le tarif. 45 km, c’est pas grave car je sais exactement ce qu’il reste à faire maintenant.

Me revoilà donc dans la tempête de glace, j’aperçois par contre la majestueuse antenne, qu’on voit à des dizaines de kilomètres par beau temps.

Le gars qui arrive en face se fait refuser la descente à Pradelle, trop à la bourre...

Je félicite les bénévoles de rester plantés dans ce froid. Ils me répondent. Ils sont vivants.

Je connais le chemin qui file droit au portail de Nore.

Il est gelé et alterne petites montées et petites descentes, je cours et double encore beaucoup de monde ici, on perd un peu d’altitude sur environ 2-3 kms et on arrive au portail. C’est un endroit à l’entrée du bois avec un ravitaillement fermé, une sorte de cabane bâchée.

Dedans, c’est la folie, musique à fond, lumière de soirée !

Les gars et filles déguisés en moines, bien attaqués par l’apéro, encore un ravitaillement gargantuesque. J’attaque crêpes au fromage, au chocolat, saucisson etc…

Le moine devant moi me propose son vin chaud, je refuse et accepte finalement quand il me tend la louche fumante. Je goute et en prends finalement un verre tellement ça fait du bien !

Je décline la bière par contre ! Elle m’attend à l’arrivée de toute façon.

Je range les bâtons derrière le sac, plus besoin maintenant.

Petit « check » aux 2 moines devant moi, je les remercie pour l’accueil mémorable et attaque la descente. Je l’ai fait qu’une fois mais je la connais cette descente, hyper technique mais très agréable, je l’ai fait  fond l’an dernier et pris beaucoup de plaisir.

Aussi invraisemblable que cela puisse me paraitre, j’ai encore les cannes ! Je me sens bien !

Je pars et me retrouve vite dans un groupe de 4 coureurs. On est en file indienne. L’un d‘eux prends un peu d’avance, le gars devant moi se laisse doubler et se fait distancer. Le gars parti devant s‘arrête et attends son pote, le gars qui a ralenti.

On se retrouve à deux, je suis le gars devant moi qui a l’air de vouloir envoyer et ça tombe bien car je compte faire pareil.

Le chemin est fait de parcelles de monotraces techniques, avec racines, cailloux, boue et ruissèlement.

On court à pleine vitesse, 12-14 km/h peut-être, en plaçant les pieds à travers les obstacles. La sensation de vitesse et géniale, le gars accélère de temps en temps sur les portions plus roulantes, je le lâche pas d’une semelle, puis on repars de nouveau sur une portion technique, un pied dans l’eau, l’autre au-dessus de la racine.

On double énormément de monde dans la descente, « gauche !! », « droite !!! ». Les gars se poussent et on file pleine vitesse.

On passe la croix à l’aplomb du village, on y est presque.

Les 7 kilomètres partent vite, j’aperçois un bénévole au bout d’une ligne droite et on arrive finalement à la route.

Ultime descente, ultime accélération, je me mets à côté de mon compagnon de route.

Je lui dis « super descente !! » il est ravi et me retourne le compliment. La ligne d’arrivée est visible, il faut gravir une petite montée qu’on fait en sprint pour passer la ligne côte à côte. On se serre la main, on jubile tous les 2 du bon moment passé dans cette descente.

Les jambes sont bien, très bien même, je suis agréablement surpris.

J'apprends qu'il y a eu quelques problèmes sur les coureurs de tête, un problème de balisage puisque le classement a été modifié et des coureurs disqualifiés.

 

Bref peu importe.

 

9h27 au final, 85ème sur 250 partants, une bonne trentaine d'abandons également uniquement sur le 55.

Je suis vraiment ravi de ma course, en forme tout le long, pas de coup de mou, un mental impeccable, et pourtant il était facile de se relâcher !

S'en suis la routine d'après course, la bière, on regarde les résultats, on sent l’acide lactique qui commence à envahir les cuisses..

Prochaine étape, les Citadelles fin mars. Il parait que c’est une bien belle épreuve.

Je rentre la tête pleine d’images.

Merci à mon père de m'accompagner et de prendre des photos souvenirs!

