Récit de la course : Grand Raid 73 2014, par Bastouille

L'auteur : Bastouille

La course : Grand Raid 73

Date : 24/5/2014

Lieu : Cruet (Savoie)

Affichage : 1715 vues

Distance : 73km

Objectif : Terminer

3 commentaires

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Oui, 73km de bonheur !

Ce 24 mai était pour moi un objectif, une porte à ouvrir, une bouffée d’orgueil.

Suite à mon échec à la Saintélyon 2012, à mon abandon à Soucieux (48ekm) pour « épuisement moral » je m’étais juré de dépasser cette faiblesse pour un jour être finisher et reprendre confiance.

Sous les conseils de Floris, et ne souhaitant pas me lancer seul dans une nouvelle galère, je me suis inscrit au Grand Raid 73.

73km, 4800m de dénivelé au cœur du massif des Bauges, ça promet… L’édition 2013, avait été marquée par d’importantes chutes de neiges obligeant les organisateurs à un parcours de repli. Florent et Floris avaient pourtant gardé un souvenir assez positif de cette édition.

 

Pour me préparé à ce raid, j'avais programmé, en mars les 42km et 1800m de D+ des Cabornis ainsi qu'un semi-marathon, et en avril les 38km et 1800m de D+ du trail de la Drôme à Buis les Baronnies. 

Cette année nous sommes donc 4 de la MJC Monplaisir à nous inscrire à ce raid, Loïc, Floris, Florent et moi.

Pour notre confort et pour rendre agréable le week-end, Loïc, Floris, moi et nos compagnes respectives avions loué un gite dans un village voisin. Mais le départ étant prévu à 5h du matin, nous avons peu profité de la nuit de vendredi à samedi…

Florent, de son côté, a passé la nuit dans son van comme à son habitude avec Yves un de ses potes avec lequel il a déjà été finisher de 2 Sainté, et une 6000D.

Nous nous rejoignons donc tous à sur la ligne de départ. Le ciel étoilé et la fraicheur matinale nous  promettent un temps magnifique.

5h, le clap de départ retentit. Nous sommes près de 300 à nous élancer sous une arche éblouissante de flambeaux.

Floris et Loïc partent vite, je ne cherche pas à les suivre. Avec Yves et Florent, nous partons cool. Je m’interdis de faire monter mon cœur dans le rouge. Je me limite à 160bpm.

Les premiers hectomètres sont en pente douce au milieu des vignes de Cruet. Alors que les frontales scintillent et serpentes le long des pentes, les premières lueurs du jour apparaissent et laissent se dessiner peu à peu les sommets enneigés de Belledonne.

Arrivés dans le sous-bois la pente s’intensifie, nous sommes partis pour 800m de D+ en 4km. Le peloton est calme ; est-ce l’heure matinale ?, est-ce le stress des nombreux kilomètres qui nous attendent ? ou bien est-ce simplement pour profiter du réveil de la nature et du chant des oiseaux ?

Lorsque les premiers rayons de soleil nous illuminent, nous en profitons pour faire une pause, manger une barre et enlever une épaisseur. Par la suite Florent et moi perdons de vu Yves, moins bien préparé. Il abandonnera à mi-course.

Sans peine, plongés dans nos discussions, nous parvenons en haut de la première pente. Se succèdent par la suite de nombreux points de vue qui nous laissent admirer les différents sommets ensoleillés qui surplombent la vallée de l’Isère et de Chambery, Granier, Nivolet, Massif de L’Epine, la dent du Chat, puis vers le sud le Vercors avec le Veymont et le Mont Aiguille qui s’en détache.

Entre ces points de vue, de courtes portions en monotraces ludiques nous font traverser des clairières riches en couleurs. Muguet, pissenlit, ail des ours, orchidées, gentiane, trolle et autres renoncules vont parsemer notre chemin sur l’ensemble du parcours.

15e km, une bonne descente nous fait rejoindre La Thuile puis son Lac où nous attend le premier ravitaillement au 18ekm.

On se recharge un peu, banane, barre de céréales, tuc. Florent reprend de l’eau. Puis on repart, nous en sommes à 3h20 de course. 

Florent commence à me distancer. Je surveille mon cardio qui ne m’autorise pas à le suivre. Dès que je dépasse les 160bpm, je sens mon œsophage se spasmer. Je laisse donc Florent partir. Dommage, on aura passé un bon moment ensemble.

Nouvelle difficulté, 700m de positif en à peine 4km. Ca passe bien, je ne cherche pas à courir. Mes batons me supportent bien. A la sortie d’une portion forestière, nous tombons nez à nez avec  la pointe de la Galoppaz. Très belle pente herbeuse de 200m de positif à plus de 30%. Le moral reste bon et me permet d’entamer sereinement l’ascension.

Au loin, j’aperçois Florent qui semble garder aussi la forme.

Les pointeurs du sommet s’amusent de leurs voix fortes à nous faire accélérer en nous menaçant de la barrière horaire (qui on le sait est au moins 2h derrière nous).

