Récit de la course : Saintélyon 2013, par juliomix

L'auteur : juliomix

La course : Saintélyon

Date : 8/12/2013

Lieu : St étienne (Loire)

Affichage : 3100 vues

Distance : 76km

Objectif : Terminer

4 commentaires

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Sainté Lyon 2013: Vini, vidi, vici!!!

Un récit tardif vaut toujours mieux que pas de récit du tout. C’est assez drôle cette phrase qui devient récurrente pour chacun de mes récits, j’aimerai m’y atteler juste après la course mais des raisons diverses et variées font que je m’y mets souvent de nombreuses semaines voire mois plus tard.

Voici donc mon récit sur cette course…en trio, à 2 en solo ou en solo je ne sais plus trop…

Comme l’a déjà si bien raconté Polosh38, nous étions inscrit en relais à 3 sur cette course, malheureusement notre troisième comparse se blesse et ne peut plus y participer. Le grand conseil du « quoi faire » se met en place avec Polosh, enfin on se concerte après y avoir pensé secrètement chacun de notre côté, et germe l’idée (bonne ou mauvaise) de partir faire cette course en « solo » mais à 2 !!!

Comme le dit Polosh c’est surement une grosse connerie au vue de notre expérience (2 course à mon actif cette année-là et rien avant…) mais l’envie et la volonté de surmonter ce défi se font plus fortes que tout, que la peur, que le manque d’entrainement chronique qui me caractérise clairement mais aussi que les appels à la raison que nous lancent nos femmes respectives !!! Nous passerons outre et tenterons tout de même l’aventure !

La course et le défi s’emparent de moi, de nous. Je parcoure tous les récits des années précédentes présents sur kikourou afin de m’imprégner de cette course particulière sur laquelle de nombreuses erreurs sont possibles dont celle tant redoutée de partir trop vite et d’arriver cuit lorsque l’on quitte la route pour commencer les chemins.

On se rejoint chez Polosh, direction Gerland puis chargement des participants dans les bétaillères direction le palais des sports à St-Etienne. On découvre le Flore et je fais la connaissance de nombre de kikoureurs et kikoureuses sur place, Polosh est déjà bien connu du gang de Lyonnais que je rencontre pour la première fois. Un début de soirée très agréable avec une pasta party au calme en comparaison de ce qui se fait à quelques mètres de là dans la halle des sports.

Puis vient la préparation et cette phase de flottement où l’on sent la course approcher et les gens se renfermer doucement mais surement dans une bulle, chacun revêt sa tenue préférée, mets ses baskets fétiches en commençant par la chaussette gauche, puis la droite et ensuite la chaussure gauche, la droite et je finis par une gorgée de … Saleté de pub, je m’éloigne je crois. On est prêt.

On fait un passage très court par la halle des sports, le bruit y est assourdissant et dire que la majorité des coureurs y ont passé leur soirée, ils doivent déjà être fatigués. Nous n’y restons que quelques minutes et préférons sortir et nous installer tranquillement dans « l’avenue » de départ (impossible de parler de sas ici), le temps est clément et l’on peut tranquillement patienter à l’extérieur.

Le départ est là tout proche, les gens s’encouragent, la tension est palpable mais c’est un beau moment, on va enfin se confronter à ce monstre : le premier ultra pour Polosh et moi. Une pensée pour ma femme restée à la maison avec le petit bout qui nous fait une bronchiolite cette nuit-là (un signe ?), en tous cas je pense fort à eux, tout en espérant arriver au bout pour que les différents sacrifices ne soient pas vains.

La musique et les feux de Bengale surgissent annonçant le départ de cette masse humaine. On s’est bien avancés dans le SAS, du coup rapidement beaucoup de gens nous dépassent car on s’est fixé une limite basse pour ne pas brûler les cartouches trop vite.