 

 

 

12 commentaires

Commentaire de Galopaïre posté le 10-03-2016 à 05:57:28

Ouaaah!
Tu prends des notes en courant pour réussir à écrire un récit aussi détaillé?
En tout cas jolie course. Elle n'était pas facile et la gestion était, comme souvent, la clef de la réussite. Pour une première sur ce format c'est un vrai succès. Bravo.

Commentaire de Yvan11 posté le 10-03-2016 à 09:08:38

Belle course et très bon récit.
Ne négliges pas la recup avant les Citadelles et la course va te paraitre facile après cette épreuve là !

Commentaire de philtraverses posté le 10-03-2016 à 20:52:36

Je confirme ce que dit le yvan. Ayant fait les citadelles, tu peux être persuadé que même si la distance est plus importante cette course va te paraitre facile, la technicité étant largement moindre que celle du coupo cambo.

D'ailleurs le temps sur le 55 de ce coupo cambo est à peu prê,t à mon avis, équivalent à celui sur le 70 des citadelles. Mais n'oublie pas la récupération

Commentaire de laulau posté le 10-03-2016 à 21:21:18

J'avais prévu d'y aller mais comme personne ne voulait venir avec moi, j'ai renoncé...sans regret ! Bravo pour ta course bien gérée et bonne chance pour les Citadelles !

Commentaire de Pastisomaitre posté le 10-03-2016 à 22:02:55

Merci pour vos commentaires ça me fait bien plaisir!
Les citadelles je me suis inscrit au 40 donc je sais que ce sera moins dur, bien que je ne sous estime aucune course.
Laulau moi de mon côté mon père m'accompagne de temps en temps mais j'ai l'habitude d'aller tout seul à mes courses car personne autour de moi ne fait ça. .

Commentaire de sylvain17350 posté le 12-03-2016 à 11:22:48

Salut mec!
Je suis sylvain de Charente maritime avec qui tu as couru. Ton récit est très bien formulé et reflète tout à fait les conditions dans lesquels on c'est "foutu".
Pour ma part et mon premier trail comme tu l'as mentionné, je suis très content de l'avoir terminé 36 km en 7h11.
Bonne expérience, plein de bonne rencontres, de la convivialité, moi je dis au suivant ! ! ! !
A bientôt sur une prochaine course!!!

Commentaire de Pastisomaitre posté le 12-03-2016 à 17:12:19

Hey!!
Ça me fait super plaisir que tu sois tombé sur mon récit!!
Félicitations! Je suis bien content de voir que tu as pu finir mais je doutais t'avais la pêche quand je t'ai croisé.
Tu comptes revenir dans le coin bientôt?

Commentaire de tricky posté le 13-03-2016 à 13:15:08

Très beau récit précis et détaillé ! :) J'ai vu la vidéo de cette course, les images sont magnifiques ! Et de te lire, ça me conforte sur le fait que peut-être l'année prochaine ça pourrait être mon objectif de début d'année... À voir ! ;)
Encore bravo ! :)

Commentaire de Pastisomaitre posté le 13-03-2016 à 14:16:01

Merci tricky! Je conseille cette course à tous!
Niveau beauté des sous bois et des monotraces on peut difficilement trouver mieux c'est sur.
Après certes c'est pas la grande montagne mais faut pas négliger les dénivelés qui peuvent s'avèrer très rudes.
En tout cas moi j'ai fait les 2 premières éditions et je pense y être désormais tout les ans!

Commentaire de Pastisomaitre posté le 13-03-2016 à 14:50:10

Pour ceux qui veulent la voir, la vidéo officielle 2016 est sur facebook :
https://fr-fr.facebook.com/blackmountaintrail

Commentaire de tricky posté le 13-03-2016 à 15:33:49

La "Grande Montagne" c'est pour les bobos parisiens ça... ^^ Je plaisante... ;-) Je suis plus intéressé par des trails de cette trempe que d'autres plus à la "mode" ;-)
Alors, peut être rdv à l'année prochaine, qui sait ! :-)

Commentaire de sylvain17350 posté le 13-03-2016 à 20:22:55

Salut mec!
Ben je sais pas encore mais j'ai déjà un ami de Nantes qui a flashé sur la vidéo et est décidé à la faire donc on verra bien d'ici là mais chaussures vont fouler d'autre terrain à plushhh!

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