Arrivé au sommet après 5h30 de course, le paysage est grandiose. L’ensemble de notre parcours se dessine devant nous avec tout au fond (très loin au fond…) le Grand Colombier, point culminant du Grand Raid.

 

Je regrette de ne pas pouvoir prendre de photo à ce moment. Mais bon d’autres en prendront pour nous.

Puis suit une longue descente irrégulière jusqu’aux Côtes de Gueulets (32ekm) où nous attend un salutaire ravitaillement en eau. Lors de cette descente je croise deux coureurs pour qui la cheville a malheureusement vrillé qui abandonneront à ce niveau.

Nous rejoignons enfin la petite station des Aillons par un chemin vallonné.

Les Aillons est une étape clé au 39ekm, avec près de 2000m de dénivelé déjà avalés. Si je parvenais jusqu’ici en forme, j’aurais de grandes chances de finir. C’est donc à ce point stratégique que j’avais demandé à Anne-Claire de venir me ravitailler. Floris avait prévu de même, Stéphanie et Soline l’ont aussi retrouvé à ce niveau.

J’arrive donc en forme aux Aillons après 7h de course. Je retrouve Anne-Claire, Stéphanie, et Soline confortablement installées sur l’herbe au soleil. Florent et Floris viennent de partir.

Je prends mon temps pour me restaurer. Soupe, pain, fromage. Je vide mes poches (6pompotes, 3 barres de Céréales et 2 barres de Polenta maison consommées sur les chemins). Je remplis ma poche à eau. Je recharge mon sac de 6 pompotes, 2 barres de Polenta et des barres de céréales. Mon moral est aussi rechargé à bloc, merci pour cet instant de repos en compagnie de nos chères et tendres.

30min après, je repars. 18km et plus de 1400m de dénivelé nous attendent avant le prochain ravitaillement avec au milieu la fameuse ascension du Grand Colombier. Ça va être long…

On commence par un premier mur en lacet de 300m de positif, on redescend de 150m puis on entame les 900m de dénivelé positif de l’ascension du Colombier. Il est 13-14h, le soleil commence à être haut. Heureusement jusqu’à 1500m d’altitude, nous montons sous la protection des arbres.

Le peloton est désormais bien étiré. Chacun monte à son rythme. Je parviens à doubler 5 ou 6 coureurs. Un petit névé nous rappelle qu’il y a quelques semaines la neige était encore présente à cette altitude. Avant de sortir définitivement de la forêt, au bord d’une source, je m’arrête, prends une barre de polenta pour me recharger en sel et mouille bien ma casquette en prévision du soleil.

Col de la Cochette, 1600m, c’est le début de la phase finale de l’ascension du Colombier. Le parcours prévoit à ce niveau une boucle nous faisant passer par les arêtes sud puis nord du Colombier. 3km et un mur de 300m de positif à beaucoup plus de 30%.

Avant de me lancer, je croise Florent qui lui en finit avec cette boucle. Pour lui le moral est au beau, pour moi… c’est différent… 

Mais l’ascension du mur se passe relativement paisiblement. Mes batons sont mes meilleurs amis. Pour faire passer le moment, je discute avec un coureur que je suis depuis un petit moment. Lui est un habitué des longues distances, UT4M, CCC, Diagonale des Fous… Je resterai avec lui un bon moment. Par contre, la soif m’envahit peu à peu et je parviens difficilement à me désaltérer. Je m’oblige à m’arrêter pour boire une grande quantité d’eau, reprendre un peu de polenta pour le sel et me vider une pompote pour le goût. Bien joué, je reprends un peu de jus…

 

Au sommet, à 2045m, la vue est grandiose. Au sud-ouest, nous voyons le Pointe de la Galoppaz et les Aillons d’où nous venons. Au nord, le lac d’Annecy, surplombé de la Tournette. Plus loin, le Mont Blanc se couvre de nuages. Et vers le sud-est le Mont Pelat avec son ravitaillement nous attend ( et nous attendra encore quelques heures…).

 

Puis c’est la descente. Tout d’abord un peu vertigineuse le long de l’arête sur le sentier caillouteux puis peu à peu la pente autorise à relever les batons.

Je double un coureur pour qui l’ascension du Colombier aura eu le dessus. Il veut rendre son dossard au col de la Cochette. Il n’est pas blessé mais n’arrive plus à trouver la force de courir. Connaissant bien son état et sachant qu’il n’est pas irréversible, je l’encourage à prendre du temps avant de prendre la décision d’abandonner et à surtout bien se nourrir. Je le laisse. Je ne sais pas s’il aura réussi à passer le cap.

Je passe le col de la Cochette après 10h50 de course avec un grand sourire cette fois-ci.

Puis on descend en pente plus douce pour rejoindre (enfin) la forêt et se réfugier dans sa fraicheur.  Il reste 11km avant le ravitaillement du Mont Pelat. Ma réserve en eau est quasiment vide. Heureusement des signaleurs nous permettent de remplir nos poches avec l’eau d’une source voisine.