Tout se passe bien, on avait décidé à l’avance de ne pas s’arrêter au premier ravito, ce à quoi on se tient et on file tout droit direction Sainte Catherine dans un rythme ni trop soutenu ni trop lent. En se rapprochant de Ste Catherine, Polosh commence à souffrir du genou, genou qui va malheureusement le forcer à abandonner lors du 2éme ravitaillement. Il m’explique rapidement les difficultés à venir (je comptais bien sur ses repérages pour avoir des infos en cours de route mais ce ne sera pas le cas), je pense que j’ai tout oublié 5m après être sorti du ravito, il ne me reste que l’information suivante : ça va monter, puis descendre, puis monter, puis... Cet abandon surprise nous désole tous les deux et me met dans une situation que je n’avais pas vraiment envisagé, tant pis on va improviser.

Avant de repartir parlons un peu de ce ravito, malheureusement tout est sous-dimensionné, tant les tables présentant de la nourriture que les abreuvoirs à bestiots avec lesquelles nous allons faire le plein de nos camels/gourdes. Je mets une plombe à faire le plein et manger, du coup en repartant je suis froid comme un glaçon, il est quasi 5h et dehors ça meule, en sortant de la tente je me dis que c’est trop tard la machine a calé et il va être dur de repartir. Je finis par me réchauffer et repartir car il le faut, il reste 45 bornes et le compteur tourne, pour le moment pas d’inquiétude de ce côté-là, j’ai le temps de terminer.

La course reprend son rythme et je pense trouver le mien, malheureusement aux alentours du kilomètre 35, mon genou droit devient douloureux, puis décide de ne plus se plier me laissant avec une jambe gauche valide et une deuxième jambe de bois. C’est à ce moment-là que la deuxième course commence. Je boite mais c’est encore très clairement raisonnable, je peux même encore courir à certains moments, la vitesse et mon avance sur les dernières barrières horaires est encore confortable. Je continue sur ce rythme : marche + course dès que possible.

Comme on le sait tous, et en tout cas comme je l’ai appris durant cette course (elle aura été très formatrice pour moi), quand la machine commence à déconner, il y a peu de chances pour que cela s’améliore avec le temps (un peu comme une vieille bagnole ou une vieille…, non rien), et environ 10 kilomètres plus loin, à force d’avoir compensé c’est le genou gauche qui montre de gros signes de faiblesses et qui va finir par se bloquer ! Que faire ? Abandonner ? Pas question ! Je vais jusqu’au ravito suivant et je verrai bien là-bas. Ma démarche ressemble désormais à celle d’un pirate avec deux jambes de bois, c’est assez risible et il vaut mieux en rire ! Ceux qui m’ont doublé à partir de ce moment-là ne peuvent pas m’avoir oublié, quelques mots sympas et la présence d’autres compagnons d’infortune font toujours plaisir (Merci aux gens ayant eu un petit mot…). Je ne suis pas fatigué musculairement seulement ces deux satanés genoux.

Après un petit moment compliqué où la douleur mélangée à la solitude (bien évidemment cela fait longtemps que mon vieux téléphone a rendu l’âme et je suis clairement seul) me fait basculer vers le côté sombre de la force … je reprends le dessus en pensant à M et D, qui m’attendent en Haute-Savoie et qui je le sais seront fiers quoi que je décide de faire, mais aussi en parlant à la GoPro qui me sert d’exutoire et de canapé de psychanalyse du traileur des mauvais jours.

Commence alors la troisième course, celle dans laquelle je sais que cette fois-ci les barrières horaires se rapprochent dangereusement et mes genoux ne vont pas m’aider à m’en éloigner. Néanmoins je découvre qu’il est tout à fait possible de marcher à des vitesses plus que respectables puisque je suis régulièrement aux alentours de 8km/h, je fais quelques calculs rapides et me rend compte que c’est encore jouable mais je ne dois pas faiblir. Je suis repassé du côté clair de la force et je sais que je veux et que je vais finir. Les arrêts aux stands sont désormais les plus rapides possibles, de toute façon je ne suis toujours pas fatigué musculairement donc pas besoin de pause pour les muscles, les genoux sont douloureux à chaque instant donc autant que ce calvaire se termine le plus vite possible. Ce qui me rend fou, ce sont les descentes dans lesquelles tout le monde me double en courant en comparaison des montées dans lesquelles j’avance plus vite que pas mal de gens et que je reprends donc dans les montées. Au final, les gens s’éloignent quand même mais je sais surtout que je ne suis pas là ou je devrais être, je devrais bien plus en avant dans la course car les muscles ne sont aucunement entamés.

