Physio / Nouveau paradigme de la course à pied

Discussions sur des sujets "sérieux" en rapport avec la course à pied.
Entrainement, physiologie, nutrition, blessures, gestion de course, ...

Messagepar Nine14 » sa fiche K
» 15 Août 2018, 13:57

Article s'adressant principalement aux coureurs sur route du 10K au marathon.
La partie "physio" peut intéresser tout le monde mais pour les trailers et coureurs ultra, c'est l'endurance qu'il faut travailler.
L'endurance spécifique, l'endurance à l'allure de la corse à venir.
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Pour le coureur à pied du demi-fond à l’ultra, il y a 2 plages d’allure fondamentale :
    - Une plage sur laquelle l’acidité des muscles moteurs ne fait que de monter ; il faut alors RESISTER à cette montée d’acidité ; c’est le rythme de progression de cette acidité qui va principalement déterminer le moment ou soit le coureur ralentit, soit il s’arrête ; c'est la plage "Résistance";
    - Une plage sur laquelle l’acidité reste sous contrôle ; le coureur va alors devoir ENDURER la montée de la FATIGUE et les douleurs qui vont avec. C'est la plage "Endurance".

L’allure qui sépare ces 2 zones est le SL2 (Seuil Lactique 2), encore appelé « seuil ANAEROBIE » ou « MLSS » (Maximum Lactate Steady State). MLSS est le terme parfait.
Le SL2 est donc l’allure la plus élevée pour laquelle le taux de lactate reste encore stable.
Pour info, en moyenne, le taux de lactate au SL2 est d’environ 4 millimoles de lactates par litre de sang, et l’allure SL2 vaut environ 85% de l’allure VMA.

Je vais tout de suite parler d’une autre allure qui est importante à connaître pour comprendre le raisonnement qui va suivre.
Cette autre allure est la fameuse VMA qui veut dire « Vitesse Maximum Aérobie ».
Physiologiquement, c’est la plus petite allure pour laquelle le coureur a atteint sa consommation maximum d’oxygène. Aérobie vient de « air » et fait le lien avec « oxygène ».

Pour bien comprendre, il faut donner une petite explication du processus de production de l’énergie pour contracter les muscles. Ne pas oublier que c’est la contraction des muscles des jambes qui permet à un marcheur ou à un coureur d’avancer.
Alors pour produire l’énergie pour contracter les muscles, il y a 2 métabolismes qui s’activent dans les cellules musculaires (ou fibres musculaires) :
    a) Le métabolisme sans air, donc sans oxygène, appelé « métabolisme ANAEROBIE » ;
    b) Le métabolisme avec air, donc avec oxygène, appelé « métabolisme Aérobie ».

Le métabolisme ANAEROBIE est puissant, rapide, sa met en route instantanément mais il a l’inconvénient de créer de l’ACIDITE dans la fibre musculaire. L’acidité est rarement propice aux métabolismes biologiques. C’est pareil dans notre cas, le cas du sportif.

Le métabolisme Aérobie a l’avantage d’être parfaitement propre (c’est un moteur à eau), de participer à la maîtrise de l’acidité produite par le métabolisme ANAEROBIE mais il a l’inconvénient d’avoir une certaine inertie pour se mettre en route (qqes minutes par exemple sur une allure 10K) et d’être limitée en termes de puissance. Ce métabolisme atteint son maximum au-delà d’une certaine allure, d’un certain niveau d’effort. En course à pied sur le plat, ce niveau d’effort est matérialisé par cette fameuse VMA. Le vrai terme est « vVo2Max » signifiant vitesse à consommation d’oxygène maximale (ou plus petite vitesse à consommation d’oxygène maximale). Cela veut dire qu’à partir de cette allure, c’est exclusivement le métabolisme ANAEROBIE qui fournit l’énergie supplémentaire pour courir plus vite que vVo2max.

Tout de suite une première série de questions.
Pourquoi y-a-t-il une consommation maximale d’oxygène ?
Pourquoi cette consommation ne continue-t-elle pas de croître avec la vitesse ?
Pour 2 raisons.
    a) L’oxygène est amené aux muscles par le sang ; le sang est propulsé dans le corps par une POMPE, le CŒUR. Cette POMPE a une capacité de pompage limitée ; c’est comme un système d’irrigation chez un maraîcher ; la puissance de la pompe détermine la pression et la quantité d’eau pulsée.
    b) L’oxygène est utilisé par les usines énergétiques des fibres musculaires, les MITOCHONDRIES. Ces mitochondries sont en quantité limitée dans les fibres, et ont donc chacune leur propre maximum.