Une longue, très longue portion de crête en forêt nous rapproche lentement très lentement du Mont Pelat. 

Un instant d’euphorie me fait perdre mon compagnon de course. Durant une vingtaine de minute, je me suis surpris jouer avec les monotraces, sauter par-dessus les rochers, relancer en montée… Mais J’ai appris par expérience à me méfier de ces instants d’euphorie. Ils précèdent souvent un coup de moins bien. J’anticipe donc en prenant une pompote.

L’arrivée au Mont Pelat se fait attendre. Peu à peu le coup de moins bien appréhendé se fait ressentir. Apparemment il y a pire coup de moins bien que le mien car je continue à reprendre des places sur les autres coureurs.

12h30 de course, je parviens enfin au sommet du Mont Pelat. Un barbecue nous y attend avec des frites et des diots. Mais je me demande quels coureurs peuvent ingurgiter des diots après 12h30 de course… Je prends une soupe, je remplis ma poche à eau complètement vide et après 20min je repars.

Par la suite le chemin est moins intéressant. Nous descendons le long d’une piste de ski puis d’une piste forestière. Malgré le manque d’envie, je parviens toujours à courir dans les descentes et sur le plat. Je continue de gagner 2 ou 3 places.

Après une nouvelle pompote, une envie pressante m’oblige à mettre le clignotant sur la gauche… je reperds les 2 places que j’avais gagné.

Je repars. Après un dernier col, nous quittons définitivement la piste forestière pour reprendre un nouveau monotrace. A ce niveau, une longue portion en dévers nous fait souffrir une dernière fois avec de bonnes montées. Désormais nous sommes passés sur le versant à l’ombre de la montagne mais c’est aussi le versant sur lequel se trouve Cruet et la fin de notre calvaire. Derrière moi un coureur a des râles inquiétants. Ça m’agace. Je suis à deux doigts du lui demandé d’arrêter quand je me rends compte que ce sont en fait des hauts-le-cœur. Dommage pour lui. Mais il continue à bien courir et me dépasse à chaque fois qu’il se sent mieux…

Enfin c’est la descente finale. Les genoux sont encore bien solides et permettent de courir malgré une bonne pente. Dernier ravitaillement à Monlambert où les bénévoles nous font profiter de leur enthousiasme. Même s’il ne reste que 4,5km de descente, je suis prudent et reprend une dernière soupe de peur de craquer dans cette dernière portion.

Je continue de remonter sur les coureurs qui me précèdent et en dépasse 2. Le coureur qui avait des hauts le cœur s’accroche à mon rythme.

Des enfants sur le bord du chemin nous annoncent encore 2km. Petite remontée dans une forêt et voilà Cruet en vue !

On arrive dans le village. Je laisse mon suiveur me doubler voulant profiter seul de mon arrivée.

On tourne un peu dans le village et enfin je passe la ligne d’arrivée !

Anne-Claire, Florent et Floris m’y attendent et seront d’ailleurs mes seuls spectateurs à l’arrivée. Et oui il est tard, il est 20h20 et je suis parti il y a 15h20min.

Pas de grandes émotions sur la ligne mais des yeux remplis de la beauté des paysages rencontrés et une grande satisfaction d’être arrivé au bout, d’avoir su surmonter mes démons et une grande joie de finir en relative bonne forme, sans blessure et sans aucune ampoule aux pieds. Comme quoi ce fut peut-être trop facile ;-)

Loic et Floris sont arrivés quasiment coude à coude après respectivement 13h12 et 13h20 de course. Florent a fini plus calmement en 14h.

Par la suite nous sommes retournés au Gîte pour nous réchauffer et débrieffer de cette belle journée jusqu’au lendemain.

Voilà le récit de mon premier long trail. 

Des jambes bien préparées, une bonne gestion du cardio, de l’alimentation et des boissons m’a permis de prendre du plaisir sur l’ensemble du parcours. Le temps et la beauté du paysage ont aussi beaucoup joués pour préserver le moral et garder une motivation au plus haut niveau. La recette paraît simple mais demande à être éprouvée lors d’autres épreuves…

A SUIVRE...

 

PS:voici un bel échantillon de photos d'un coureur généreux: https://www.flickr.com/photos/akunamatata/sets/72157644785136276/

3 commentaires

Commentaire de gilou01 posté le 28-05-2014 à 20:26:19

bravo beau recit belle gestion de ta course on s est pas croisé dommage une prochaine fois bonne recup

Commentaire de snail69 posté le 30-05-2014 à 09:52:03

Quelle gestion de course, bravo ! Euh, à côté de ce gros morceau, la SaintéLyon, ce sera les doigts dans le nez. Et à mardi prochain ;-)

Commentaire de paspeur posté le 12-06-2014 à 19:30:01

Bravo pour ta gestion de course. En fin de compte, le grand raid 73 n'a pas l'air si difficile.
j’étudie çà pour l'an prochain???!!!!

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