On s’approche de l’arrivée, dernier ravitaillement sur lequel on peut penser à la terrible montée qui arrive, je me fais cette ultime montée aux cotés de ce bel aqueduc, belle montée, bien raide (heureusement qu’elle est courte) puis arrive le sommet de la colline et on devine le lieu d’arrivée. On nous fait bien tournicoter dans les rues, c’est à n’en plus finir et c’est là qu’arrive le coup de bambou final : à ma montre 71km mais le panneau face à moi dis 5km avant l’arrivée, mais d’où sort ce kilomètre supplémentaire ??? Je suis sonné tout comme le coureur à mes côtés, au final on avait arrondi à l’inférieur le kilométrage prévu : 75.8=76 et non pas 75. Cet « ajout » kilométrique est dur à avaler mais il faudra bien en finir et maintenant je ne peux pas arrêter, je ne peux pas arriver hors délai, c’est impossible.

Il me reste encore une difficulté, et non des moindres, vous me direz quelle difficulté à ce moment-là de la course ? Je vous rappelle la situation : 2 genoux qui ne se plient plus et un coureur qui lance les jambes sur les côtés pour pouvoir avancer ? Tic Tac ? Des escaliers peut-être ? He tiens si on en mettait plusieurs dizaines voire 1 ou 2 centaines juste sur la fin ce serait sympa !!! Je le savais mais je ne voulais pas les voir arriver ! La descente a été longue alors que certains les descendent en courant. Je devrais être avec eux mais ce n’est pas possible, plus possible. J’arrive à les vaincre, ah mais tiens si on remettait un peu pour remonter sur le pont, rhhhh. Cette approche de Gerland se mérite…

J’avance sur le pont du Rhône, découvre ce nouveau quartier et ce musée en construction. J’en profite pour continuer mon introspection vidéo tout en me rapprochant de l’arrivée. J’en conclue donc (ça fait un moment que j’ai compris) que nos femmes avaient clairement raison, c’était trop pour une première année de course, surtout en lien avec l’entrainement quasi inexistant que j’ai suivi (1 fois par semaine, 2 fois quand j’ai le temps les « grandes » semaines…). On aurait surement du les écouter, j’aurais surement du t’écouter… comme souvent... Malgré tout je vais finir, je passe les panneaux 3km, 2km puis celui 1km contre cette grille à l’entrée du parc.

Le temps a été merveilleux, froid mais pas trop, pas de chute de neige, pas de pluie, pas de grêle et l’arrivée se fait sous un soleil radieux, cela m’a surement aidé à terminer.

Je rentre dans le « sprint » final, la dernière allée, 200m, 100m, les gens autour nous encourage à accélérer mais c’est tout simplement impossible pour moi. Encore quelques mètres et quelques sourires forcés pour les photographes.

La voici enfin, cette arche tant attendue : 5m, 4m, 3m, 2m, 1m, je la passe finalement en 14h 07m 25s, loin, très loin, très très loin des meilleurs mais aussi de nos estimations même les plus pessimistes avec Polosh. Je passe donc cette arche et je me sens comme happé par le vide intersidéral : quoi ? Tout ça pour ça ? C’est tout ? Je pense que le bonheur d’en finir est masqué par la fatigue et la douleur, ce n’est que plus tard que j’en prendrai pleine conscience.

Je pense donc à mes 2 anges qui m’ont porté et ne m’ont jamais laissé seul durant cette course. On ne se rend peut être compte de la force du mental que dans des situations complexes, et cette force et ce soutien ont pris tous leurs sens lors de cette course.