Pourquoi la VMA joue-t-elle un rôle dans la détermination de nos 2 plages d’allure, la plage de RESISTANCE et la plage d’ENDURANCE ?
Parce que le SL2 est corrélé à la VMA.
Si la VMA évolue, mécaniquement, le SL2 va aussi évoluer.
Pas forcément dans les mêmes proportions, mais au moins dans le même sens. Si la VMA progresse, le SL2 progresse.

On pourrait alors dire : « Eh bien, faisons de la VMA puisque l’autre allure importante progresse aussi ».
On peut le dire mais il faut savoir que la VMA a une limite. La limite, c’est bien cette fameuse consommation maximale d’oxygène. Une fois que votre cœur pompe au maximum et que la totalité des petites usines d’énergie, les mitochondries, tournent à leur capacité maximale, eh bien là, le métabolisme Aérobie global est à son maximum et la limite est atteinte.

Une autre question qui s’enchaîne.
Si la VMA est à son maximum, est-ce que le SL2 peut-il encore progresser ?
Oui, et oui.
La solution constitue simplement à continuer à faire progresser le métabolisme Aérobie des fibres musculaires impliquées lorsque le coureur court à l’allure SL2.
Mais avant votre nouvelle question, je vous indique tout de suite que le SL2 a aussi une limite.
Mais cette limite est plus liée à la capacité de s’entraîner longtemps à l’allure SL2 ou juste un peu au-dessus.

Conclusion.
Pour tenter de devenir le meilleur coureur possible, en vue d’une course de fond donnée, il faut :
    a) Faire progresser le plus possible la VMA
    b) Faire progresser le plus possible le SL2, en qqe sorte le rapprocher le plus possible de la VMA ;
    c) Devenir endurant à l’allure de la course préparée, c'est-à-dire tenir l’allure espérée sur la durée de la course.

Oui, faire progresser la VMA et le SL2, ça revient bien à améliorer l’aptitude Aérobie des fibres musculaires impliquées à ces allures.

Le nouveau PARADIGME, ce serait donc de considérer la filière Aérobie globale comme étant la somme des métabolismes Aérobies de chaque fibre musculaire impliquée dans l’effort.
Et de considérer que pour progresser, le coureur doit améliorer le métabolisme Aérobie élémentaire de chacune des fibres impliquées dans un effort donné.
Par exemple, le marathonien devrait donc faire progresser le métabolisme Aérobie de toutes les fibres impliquées durant son marathon.
Dernière édition par Nine14 le 28 Août 2018, 13:06, édité 4 fois au total.

Messagepar OderF_06 » sa fiche K
» 15 Août 2018, 14:23

Bien d accord sur tout ca, un questionnement, passé un certain âge, la vma s’entretient,et le seuil devient plus préponderant pour progresser, qu en penses tu?
À quoi bon passé 40 que dis-je 50 ans à vouloir se faire mal ou pire se blesser en seance de vma ?

Messagepar Nine14 » sa fiche K
» 15 Août 2018, 15:19

OderF_06 a écrit:Bien d accord sur tout ca, un questionnement, passé un certain âge, la vma s’entretient,et le seuil devient plus préponderant pour progresser, qu en penses tu?
À quoi bon passé 40 que dis-je 50 ans à vouloir se faire mal ou pire se blesser en seance de vma ?


Sur ces points, ma vision est la suivante.
Si on cherche ses meilleures performances possibles :
1) Sur une période donnée (qqes semaines à qqes mois) : travailler sa VMA et son SL2; à la fin de cette période, on a donc son potentiel de coureur (effectuer un test VamEval ou VM6);
2) Puis, travailler son endurance pour la course à venir; on peut ne plus s'occuper du tout de sa VMA et de son SL2;

Cela qu'on ait 25 ou 60 ans.
Donc tirer sa VMA vers le haut, sur une période donnée, puis se préparer pour une compet sur la base du potentiel issu de ce travail.


Pour les coureurs récréatifs (loisir, plaisir, santé, ..), faites ce qui vous plait, et ce qui ne vous blesse pas.

Messagepar OderF_06 » sa fiche K
» 15 Août 2018, 15:57

Merci pour ta réponse

Messagepar cloclo » sa fiche K
» 15 Août 2018, 17:28

Y'a t'il une coincidence à ce que Nine14 ressuscite à l'Assomption? :wink:

Messagepar Nine14 » sa fiche K
» 15 Août 2018, 18:21

cloclo a écrit:Y'a t'il une coïncidence à ce que Nine14 ressuscite à l'Assomption? :wink:


Non, ce n'est pas une coïncidence.
Il y a bien une explication.

Une grande douleur (que je vais surmonter).

Et quand je souffre, seule la science (et la métaphysique) peut me soulager.

PS : mais je prépare les 24H d'Albi, doublement motivé.

Messagepar Le Lutin d'Ecouves » sa fiche K
» 15 Août 2018, 18:36

OderF_06 a écrit:À quoi bon passer 40 que dis-je 50 ans à vouloir se faire mal ou pire se blesser en séance de vma ?