Je suis le parcours imposé entre les barrières et arrive face à la remise du maillot, j’aperçois alors Polosh debout dans les gradins en train d’applaudir, les émotions montent et en lisant dans son regard non pas de l’admiration mais surement un peu de fierté que son ami en ait finalement fini, je me rends alors compte de ce que j’ai réalisé : « j’ai fini la STL ». Ce fut un bel instant, merci Polosh.

Je récupère donc mon T-shirt de finisher et vais me poser au milieu de la halle en attendant Polosh qui va me chercher mon sac d’affaires, je suis complétement cuit et le stress de la course retombant la fatigue arrive elle aussi.

Mon cœur, je t’appelle avec le téléphone de Polosh pour te dire que je viens d’arriver et te raconter un peu cette course, je pense t’avoir dit que tu avais raison et si tel n’était pas le cas, je te le dis : ce défi était trop grand, ou trop tôt, ou les deux pour moi. Merci de ton soutien même dans mon entêtement.

On rentre chez Polosh pour se restaurer un peu et prendre une douche. Je prends un anti-inflammatoire et démarre mon autre course : rentrer en voiture en Haute-Savoie avec 2 jambes de bois. Pas facile le passage de vitesse et l’accélération sans plier les genoux (ou douloureusement), je n’ai été content qu’une fois sur l’autoroute.

 

Les conclusions à tirer sont multiples :

1-    Toujours ou le plus souvent écouter les êtres chers.

2-    Comme le dit également Polosh, on ne devient pas ultra-trailer sur un coup de tête, l’entrainement et la progressivité sont des vérités.

3-    Ne pas baisser les bras, sauf si on est vraiment blessé.

4-    La STL : veni, vidi, vici ! Je cède ma place aux autres, comme je le pensais : trop de route pour moi !

5-    Bravo à tous, finisher ou non ! Polosh, ce n’est que partie remise et on le sait bien ;-)

6-    Merci à tous les organisateurs du Flore, un bon moment et de belles rencontres.

7-    Il faut que je rédige mes CR plus vite ;-)

 

4 commentaires

Commentaire de polosh posté le 19-06-2014 à 07:52:08

Que dire de plus? Bon déjà je vais commencer par un "ouf! le voilà enfin ce CR" ;-)
Le temps final importe peu, mais tu as signé là une grosse victoire sur toi même... Beaucoup auraient renoncé, tu as continué. Tout en étant encore lucide sur ton état, même si ces genoux t'ont fait du tord... Je me dis que tu aurais sans doute plus apprécié cette arrivée si on avait fait le tout "ensemble" entre copains comme c'était prévu, parce que finalement quand on vis les trucs à 5h du matin entre copains, c'est quand même plus sympa ;-). Encore désolé de t'avoir lâché, les mois suivants m'auront quand même donné raison vu comme j'ai traîné cette blessure... Encore bravo, content de t'avoir trainé dans cette "connerie" pour que tu sois allé au bout de toi même ce jour là! ;-). Et des leçons tu en a tiré, vu les épreuves raisonnables sur lesquelles tu t'alignes cette année: c'est aussi ça apprendre de ses "erreurs".
PS: on attend encore la vidéo!!!!!

Commentaire de juliomix posté le 19-06-2014 à 13:05:41

Ne besoin d'excuses mon Polo, le corps a parfois raison des envies et il faut savoir l'écouter. On s'en fera une d'arrivée ensemble, j'en suis certain!!!
Effectivement cette année sera plus tranquille avec pour le moment une seule inscription à la TCC version courte de ce dimanche.

Commentaire de Arclusaz posté le 19-06-2014 à 08:57:50

et oui, nos femmes ont toujours raison.

Bravo d'être aller au bout de la course....et du CR !

Bien content d'avoir fait ta connaissance.

Commentaire de juliomix posté le 19-06-2014 à 13:06:51

J'ai également été ravi d'avoir fait ta connaissance, peut être à bientôt sur un autre trail!

Oui je me demande ce qui a été le plus dur finir la course ou le CR ;-)

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