Hein ! y'en encore qui courent à c'tâge-là ???

Messagepar freddo90 » sa fiche K
» 16 Août 2018, 01:07

Pour aller vite longtemps, il faut une grosse VMA et s’entraîner alors ? Drôle de nouveauté... Et comment es-tu sûr de ta mesure de SL2 ?

Messagepar Nine14 » sa fiche K
» 16 Août 2018, 03:33

freddo90 a écrit:Pour aller vite longtemps, il faut une grosse VMA et s’entraîner alors ? Drôle de nouveauté...


J'ai dû être ambigu.

Le nouveau paradigme.
    Le nouveau PARADIGME, ce serait donc de considérer la filière Aérobie globale comme étant la somme des métabolismes Aérobies élémentaires de chaque fibre musculaire impliquée dans l’effort.
    Et de considérer que pour progresser, le coureur doit améliorer le métabolisme Aérobie élémentaire de chacune des fibres impliquées dans un effort donné.
    Par exemple, le marathonien devrait donc faire progresser le métabolisme Aérobie de toutes les fibres impliquées durant son marathon.

Et aussi que la VMA n'est pas une fin en soi.
Juste un début. Très temporaire.


Oui. J'explique très peu.
C'est volontaire.

L'idée pour l'instant, ce n'est pas d'expliquer, c'est de faire réfléchir.

Messagepar Nine14 » sa fiche K
» 18 Août 2018, 09:15

Suite ....
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Réflexions sur le travail à effectuer pour la progression du coureur de fond.
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Réflexions issues du nouveau paradigme consistant à étudier la course à pied à travers le prisme des fibres musculaires unitaires (et non à travers des aptitudes ou des filières énergétiques globales).
Réflexions s'adressant à ceux qui veulent optimiser leur potentiel.
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Les dernières recherches physiologiques concernant les fibres musculaires montreraient que :
    - Les fibres sont utilisées dans un ordre donné et peuvent donc être classées selon l’allure à laquelle elles entrent en action ;
    - Au sein de chaque fibre, ont lieu les 2 métabolismes énergétiques : le métabolisme ANAEROBIE (sans air ; la glycolyse) et le métabolisme Aérobie (avec oxygène ; cycle de Krebs et chaîne respiratoire) ;

La glycolyse doit être considérée comme une succession de réactions chimiques dont l’efficacité n’est principalement liée qu’à la présence suffisante des substrats et catalyseurs divers (enzymes, …).
Son efficacité est principalement liée à l’alimentation du coureur, mais sans que cela modifie grandement l’efficacité résultante. On a rarement vu un coureur gagner 5 minutes sur 10K rien qu’en changeant son alimentation.
Donc, la glycolyse est un métabolisme qu’on peut considérer comme stable en terme de performance et suffisamment efficace pour toutes les compétitions de « courses de fond ou d’ultra ».
En effet, ce métabolisme fournira toujours l’énergie nécessaire pour l’avancement du coureur, tant qu’il y a du carburant, assez de carburant.
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Par contre, le métabolisme Aérobie (Krebs et chaîne respiratoire) est un processus biologique qui a besoin d’être développé. Comme la majorité des processus biologiques, il progresse en efficacité lorsqu’il est sollicité, MAIS régresse dans le cas inverse.
L’entraînement du coureur à pied a donc comme objectif principal soit de faire progresser le métabolisme Aérobie.
Mais la contribution Aérobie globale n’est rien d’autre que la somme des contributions élémentaires de chaque fibre musculaire intervenant pour fournir de l’énergie.
Car, plus le métabolisme Aérobie est EFFICACE, moins le coureur aura besoin de recourir au métabolisme ANAEROBIE, métabolisme ANAEROBIE qui produit de l’acidité musculaire (acidose).
Acidité qui peut ne pas être résorbée lorsque l’effort devient de plus en plus intense.
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Petite remarque sur l’acidité.
Les experts considèrent aujourd’hui que jusqu’au SL1, toute l’acidité produite par la glycolyse est complètement absorbée par le métabolisme Aérobie (voir le fil : Ici).
Ce n’est qu’à partir du SL1 que les nouvelles fibres intervenant à partir de ce niveau d’effort ont une capacité Aérobie insuffisante pour absorber toute l’acidité de la glycolyse.
Dans ce cas, l’acidose progresse un peu, en même temps que le taux de lactate.
Tant que le coureur ne dépasse pas le niveau d’effort SL2, l’acidose et les lactates restent sous contrôle. C’est à partir du SL2 que l’acidose ne fait plus que de monter, provoquant tôt ou tard soit le ralentissement, soit l’arrêt du coureur.
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Conclusion.
Un coureur à pied de fond (course de fond) a principalement besoin d’améliorer la capacité Aérobie des fibres musculaires activées entre le SL1 et sa vitesse de course de sa ou ses prochaines compétitions.

Comment faire ?
Comme je l’ai indiqué en amont à propos des processus biologiques, il faut simplement activer à l’entraînement ces fibres, le plus LONGTEMPS possible.

PS : lorsque vous faites progresser des fibres qui ne vont jamais intervenir sur la prochaine compétition, vous avez perdu temps et fatigue. Vous n’avez pas optimisé le temps consacré à la préparation de votre prochaine course (ou le temps que vous avez eu de disponible pour ce loisir).

PS2 : oui, il n’y pas que cela pour exploiter la totalité de son potentiel, en course de fond.
Plus tard !

PS3 : article destiné à donner à réfléchir.

Messagepar JuCB » sa fiche K
» 18 Août 2018, 12:06

Concrètement à l'entraînement, ça donne quoi ?

Je suis un coureur d'ultra mais je ralentis, c'est certainement dû à l'age.
2016 : 144km, 3,86km/h
2017 : 144km, 2.73km/h
2018 : 230km, 2.78km/h
ce we : 63km, 3.32km/h (mais pas de dodo)

Est ce que j'ai un moyen d'inverser la tendance ?

NB1 : je n'ai pas FB

NB2 : j'ai une piste près du boulot : je n'aime pas mais si c'est indispensable...

Messagepar Nine14 » sa fiche K
» 18 Août 2018, 12:25

JuCB a écrit:Concrètement à l'entraînement, ça donne quoi ?

Je suis un coureur d'ultra mais je ralentis, c'est certainement dû à l'age.
2016 : 144km, 3,86km/h
2017 : 144km, 2.73km/h
2018 : 230km, 2.78km/h
ce we : 63km, 3.32km/h (mais pas de dodo)

Est ce que j'ai un moyen d'inverser la tendance ?

NB1 : je n'ai pas FB

NB2 : j'ai une piste près du boulot : je n'aime pas mais si c'est indispensable...


Je ne comprends pas trop tes chiffres.
Mais, je te comprends quand tu parles de piste.
Et je comprends ta perplexité.

Des fois, je dis que la VMA ne sert à rien.
Et des fois je dis qu'il faut commencer par travailler sa VMA avant de démarrer une période de préparation à une course.

Je m'explique un peu.

Prenons l'exemple d'un marathon.
Prenons un coureur expérimenté, très motivé.
Il s'est reposé en fin d'année et a passé de bonnes fêtes de fin d'année tranquille, ayant reçu de beaux cadeaux (montre GPS, chaussures de course à pied, inscription dans le groupe PPDS, ..).

Il fera :
    - un travail de VMA / SL2 sur les qqes premiers mois de l'année.
    Il ponctuera cette période par un 10K à fond, pour évaluer les progrès.

    - Ensuite, il commencera, sur la base de son niveau atteint, une préparation marathon pour l'automne.
    Son niveau 10K atteint donnera surtout le potentiel de ce coureur, c'est à dire qu'il aura les allures d'entraînement dont sa vitesse marathon POTENTIELLE.
    Il s'entraînera sur la base de cette vitesse marathon potentielle.
Et s'il s'entraîne bien, il pourra tenir cette allure sur son marathon.
Avec un petit NEGATIVE SPLIT.

PS : la phase VMA / SL2 n'est pas indispensable pour les coureurs récréatifs.
On peut se baser sur des courses passées pour évaluer le potentiel.

PS2 : je n'en dirai pas plus.
Ceux qui veulent plus d'informations, ils savent comment les obtenir.

Messagepar JuCB » sa fiche K
» 18 Août 2018, 13:48

merci d'avoir pris le temps de me répondre

Nine14 a écrit: Je ne comprends pas trop tes chiffres.


Désolé si pas clair : Année, distance, moyenne
on note un effondrement en 2017 puis stabilisation

Nine14 a écrit:PS : la phase VMA / SL2 n'est pas indispensable pour les coureurs récréatifs.


Je m'entraîne 5 fois par semaine : on quitte le stade des coureurs récréatifs à combien de séance ?
ppg,côtes, sortie nature 1h30, allure, sortie longue

Nine14 a écrit:Ceux qui veulent plus d'informations, ils savent comment les obtenir.


C'est là le hic : je n'ai pas de compte Facebook.
Tu attires le chaland ici... Tu peux m'envoyer par MP comme pour les séances Z2000
Je ne poste pas de photo #crosscall #puremountain mais qui sait je vais peut-être craqué

Nine14 a écrit:On peut se baser sur des courses passées pour évaluer le potentiel.


1h27 au semi, je vais partir de ça pour un travail VMA / SL2 : t'aurais pas un plan sur 3 mois ??

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